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Thérèse Delpech : « L’Onu n’a aucune chance d’impressionner l’Iran »
01.04.2006

Thérèse Delpech est Directrice des Affaires Stratégiques au Commissariat à l’Energie Atomique depuis 1997. Elle a été, entre 1995 et 1997, conseiller auprès du Premier Ministre (affaires politico-militaires) et, entre 1987 et 1995, directeur adjoint des Affaires internationales (Questions stratégiques et de défense, non-prolifération) au Commissariat à l’Energie atomique. Thérèse Delpech a publié en octobre : L’Ensauvagement. Le retour de la barbarie au XXIe siècle (Grasset), Prix Femina de l'Essai en 2005.. Elle publie la semaine prochaine « l’Iran, la bombe et la démission des nations » (Autrement).



Le Conseil de Sécurité de l'Onu a donné jeudi à l'Iran un nouveau délai de 30 jours pour suspendre ses activités d'enrichissement d'uranium tout en se gardant bien de brandir la menace de sanctions. Qu'en pensez-vous ?

Le Conseil de Sécurité a reçu le dossier iranien au début du mois de février. Il était alors entendu avec la Russie et la Chine qu’il n’y aurait aucune « action » avant le mois de mars, et la remise de son rapport par Mohamed El Baradei, directeur général de l’AIEA. Or, trois semaines se sont écoulées entre la remise de ce rapport et la déclaration – très faible – du Conseil de Sécurité de jeudi. Une déclaration qui n’a d’ailleurs aucun pouvoir juridique contraignant et aucune chance d’impressionner Téhéran. La seule stratégie qui puisse donner des résultats serait celle de sanctions graduées qui fassent réfléchir le régime de Téhéran sur la politique de confrontation très dure qui a été adoptée depuis l’arrivée au pouvoir de Mahmoud Ahmadinejad.

Sur le strict plan du droit international, l'Iran est-il vraiment en infraction avec le Traité de non-prolifération ?

Depuis que l’on a appris à l’automne 2005 – ce que l’Iran a d’ailleurs reconnu – que les techniques d’usinage et de moulage de l’uranium en hémisphères avaient été acquises par Téhéran auprès du réseau pakistanais d’A.Q. Khan, il y a bien une violation de l’article 2 du Traité de non-prolifération (TNP). Cette violation aurait pu autoriser une saisine directe du Conseil de sécurité sans même passer par l’AIEA.

Auparavant, les violations de l’Iran telles qu’elles avaient été constatées par le Conseil des Gouverneurs de l’agence de Vienne étaient des violations de l’accord de garantie passé par Téhéran avec l’AIEA. Il s’agissait essentiellement de la « non déclaration » d’importations, d’activités et de sites que l’Iran était tenu par cet accord de déclarer à l’agence internationale de Vienne. Il s’agissait aussi de mensonges patents, comme dans le cas des centrifugeuses.

Croyez-vous, comme certains experts, que l'Iran puisse avoir la bombe nucléaire «dès la fin 2008, au moment de l'élection présidentielle américaine » ?

Si l’on considère que la quantité d’uranium très enrichi nécessaire pour une arme (25 kilos selon l’AIEA) peut être produite en un an par une installation de 3000 centrifugeuses, il est évident que l’annonce récente de l’assemblage d’un premier module de 164 machines à Natanz, à un rythme beaucoup plus rapide que prévu, va bien dans le sens de ceux qui prétendent que l’Iran pourrait avoir une arme dans deux et non dans cinq ans. D’où la préoccupation face au rythme très lent du processus diplomatique actuel, qui intervient après l’échec de deux (ans de) négociations avec les Européens. Les Iraniens prétendent que ces discussions leur ont essentiellement permis gagné du temps.

Interview Par Jean-Dominique MERCHET de Libération

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Pour en savoir + :
- Analyse de la déclaration du Conseil de Sécurité


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