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Charm el-Cheikh : L’Iran aime les jeux d’arbitrage
24.04.2007

Mottaki, le ministre des affaires étrangères des mollahs, a réitéré mardi les réserves de la république islamique d’Iran concernant la tenue en Egypte de la conférence internationale sur l’Irak. Et de son côté, la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice a appelé l’Iran à prendre part à cette conférence.



La conférence internationale prévue les 3 et 4 mai à Charm el-Cheikh doit réunir :

- Six pays voisins de l’Irak à savoir : l’Iran, la Jordanie, le Koweït, l’Arabie saoudite, la Syrie et la Turquie, ainsi que le Bahreïn, l’Egypte, la Ligue arabe, l’Organisation de la conférence islamique (OCI),

- Les Nations unies ainsi que les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Russie, France et Chine),

- Les autres membres du G8 (Canada, Allemagne, Italie, Japon) et le représentant de l’Union européenne.

Comme nous l’avons précisé à plusieurs reprises, la crise nucléaire iranienne est une crise factice et elle n’est que l’interface graphique (une crise de substitution) d’un bras de fer entre les Etats-Unis et le régime des mollahs pour arriver à un accord régional global à propos du Moyen-Orient et de l’Asie Centrale. L’un et l’autre ont des visions très différentes sur cette entente, et la solution américaine ne convient pas au régime des mollahs.

Les mollahs aimeraient conserver le Hezbollah (et le Hamas) en état afin de contrôler le chaos : L’instabilité de la région permet aux mollahs de se poser en arbitre de la confusion. Cette confusion ne peut exister que si les mollahs ont des agitateurs sur place. Tel est le fondement de leur stratégie, ils restent en retrait et laissent faire des intermédiaires : le Hamas, le Hezbollah et même la Syrie. C’est pourquoi le Hezbollah est une nécessité vitale pour les mollahs. Le Hezbollah garantit la politique de nuisance régionale des mollahs et au retour les mollahs doivent trouver un cadre international qui garantisse le Hezbollah.

L’entente selon les mollahs | ils désirent rester l’arbitre du jeu en échange de la fin des hostilités entre les deux pays et la fin de fin de son alliance utile avec la Russie, alliance qui permet à cette dernière de contrôler les exportations pétrolières de l’Asie Centrale. Cette alliance utile des Russes avec l’Iran maintient les réserves de l’Asie Centrale en état de siège géographique.

Cette situation ne convient pas aux Américains qui aimeraient contrôler ces vastes régions pétrolières (ou gazières). Mais il ne s’agit pas pour eux de satisfaire des besoins énergétiques. Les Etats-Unis ont eux-mêmes des réserves en hydrocarbures et s’alimentent généralement au Canada, ils ont par ailleurs des vastes réserves en charbon estimées à 5 siècles. Le contrôle des réserves du Moyen-Orient et de l’Asie Centrale a deux raisons complémentaires : économique et stratégique. En contrôlant le pétrole de ces régions, les Etats-Unis prennent principalement le contrôle des prix et donc le contrôle de la croissance de la Chine (et tout autre Etat dépendant de ses réserves, l’Inde, le Japon ou l’UE par exemple).

Actuellement l’Iran ne peut plus extraire son pétrole ou son gaz et vend des concessions : l’un des objectifs américains (mais aussi européens et chinois) serait de détruire l’OPEP et de dénationaliser le pétrole. Dans cette optique, la prise de contrôle de la région placera les Etats-Unis dans une situation favorable qui leur assurera en plus de bons profits. Afin d’arriver à réaliser ces objectifs, les Américains proposent aux mollahs de « réformer leur régime » et de se retirer pour faire place à des islamistes modérés pro-Américains, ex-agents du régime des mollahs, qui vivent aux Etats-Unis et sont financés par un lobby hybride composé par les pétroliers américains et le régime des mollahs. Cette proposition est tout simplement inacceptable pour les mollahs qui refusent et ce refus se traduit par un renforcement de leur nuisance en Irak mais aussi en Afghanistan ou au Liban.

Longtemps les Iraniens ont cru que les Américains avaient imposé des sanctions au régime des mollahs pour les renverser mais cette supposition était fausse et depuis peu nous avons réalisé que l’objectif était d’affaiblir les mollahs afin de les soumettre à la proposition américaine. Cependant les dirigeants du régime et surtout le véritable patron du régime, Rafsandjani, redoutent une telle évolution qui pourrait se transformer en un cauchemar pour les actuels dirigeants (arrestations, expropriations, pendaisons…).

Malgré un affaiblissement certain en matière économique, les mollahs résistent et s’engouffrent dans la seule réaction possible : le renforcement de leur guerre asymétrique contre Bush car ils savent avec pertinence que Washington a autant besoin de cet accord pour des raisons politiques que Téhéran en a besoin pour sortir de la crise économique.

Connaissant la nécessité de cet accord pour l’administration Bush (pacification de l’Irak et réélection américaine en 2008), les mollahs font des manières, refusent de céder et ont depuis un certain temps intensifié leurs aides aux terroristes irakiens ou aux Talibans. Pendant longtemps, les Américains et leurs alliés ont dénoncé ces ingérences, mais depuis peu, ils se trouvent devant un dilemme : ils ne peuvent pas trop diaboliser ce régime parce qu’ils cherchent un accord et réalisent qu’ils seraient peut-être obligés de le signer avec ce régime, avec Rafsandjani et à ses conditions. Ils ont donc commencé à faire d’importantes concessions au régime et à Rafsandjani.

Pour commencer ils ont décidé d’axer leur communication sur une minimisation du danger des activités nucléaires iraniennes alors qu’ils les avaient eux-mêmes présentées comme étant très dangereuses. Les secondes séries de concessions concernent Rafsandjani : les Etats-Unis ont réactivé l’affaire d’Amia afin de lancer un avertissement à Rafsandjani, puis ils ont fait quitter l’Iran à l’un des membres du commando de cet attentat susceptible de les renseigner sur le rôle de Rafsandjani, ils ont même lancé des notices rouges contre certains commanditaires mais en se gardant de cibler Rafsandjani. Les mollahs autant que les Américains utilisent la méthode du harcèlement et des clins d’œil conciliants.

Des manipulations diplomatiques similaires devaient également absoudre les Talibans pendant l’été 2001, mais elles ont surtout incité les Talibans à donner le coup d’envoi des attentats du 11 septembre via leurs réseaux dormants aux Etats-Unis. Depuis que les Américains font tout pour arriver à un accord avec les mollahs, ces derniers ont intensifié leurs aides aux islamistes aussi bien en Somalie, qu’au Maghreb, en Afghanistan et en Irak. D’ores et déjà, le Hamas a pris des initiatives pour revenir à des actions terroristes et l’on parle du réarmement du Hezbollah.

Les appels de Rice à l’Iran ne feront que renforcer la détermination du régime des mollahs (qui joue son va-tout : garder le Hezbollah et sauver Rafsandjani et les autres mollahs) et l’Amérique risque d’y laisser des plumes si elle n’arrive pas à signer cet accord. Il est certain que Russes et Chinois doivent actuellement essayer d’empêcher cette rencontre à Charm el-Cheikh, et pour eux ce qui compte c’est l’inverse du scénario américain (l’état actuel est idéal car il peut déboucher sur un départ définitif des Américains de toute la région – y compris du Golfe Persique qui intéresse énormément les russes mais aussi les Chinois).

Pris entre deux feux ; la solution américaine et l’hostilité des Russes à l’égard de cette entente, les mollahs ont choisi de ne pas se rendre en Egypte. Rice insiste et les mollahs, incapables de dire ouvertement pourquoi ils ne viendraient pas, ont recours à une excuse à coucher dehors sans son turban : L’Iran regrette que cette conférence ne soit pas précédée par une réunion des seuls pays voisins de l’Irak et déplore que les pays de la région n’aient pas été consultés sur le choix du pays hôte !

Mais afin de ne pas refroidir les Américains, les mollahs leur envoient des messages inattendus riches en promesses d’ouverture. Ahmadinejad dit vouloir rétablir les relations avec les Etats-Unis et le Parlement des mollahs a trouvé une combine légale pour organiser les futures élections présidentielles iraniennes, en octobre 2008, c’est-à-dire un mois avant l’élection présidentielle américaine, laissant entendre une autre entente pré-électorale susceptible d’offrir la victoire aux Républicains (October Surprise 2).

En d’autres termes, les mollahs aimeraient laisser mijoter les Américains, mais ils ne ferment pas la porte et leur laissent croire qu’ils souhaitent une entente avec eux et non avec les démocrates (ou l’inverse). Non seulement, les mollahs veulent être l’arbitre du Moyen-Orient mais aussi l’arbitre de la politique intérieure américaine !

Ce sont les Américains qui ont préfabriqué les Talibans puis le régime des mollahs, ils n’ont qu’à corriger leurs erreurs et cesser cette politique de manipulations.

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| Mots Clefs | Enjeux : Rôle régional de l’Iran |

| Mots Clefs | Enjeux : Rétablir les relations avec les USA & Négociations directes |

| Mots Clefs | Décideurs : Condoleezza Rice |

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : IRAK |