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Ken Weinstein : Pourquoi l’Iran et la Syrie doivent être écartés des négociations ?
15.08.2006

Alors que le conflit fait rage entre Israël et le Hezbollah au Liban, les débats s’attisent sur la stratégie que doit adopter la communauté internationale afin de mettre un terme aux combats et, le cas échéant, de parvenir à éviter une nouvelle agression de la part du groupe terroriste chiite. Pour des raisons évidentes, les États-Unis et la France se situent au coeur de ce débat. Ils doivent à tout prix éviter de se fourvoyer dans des demi-mesures, ou de se satisfaire d’illusoires solutions.



La tentation est grande d’« acheter » un cessez-le-feu aux pays responsables de la crise : la Syrie et l’Iran. Alors que la France, par le biais de son ministre des Affaires étrangères, n’a pas caché sa volonté de faire rentrer l’Iran dans le jeu diplomatique, nombreuses sont les voix qui, à Washington comme ailleurs, s’élèvent pour suggérer un dialogue avec la Syrie, afin de mettre un terme à l’axe syro-iranien.

Une telle approche serait inappropriée et contre-productive ; elle surviendrait surtout au pire moment. Sponsor du Hezbollah, qui lui servit des années durant de porte d’entrée au Liban, la Syrie exerce sans aucun doute une grande influence sur le groupe de Nasrallah. L’Iran, quant à lui, est au centre du conflit, fournissant le Hezbollah régulièrement en matériel et en argent, l’entraînant par le biais de ses pasdarans. Le conflit constitue l’occasion rêvée de rallier un peu plus le monde musulman autour de la rhétorique d’Ahmadinejad et lui permet de détourner l’attention de son programme nucléaire. Bien qu’il paraisse peu probable que les deux pays se soient préparés à une réaction israélienne d’une telle envergure, l’agression injustifiée contre Israël à sa frontière Nord répond à une stratégie coordonnée entre les deux pays alliés, comme le prouvent les voyages répétés d’officiels entre les deux pays avant la crise.

Demander à ces pays de faire usage de leur influence sur le Hezbollah pour mettre fin au conflit est une stratégie de sortie de crise parfaitement défaitiste. Pour que les démocraties aient enfin une chance d’éradiquer l’immense pouvoir de nuisance qu’exerce le Hezbollah, il est impensable de lui offrir quelque répit que ce soit ; lequel aboutirait peut-être à lui offrir une seconde jeunesse. La France, l’une des premières victimes des attentats du Hezbollah de Paris à Beyrouth devrait se réjouir de la perspective d’un affaiblissement considérable du groupe. Vouloir en finir totalement avec le Hezbollah est certes illusoire, mais s’assurer d’une victoire sur ce groupe permettrait de réduire à néant ses ambitions destructrices et le dissuaderait pour longtemps de procéder à des attaques semblables à celle qui fut à l’origine de l’intervention israélienne. La Syrie perdrait là son principal allié dans sa stratégie impérialiste sur le Liban, ce qui ne pourrait que réjouir la France et les États-Unis. Le principal élément dissuadant la communauté internationale de s’attaquer de front à la question du nucléaire iranien perdrait alors toute substance. La résolution 1559 de l’ONU pourrait enfin entrer en vigueur un an après son vote par le Conseil de sécurité.

Pourquoi alors sauver le Hezbollah en demandant l’aide de ses parrains ? Comment faire confiance aux deux pays les plus déstabilisateurs de la région sur une question aussi primordiale pour la sécurité mondiale ? Au-delà de la question du Hezbollah, le réflexe constant des démocraties consistant à récompenser les attitudes menaçantes et les agressions des États voisins de la région en menace directement la stabilité. La Syrie se sent renforcée par l’allégement progressif des réprimandes internationales liées à l’assassinat de l’ancien premier ministre libanais Rafic Hariri. Les menaces de sanctions planant sur les plus hauts dirigeants du régime (dont certains membres de la famille d’Assad) se sont évaporées et le monde a assisté, muet et impuissant, à une répression accrue des opposants politiques par le régime baasiste et à la constitution d’une alliance chiite antiaméricaine avec l’Iran. De la même manière, le Hamas, dont les principaux dirigeants militaires ont trouvé refuge à Damas, ne doit pas nous faire oublier le rôle néfaste de la Syrie dans la guerre contre le terrorisme et le processus de paix au Proche-Orient.

Le comportement iranien actuel (Ahmadinejad vient d’appeler de nouveau à la destruction d’Israël) et son probable refus des propositions généreuses de la communauté internationale sur le dossier nucléaire montrent bien que le régime théocratique de Téhéran se sent renforcé par ce qu’il interprète comme une impuissance de l’Occident à faire face au défi iranien. La décision (bien que justifiée) de la diplomatie américaine d’ouvrir le dialogue avec l’Iran renforce la détermination de Téhéran. Nous ne vivons ici qu’une triste reprise des tentatives malheureuses d’apaisement envers les deux régimes, qu’il s’agisse des stratégies d’ouverture à la Syrie menées sous la première administration de George W. Bush, et des fiascos successifs avec l’Iran, de Carter à Clinton.

Les régimes syrien et iranien doivent comprendre que les actes commis seront lourds de conséquences et que le chantage ne peut fonctionner. Ce n’est que par des gestes positifs (comme l’expulsion de l’état-major du Hamas) que Damas doit pouvoir espérer rejoindre la communauté internationale. Espérons que la fragilité actuelle du pouvoir allaouite pourra convaincre Assad de l’ineptie de son alliance avec le régime le plus destructeur de la région. Quant à l’Iran, ce n’est qu’en mettant fin à l’enrichissement d’uranium et en acceptant de trouver un compromis sur la question de son programme nucléaire qu’il pourra devenir un partenaire légitime pour les démocraties. La faiblesse de la réaction occidentale ne fera que renforcer la politique du pire : pourquoi changeraient-ils une méthode fonctionnant si bien ?

Les solutions improvisées dans l’urgence peuvent satisfaire et rassurer à court terme, mais elles affaibliront, à n’en pas douter, notre détermination à assurer aux peuples du Moyen-Orient un avenir de paix et de liberté. L’Histoire a montré les conséquences tragiques de la complaisance face à l’agression et la dictature. Ne tombons pas dans ce piège une fois de plus.

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