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<HTML>Les coïncidences remarquables de l’essai Nord Coréen
11.10.2006

Il ne s’agit sans doute pas d’une coïncidence : la proximité de l’essai nucléaire Nord Coréen et l’annonce de la Russie d’exclure toute participation étrangère du développement d’un champ gazier géant. Mais si l’essai nucléaire Nord Coréen est mis en doute, l’annonce Russe est bien réelle et définitive.



Les deux sont également susceptibles d’enrayer la baisse des prix du pétrole qui était devenue un sérieux problème pour le régime des mollahs ainsi que pour tous les adversaires des sanctions contre le même régime. Le pétrole remonte à nouveau, les deux nouvelles crises laissent planer un inversement des cours et renaît de ses cendres le spectre d’un baril à des prix irraisonnables, rendant difficile la possibilité de sanctions pétrolières à l’encontre l’Iran. Il y a des coïncidences qui sont remarquables.

Mais, il ne faudrait pas que l’enchaînement des coïncidences éclipse les évènements. Or, l’essai nucléaire Nord Coréen a éclipsé un événement plus important que cet essai dont l’intérêt réside dans la réponse que lui fera la communauté internationale afin de répondre à cette provocation mais aussi et en même temps à l’Iran, allié de la Corée du Nord. Cet événement éclipsé concerne l’approvisionnement en pétrole de l’Europe par la Russie, c’est-à-dire qu’il concerne 3 des 5 membres du Conseil de Sécurité, autrement dit nous tous.

L’événement : Gazprom continue son offensive énergétique. Le lundi 9 octobre, Gazprom a annoncé qu’il allait développer le champ gazier géant Chotkman par ses propres moyens. Selon le PDG de Gazprom, la priorité pour Chotkman sera la livraison par gazoducs aux marchés européens, alors que le géant gazier avait indiqué précédemment qu’il comptait liquéfier une partie du gaz extrait de Chtokman en vue de livraisons par bateau vers le marché américain.

Le hasard de calendrier a fait que la prise en main de Chotkman coïncide avec les signatures de d’accord avec ENI et avec Repsol, coïncidence qui révèle ce que nous savions déjà : la stratégie de l’état russe est fondée sur le contrôle de l’approvisionnement de l’Europe. C’est ainsi que l’affaire Youkos prend sens : la Russie et Gazprom ne sont qu’une seule entité, et cette entité ne tolère aucune concurrence.

Le contrôle des marchés Européens a pour objectif de créer une dépendance vitale et sans alternative car la Russie contrôlera aussi l’approvisionnement par Gazoducs ou Oléoducs. Les conséquences de cette main mise sont très importantes pour la Russie qui pourra s’assurer de très confortables revenus tout en comptant sur le soutien européen sur un plan diplomatique dans l’ensemble des crises internationales à venir.

Chotkman |C’est en 2005 que Gazprom avait sélectionné cinq compagnies internationales, les norvégiens Statoil et Norsk Hydro, les américains ConocoPhillips et ChevronTexaco ainsi que le français Total, pour créer un consortium international pour l’exploitation de Chotkman. Mais entre temps, grâce à la crise internationale du nucléaire iranien, les prix du pétrole ont flambé et Gazprom a réalisé d’importants bénéfices qui ont permis à la Russie de rembourser ses dettes et se refaire une santé économique. Parallèlement la Russie a effacé les dettes contractées par ses clients en armements, leur permettant d’acheter de nouvelles armes.

Nombres de ses clients sont des états pétroliers et eux aussi s’étaient enrichis grâce à la hausse des prix du pétrole. En soutenant le point de vue du régime des mollahs, la Russie a, elle-même, participé à l’amplification de la crise iranienne et contribué à la flambée des prix du pétrole. Elle a ainsi rattrapé ses retards et s’est replacée comme le plus grand vendeur d’armement au monde ainsi que le pays recordman des bénéfices pétroliers de l’année.

En 2004-2005, la Russie avait besoin de Statoil, Norsk Hydro, ConocoPhillips, ChevronTexaco et Total, mais aujourd’hui elle peut se passer d’elles. Les grandes compagnies sont déboutées et n’ont aucun recours, certaines ont même appris la nouvelle par les média. La Russie contrôlera pleinement Chotkman et elle possède déjà 51% du gazoduc de la Baltique, rebaptisé Nord Stream, et sans doute lancera-t-elle des OPA pour acheter plus de parts dans ce Gazoduc par l’intermédiaire d’autres sociétés Russes. La Russie pourra étendre ce procédé à d’autres champs pétroliers déjà attribués aux compagnies pétrolières étrangères : sont concernés l’anglo-néerlandais Shell et l’américain ExxonMobil à Sakhaline, ainsi que le français Total en Sibérie.

Cependant, la force de cette offensive réside dans l’absence d’une alternative pour ses adversaires. Ce qui oblige les compagnies occidentales à se contenter des miettes et à participer au projet Chtokman en tant que sous-traitants ou consultants technologiques. Il existe une autre alternative : celle d’un changement rapide du régime en Iran pour créer un état stable et pro-occidental qui reprendra la suite de la politique de la dynastie Pahlavi : stabilité, modernisme, laïcisation, et contention de l’hégémonie russe. Sinon, quand la Russie aura toutes les cartes en main, après l’Europe, elle s’intéressera au partenariat avec les mollahs, à l’Afrique pour réduire les parts de l’Europe sur ce continent convoités par tous.

La décision Russe de la prise en main de ses ressources en hydrocarbures est de loin plus impressionnante et plus déstabilisante que l’essai nucléaire Nord Coréen, lui aussi téléguidé par Moscou téléguidé par Moscou. Malheureusement, les occidentaux se bercent d’illusions et cherchent à amadouer Poutine en lui remettant des médailles ou en lui promettant des accords de coopération industrielle. La Russie se sert quand bon lui semble comme dans le cas d’EADS et elle n’a guère besoin d’entrer dans l’OMC pour prospérer. Et nous ne sommes qu’au début de cette offensive qui a plusieurs volets complémentaires : le pétrole, le nucléaire, la prolifération.

La bombe Iranienne, plus que sa consoeur Nord Coréenne, sonnera le glas de la dissuasion à 5 et marquera le début des guerres terroristes dont nous avons vu un exemplaire satisfaisant cet été. En l’absence d’armes nucléaires et plus exactement de la dissuasion, le Hezbollah et son protecteur atteindront un niveau d’impunité jamais égalé. Tout le Moyen-Orient sombrera dans le chaos et deviendra impropre au transit du pétrole.

Les seules routes sûres par tubes seront celles du réseau de distribution possédé par Gazprom. Il s’agit d’une offensive extrêmement bien pensée dans laquelle l’islamisme des uns et des autres constitue des instruments très efficaces. La Russie qui a souffert et souffrira toujours d’une absence de façades maritimes à sa convenance a trouvé le moyen de neutraliser ses concurrents en rendant impraticable tous les territoires possibles autres que les siens pour le transit du pétrole. Parallèlement, sa proximité avec la Chine le Japon à l’Est et avec l’Europe à l’Ouest lui permet d’approvisionner sans entraves ses trois gigantesques clients. L’événement de cette semaine était cette nouvelle étape de l’offensive énergétique Russe.