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Iran : Les américains revoient leur copie nucléaire
08.02.2008

En novembre 2007, les américains ont annoncé que selon leurs estimations les mollahs avaient interrompu en 2003 les activités liées au développement d’une arme nucléaire. Le rapport avait contredit toutes les prévisions des soi-disant experts qui ont une vision non-géopolitique du monde. Nous avions attribué ce rapport à une volonté délibérée des américains de modifier le timing du dossier, pour disposer de plus de délais pour détruire la résistance des mollahs par un feu doux de sanctions bancaires purement américaines. Cependant, malgré son ingéniosité de ce plan, les mollahs résistent encore et les américains ont dû « revoir leur copie » pour reprendre une expression de la journaliste Rebecca Serfaty.



En effet, dans le conflit qui oppose les mollahs aux américains, l’enjeu n’est pas le nucléaire mais le Moyen-Orient. Les deux cherchent à trouver une entente : Pour les mollahs, cette entente doit se traduire par leur maintien au pouvoir : l’opération passe par la reconnaissance de leur rôle régional. Mais, pour les américains, c’est tout le contraire : Il leur faut un allié contrôlé en Iran (les mollahs affaiblis ou des remplaçants sans aucun rôle régional ni positif ni négatif), juste un allié car celui qui contrôlera l’Iran, contrôlera le goulot du Golfe Persique et l’accès à l’Asie centrale, c’est-à-dire qu’il aura la mainmise sur la majeur partie du pétrole du monde.

Au lieu de s’exprimer librement (sur cet enjeu politiquement incorrect de domination du monde), les mollahs et les américains s’affrontent via ce conflit sur le nucléaire. Tout les oppose jusqu’aux méthodes d’affrontement. Pour maîtriser les mollahs, les américains ont choisi de sanctionner les partenaires des mollahs et ils ont réussi à faire chuter à presque zéro le nombre et la quantité des investissements étrangers qui sont les poumons de l’économie non industrialisée de l’Iran depuis la révolution islamique qui a fait stopper tous les projets de modernisation des infrastructures entrepris au temps du Chah. Selon le plan américain, plus la crise s’étire en longueur, et plus durera le calvaire de l’économie iranienne. Les maîtres mots de la stratégie américaine sont guerre d’usure, retenue et patience.

C’est tout le contraire chez les mollahs. Pour obtenir une reconnaissance régionale, les mollahs appliquent les méthodes basiques de leur diplomatie : provocations excessives et menace terroriste. Ils prétendent être sur le point de produire des armes nucléaires en espérant que la partie adverse américaine capitulera sous la pression d’une opinion publique pacifiste et des alliés européens et qu’elle négociera. Les ingrédients de base de cette politique sont l’excès, la surenchère de déclarations anxiogènes et d’activités délibérément opaques.

Ainsi au cours des derniers mois, les mollahs se sont engagés dans une spirale incontrôlable de déclarations ou manoeuvres anxiogènes. Une spirale qui aurait pu se solder par l’adoption des sanctions onusiennes très fortes et d’entraîner leur chute. Les américains ne souhaitent pas une chute immédiate des mollahs car elle pourrait conduire vers un changement de régime sans leurs pions.

Ils ont donc publié un rapport (NIE) pour calmer le jeu et réduire les urgences du dossier afin que les mollahs échappent à des sanctions onusiennes, mais demeurent sous la coupe de leurs propres sanctions. En d’autres mots, les américains sont devenus les seuls maîtres à bord pour la gestion des sanctions.

Ils peuvent ainsi doser la pression pour faire mal tout en évitant un effondrement du régime des mollahs. Ils ont piégé les mollahs, mais ils se sont aussi piégés dans leur propre machination car les mollahs ont bien compris le plan des américains et tirent profit de l’opposition de ces derniers à un changement de régime sans leur pions. Il a donc fallu revoir la copie. C’est simple puisque les américains ont la gestion de la crise.

La nouvelle version a été diffusée par le chef du renseignement national à Washington, l’amiral en retraite John McConnell, dans son témoignage devant le Sénat. Les services de renseignement américains ne savent pas si l’Iran a recommencé à développer l’arme nucléaire ces 6 derniers mois, après une interruption de 4 ans et ils estiment que l’Iran n’obtiendra pas l’arme nucléaire avant 2009 (précédemment, ils avaient fixé la date à 2015). Cependant, Téhéran avait procédé à un lancement de missile anxiogène à la veille de cette présentation devant le Sénat, mais McConnell n’a pas relié les deux affaires car il ne s’agit là que d’avertissements adressés aux mollahs et non de véritables rapports de renseignement avec un contenu précis.

« Nous sommes encore inquiets des intentions de l’Iran et estimons de façon presque sûre que Téhéran garde en réserve l’option de développer l’arme nucléaire », a-t-il dit. McConnell a ajouté que « des entités iraniennes continuent à développer plusieurs techniques applicables à la fabrication de l’arme nucléaire ».

Tout est flou. C’est Jacques a dit. Si les mollahs cèdent, les américains publieront un autre rapport qui contredira cette nouvelle mouture. Mais les américains ne sont pas les seules puissances qui ont des intérêts en Iran. Les britanniques ont réagi avec brio à cette nouvelle version par un plan encore plus ingénieux très favorables aux mollahs, car il y a derrière ces jeux de rôles un très vaste enjeu pétrolier qui oppose même les vieux alliés comme les anglo-américains.

WWW.IRAN-RESIST.ORG

En savoir + sur la réplique britannique à ce changement de cap :
- Iran : La crise nucléaire occulte des enjeux pétroliers historiques
- (00.00.2007)

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : USA |

| Mots Clefs | Enjeux : Garanties Régionales de Sécurité : le DEAL US |

| Mots Clefs | Nucléaire Militaire : La Bombe nucléaire Islamique |

| Mots Clefs | Décideurs : Analystes & Experts |