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Iran : à l’heure de l’Institut des Etudes Islamiques
29.10.2006

Nous avons constaté un fait surprenant sur le site francophone de l’IRNA (agence de presse de la république islamique). Les rubriques social, culture et sciences ne contiennent aucun article. Afin de remédier à ce manque, nous avons décidé de publier des témoignages d’iraniens sur leur quotidien sous le régime des mollahs. Après, Saïd, Syamak et Milad, voici le cas de Sadeq : Fils d’Ayatollah !



Sadeq est le fils d’un grand Ayatollah. Et pas n’importe lequel Ayatollah, le représentant même de Khomeiny en Iran pendant ses années d’exil à Nadjaf, et aujourd’hui membre de l’Assemblée des Experts, la plus haute assemblée du régime des mollahs.

A peine âgé de quarante ans, Sadeq, débordant pourtant d’ambitions politiques, envisageait même de devenir le président de la république islamique. Il a été néanmoins freiné dans sa soif du pouvoir, car, aussi pistonné que soit Sadeq, la concurrence est rude et le clan de Rafsandjani sans pitié.

N’ayant pas de fonction officielle, Sadeq s’est créé un Institut des Etudes Islamiques, occupant tout un immeuble d’une dizaine d’étages dans un beau quartier de Téhéran. Malgré son nom pompeux, cet institut ne fait rien d’important et n’a aucun objectif bien précis.

Il publie principalement les livres écrits par Sadeq, des ouvrages dont le sujet est le plus souvent la « psychologie » ! Oui, en effet, Sadeq a fait des études de psychologie et d’ailleurs à l’Institut, gare à celui qui omettrait le titre de docteur en faisant allusion à lui. Ne sachant pas comment justifier son Institut, Sadeq a commencé à rassembler une collection d’antiquités et a créé un musée dans ce sens. Mais ce musée n’est pas ouvert au public et sert uniquement de vitrine pour Sadeq qui le fait visiter à ses invités de marque.

Régulièrement, des équipes de la télévision iranienne viennent interviewer Sadeq à son bureau. Et de temps en temps, Sadeq fait la tournée des capitales d’Europe pour rencontrer les grands du Monde. Ainsi, en 2000, il interviewa Tony Blair et en profita pour se présenter comme architecte du rapprochement avec l’occident. Son initiative lui attira des ennuis, non pas que les Mollahs soient contre ce rapprochement, mais parce que chaque clan se bat pour avoir le monopole du rétablissement des relations avec les Etats-Unis et de s’approprier ainsi le jackpot qui en découlerait.

A son bureau, Sadeq s’habille en djellaba, vêtement inconnu et incongru en Iran, signe ostentatoire d’une identité hostile à la Perse. Le tissu transparent de sa djellaba fait apparaître nettement son slip et donne un ton franchement surréaliste au grand bureau qu’il occupe, avec sa belle vue sur Téhéran et sa grande table de réunion en acajou. Aux murs sont accrochées des tapisseries avec l’effigie de Khomeiny et de l’Imam Ali. Sur une table, des exemplaires des livres de Sadeq que les visiteurs sont priés d’accepter comme cadeau.

Quand le téléphone sonne, le correspondant parle business : Dubaï, Londres, Francfort, vendre, acheter. Mais cette fois-ci c’était de Paris qu’on l’appelait et il s’agissait de l’Ambassadeur des Mollahs, un ami proche de Sadeq.

Comme Rafsandjani, Sadeq se prétend modeste, sans revenu et démuni : « Depuis tant d’années, je ne suis que locataire de mon logement », dit-il sur un ton plaintif. Mais il n’expliquera jamais d’où provient l’énorme budget de son Institut.

« Quand la religion se mêle de la politique, le résultat n’est qu’une marre puante » se confie Sadeq à voix basse ! Le croit-il vraiment ou le dit-il juste pour plaire à son invité ? Probablement ni l’un, ni l’autre.

La désillusion règne au pays des mollahs et ceux de la deuxième génération comme les gros bonnets rêvent d’une république islamique bâtarde, un régime qui resterait tout aussi islamique mais sans les turbans, un régime qui se donnerait une façade plus progressiste à l’image des pseudo-intellectuels qui plaisent tant à l’occident.

Quoiqu’il en soit, l’accoutrement de Zaza Napoli du fils de l’Ayatollah jure avec ses propos « progressistes », ses livres de psy et son institut d’import-export et de spéculation immobilière. Il est lui-même la preuve vivante de l’échec avancé de cette mutation tant désirée par les dirigeants eux-mêmes.

Le major d’homme de Sadeq raccompagne son invité et dans l’ascenseur, loin des yeux de son maître qui le réprimande pour un oui ou un non, il demande  :

Vous n’habitez pas en Iran, n’est-ce pas ?

Non. Je vis en France.

Vous en avez de la chance ! dit-il sur un ton mélancolique, trahissant le désarroi d’une personne travaillant pourtant au cœur de la propagande du régime.