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Le dollar a boycotté l’Iran
02.01.2007

Les discussions diplomatiques avec la république islamique d’Iran et la Corée du Nord traînant en longueur, les USA ont trouvé dans leur stratégie de secours une solution simple qui semble porter quelques fruits : des sanctions bancaires.



Par Anne Gearan de l’Associated Press dans le Kentucky.com

Au cours de l’an passé, l’administration de Bush a persuadé des banquiers Européens et Asiatiques de mettre un terme à l’accès iranien et nord-coréen au système financier mondial. Les raisons invoquées par les Etats-Unis ont été le financement du terrorisme et la corruption. Washington accuse les deux nations de se comporter en escroc, mais également de contrefaire l’argent des États-Unis à Pyong-Yang et de cacher un programme d’armes nucléaires à Téhéran. Henry Paulson, le Secrétaire du Trésor, et d’autres, ont démarché les banquiers et fonctionnaires à travers le monde au cours de réunions discrètes mais suivies.

Leur succès doit jusqu’ici plus à l’intérêt des banques qu’aux objectifs de politique étrangère de Washington. Les fonctionnaires des États-Unis sont persuadés que les banques démarchées craignent d’avoir des relations avec des banques étrangères, des sociétés de commerce ou des gouvernements liés au terrorisme.

Seuls, les USA ne pouvaient pas empêcher une entité étrangère de faire des affaires avec des institutions suspectes. C’est pourquoi les Etats-Unis ont décidé de d’y remédier en prenant des mesures (relativement faibles) contre seulement 2 banques liées à Téhéran et à Pyong-Yang. L’administration Bush a ainsi créé une psychose de scandale pour toutes les autres banques qui font des transactions avec l’Iran et la Corée du Nord.

Message subliminal

Il y a un puissant message subliminal dans cette approche bancaire. En effet, on a averti les banques étrangères que leur accès au vaste système bancaire des États-Unis pourrait être bloqué si les Etats-Unis découvraient que ces banques ont continué leurs transactions avec des groupes financiers liés au terrorisme.

La stratégie financière en solo des États-Unis est plus flexible que la diplomatie internationale, cette stratégie n’exige aucune approbation du Congrès ou d’autres pays. Il y a des risques, en particulier dans le cas de l’Iran, mais la stratégie a fonctionné bien mieux que ses concepteurs ne l’avaient espéré, et ce alors que les mesures prises aux Nations Unies sont trop molles, trop lentes et sûrement encore trop longues dans la mise en place et surtout difficiles à vérifier.

Suite aux démarchages des haut fonctionnaires américains, près d’une vingtaine d’institutions financières ont volontairement réduit ou stoppé leurs affaires avec la Corée du Nord, surtout après que les Etats-Unis s’en soient pris à une banque basée à Macao.

Le département du Trésor a annoncé que la Banco Delta Asia était complice des dirigeants nord-coréens pour le détournement de plusieurs millions de dollar en espèces. La Corée du Nord a protesté, rompu les négociations internationales de désarmement et cherché à trouver d’autres places à devise forte pour son économie d’isolement.

En décembre, la Corée du Nord a accepté de revenir à la table des négociations à condition que les États-Unis acceptent de revoir leur politique de restriction bancaire, mais les Nord-Coréens sont repartis après cinq jours. Les délégués ont dit que les Nord-Coréens refusaient de discuter des armes nucléaires, n’exigeant qu’une chose : que Washington retire de sa liste noire la Banco Delta Asia.

Dans le cas de l’Iran, le pétrole étant traditionnellement négocié en dollars, les États-Unis ont interdit aux banques américaines d’exécuter une seule manœuvre électronique secondaire qui permettait à « une banque iranienne » de vendre du pétrole ou d’autres exportations en dollars et le tour était joué.

Une Banque iranienne visée

Après l’exemple Nord Coréen et l’action contre Banco Delta Asia, les États-Unis ont décidé de viser la Banque Saderate basée à Téhéran. Lors de cette annonce en septembre, Stuart Levey, le sous secrétaire d’état américain du Trésor en charge du terrorisme et de la délinquance financière, a énuméré quatre groupes terroristes du Moyen-Orient que la banque Saderate est accusée de financer.

La république islamique d’Iran a nié ces allégations, mais sans en apporter la preuve. Pendant des mois, des fonctionnaires des États-Unis ont apporté aux banquiers Européens les preuves dont ils disposaient et ont établi que la Banque Centrale d’Iran utilisait le système financier international pour envoyer des fonds aux terroristes et ce partout dans le monde .

Déjà avant l’affaire de la banque Saderate, la banque suisse UBS avait coupé toutes ses transactions d’affaires avec l’Iran, et les banques HSBC et Crédit Suisse ont suivi ce mouvement. Stuart Levey a par la suite révélé comment lui et d’autres ont expliqué le dossier iranien à une douzaine d’institutions financières Européennes majeures, et que toutes ont donné leur accord pour reconsidérer leurs relations avec la république Islamique d’Iran.

Stuart Levey a par contre refusé de nommer ces établissements. Levey a également indiqué qu’il ne dirait pas si les États-Unis projettent une quelconque action contre les cinq grandes banques d’état de la république islamique d’Iran. Mais les milieux bancaires supposent que c’est d’autant plus probable si Téhéran refuse de faire marche arrière dans son programme nucléaire.

Cette stratégie bancaire pourrait s’effriter si les banques internationales reconsidéraient leurs positions nouvelles, probablement sous la pression iranienne ou alléchées par des perspectives lucratives proposées par Téhéran.

Mais Charles Calomiris, professeur à Columbia Business School, pense que la tendance est toujours dans l’autre sens. Selon Calomiris, « les banques internationales ne tiennent pas à être connues comme des institutions faisant des affaires avec la république islamique d’Iran tandis que cette dernière poursuit sa course aux armes nucléaires ». Et d’ajouter qu’ il n’est pas possible, pour certaines banques de continuer à faire discrètement des affaires avec les mollahs , les banques concurrentes se chargeraient de les dénoncer !

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