Iran : La BBC mène une campagne anti-Bush 22.01.2007 La Grande-Bretagne a diffusé sur la chaîne publique BBC, un documentaire stipulant que le régime des mollahs était prêt à faire toutes les concessions en 2003 mais que Washington avait rejeté cette offre. Cette diffusion intervient alors que nous connaissons la très forte opposition des Britanniques à imposer des sanctions aux mollahs ou à chercher à les affaiblir. La Grande-Bretagne a fondé depuis plusieurs siècles sa diplomatie sur des relations étroites avec le clergé chiite iranien dans ce pays clef d’un point de vue stratégique. Les intérêts Britanniques exigent que la république islamique ne soit pas renversée. Au moment de la publication du Rapport Baker, Tony Blair avait même fait ouvertement campagne afin d’inciter l’administration Bush à entamer des discussions avec le régime des mollahs. Bush rejeta la proposition de Blair et ce dernier renonça avec amertume à une conférence de presse, au cours de laquelle il comptait faire part de ses propositions. LE Documentaire ! | La BBC s’est procuré une copie de la lettre que les autorités iraniennes auraient alors fait parvenir à leurs homologues américains : Le régime des mollahs y propose de cesser d’apporter son aide aux milices chiites du Hezbollah libanais, ainsi qu’au mouvement islamiste Hamas, d’user de son influence pour aider à la stabilisation de l’Irak et promettait une totale transparence sur son programme nucléaire. Il y a de nombreuses incohérences dans cette première partie, la principale étant qu’en 2003, « l’Iran » n’avait pas encore commencé sa campagne de terreur sur l’Irak, tout simplement parce que Les attentats quasi quotidiens à la voiture piégée ont commencé fin janvier 2004 et la campagne terroriste iranienne de promotion de la guerre civile (entre les sunnites et les chiites) a commencé en Février 2006. Le document de la BBC est un document confectionné pour agir sur l’état actuel de « l’opinion » très traumatisée par le nombre grandissant d’attentats contre les cibles civiles. Et pour arriver à influencer l’opinion, ce « document miraculé » joue sur le flou artistique en matière de dates et évite d’expliquer à quel moment de l’année 2003 ces propositions ont été faites et par quel miracle ce papier (que l’on ne voit jamais en détail à l’écran) est arrivé à la BBC. Selon ce document, les mollahs demandaient aux Etats-Unis qu’ils renoncent en échange à leur attitude hostile, que soient levées toutes les sanctions contre Téhéran et que les membres de l’organisation des Moudjahidine du peuple soient arrêtés et rapatriés en Iran. Là, est le second défaut de ce document, il n’y a que le régime des mollahs pour insister sur le fait que les Moudjahidines soient un danger pour le régime ou une alternative plausible pour un changement de régime en Iran. Les Moudjahidines du Peuple ont participé à la révolution de Khomeiny et ont été responsables de dizaines de milliers d’exécutions et d’actes de tortures. Après un an d’exercice commun du pouvoir et une tentative de putsch interne raté, ils ont pris le chemin de l’exil et ont rejoint Saddam Hussein pour combattre arme au poing à ses côtés. Ils ont alors tué des milliers de jeunes soldats iraniens perdus derrière les lignes irakiennes. Vu l’impopularité de ce mouvement, le régime des mollahs insiste régulièrement sur un complot américain qui aurait pour objectif de rendre les Moudjahidines maîtres de l’Iran : c’est le spectre du grand méchant loup. Régulièrement le régime des mollahs essaie d’amplifier ce pseudo danger que représentent ces vieux terroristes retraités pour effrayer les Iraniens avec la menace d’un lendemain plus terrible que le régime des mollahs. Le document (invisible) de la BBC utilise donc un argument du régime des mollahs, pour prouver l’existence d’une démarche pacifique des mollahs en vue d’un vrai dialogue : démarche qui aurait été refusée par Dick Cheney et Donald Rumsfeld (les 2 bêtes noires des mouvements anti-guerre)... Visiblement, le documentaire de la BBC visait une tranche précise des téléspectateurs britanniques pour créer un effet précis. Un peu à l’image de la fronde journalistique menée contre Jacques Chirac qui a utilisé le dialogue avec l’Iran comme prétexte, le document de la BBC est une fronde contre l’administration Bush avec l’objectif de prouver l’hostilité de Cheney et son entourage à l’égard de toute ouverture avec l’Iran. Le reste ne manque pas de piquant… Selon la BBC, « les Américains » ont immédiatement considéré que ce texte dactylographié sans aucune signature officielle avait l’approbation des plus hautes autorités iraniennes… « Les Américains » en question se résument à colonel Lawrence Wilkerson, l’ancien chef de cabinet du secrétaire d’Etat, Colin Powell. Malgré son appartenance au parti républicain, Colin Powell est très proche de Council on Foreign Relation, un Think Tank américain très lié au Foreign Office britannique. Le Council on Foreign Relation est connu pour être le terrain de Jeu de Zbigniew Brzezinski, le maître d’œuvre de la reprise des négociations avec les mollahs et le père spirituel du Rapport Baker. Le parti démocrate (partisan d’entente régionale avec les mollahs) et le Council on Foreign Relation (CFR) sont très liés. Le CFR est connu pour avoir des antennes dans différents pays : ces antennes partagent les mêmes objectifs que le CFR sur différents sujets. Ainsi le Chatham House est l’antenne Britannique du CFR et c’est le Chatham House qui a invité Khatami en Grande-Bretagne. L’antenne française du CFR se nomme l’IFRI [1]. L’IFRI continue à plaider en faveur d’une reprise de dialogue avec les mollahs. Ces maisons sont partisanes du dialogue avec les modérés du régime (en particulier avec Rafsandjani) pour aboutir à des Garanties de Sécurité pour l’Iran selon les exigences des mollahs. Selon la BBC, le département d’Etat a d’abord examiné le texte anonyme de la proposition de manière favorable. Mais l’offre « une fois parvenue jusqu’à la Maison-Blanche a été rejetée par le bureau du vice-président Dick Cheney, ce dernier s’en tenant à la ligne de conduite selon laquelle on ne traite pas avec le diable », explique le colonel Lawrence Wilkerson. Le documentaire de la BBC est clairement anti-Bush et utilise un jargon délibérément simpliste faisant référence au « diable » pour bien infantiliser l’approche regrettable (selon Wilkerson) du clan Bush. Mais au demeurant, ce « document » est fondé sur une base historique fausse au point de vue chronologique : en 2003, les mollahs n’avaient pas encore commencé leur campagne de déstabilisation par des attentats à la voiture piégée. Ils ne pouvaient donc pas offrir leur aide pour y mettre fin. Au final, Cheney et la Maison-Blanche sont discrédités, les mollahs sont accrédités d’une démarche pour le dialogue et les Moudjahidines sont plus ou moins confirmés dans leur rôle d’opposants officiels. Un dernier détail : le document des propositions, sur lequel la BBC a monté cette opération anti-Bush, est un texte écrit à la machine sur quelques simples papiers sans entête officielle, ni aucune signature !
Actuellement il y a urgence : de nombreux contrats des mollahs ont été annulés et en même temps, l’amplification des crises régionales a un coût et les mollahs doivent distribuer d’importantes sommes de dollars à leurs alliés miliciens, le Hezbollah, al Qaeda irakien, les milices Chiites et le Hamas. Le régime est très endetté. Les négociations directes avec les Etats-Unis peuvent aussi recréer la confiance et faire revenir les investisseurs en Iran. L’objectif de ce genre de campagne est de créer une psychose médiatique internationale diabolisant les intentions de l’administration Bush à l’égard des mollahs. Bush = Guerre, Paix = Négociations. Pour en savoir + sur la situation en Iran :
[1] Rafsandjani et l’IFRI En février 2005 le directeur général de l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI), Thierry de Montbrial avait écrit dans le Monde : «Si le successeur de Khatami est un homme fort et expérimenté, comme Rafsandjani, on peut imaginer que la République islamique reconnaisse Israël et s'engage durablement à respecter les obligations du Traité de non-prolifération - pour s'en tenir à deux demandes occidentales impérieuses - en échange de la prise en considération de son rôle légitime dans l'organisation de la sécurité régionale et de concessions économiques». Pour en savoir + sur Rafsandjani | L'Iran ne se pliera pas aux pressions | |