Iran : La semaine en images n°185 04.09.2011 Cette semaine finissait le mois de Ramadan qui a été marqué par le boycott massif des mosquées et des rassemblements officiels par le peuple, un mois qui a clairement démontré la chute de la popularité de l’Islam en Iran, mais aussi l’isolement de la caste dirigeante. Ce double rejet et le manque de mesures punitives par le régime ont paniqué ses derniers partisans. Ils se sont mis à s’éloigner du régime et à acheter des devises ou de l’or pour préparer leur fuite. Pour apaiser leurs craintes, le régime devait se montrer fort : il a fait de nombreuses annonces d’arrestations, mais personne n’y a cru car il ne déployait pas ses soi-disant forces dans les rues. Il y a une semaine, le vendredi 26 août, à l’occasion de la Journée de Qods, le régime comptait rassurer et motiver ses partisans paniqués et il comptait démoraliser ou démotiver le peuple en diffusant une avalanche d’images des manifestations des années précédentes, mais un ciel gris a contrarié ses plans. Cette semaine, le calvaire des mollahs a continué en pire car au moment de l’Aïd Fetr, des pluies torrentielles se sont abattues sur Téhéran, le transformant en piscine géante, les privant de l’usage des lieux publics et de la diffusion des dizaines de photos de rassemblements religieux ensoleillés qu’ils ont en stock. Pas de panique, d’un commun accord, les mollahs ont décrété que leurs experts n’avaient pas vu la nouvelle lune, il fallait donc l’attendre (ou plutôt qu’un ciel plus estival et des rues plus sèches pour pouvoir diffuser des images d’archives). Le régime a avoué qu’il n’attendait rien du peuple ou de ses derniers serviteurs. Commença alors une longue attente : les mollahs avaient un œil rivé sur le ciel trop gris, un autre œil sur les rues trop inondées, un troisième œil sur la base paniquée, un quatrième sur le marché de l’or… La semaine a été placée sous le signe de l’inquiétude et de l’attentisme, un mélange de peur et de prudence qui a forcé les mollahs à limiter les sorties. Voici les images d’une semaine orageuse d’avaries tout aussi bien météorologiques que politiques... Un vrai régal ! Rappel des derniers événements survenus en Iran | Les ennuis politico-météorologiques du régime ont débuté vendredi dernier avec le ciel gris de la Journée de Qods. Le régime a alors perdu une occasion en or pour diffuser des images d’archives faisant état de grandes réserves de soutien populaire. Nous dirons qu’il n’a pu diffuser sa propagande protectrice censée contenir le peuple, mais aussi les religieux non politisés, les Bazaris et la majorité des Pasdaran qui ont rejoint la contestation depuis 2009. Le régime s’est retrouvé en parallèle avec une petite manifestation qui a aussi révélé un fort absentéisme à la Prière de Vendredi, confirmant la baisse de l’indice de confiance du régime parmi ses directeurs. Panique à bord | Les associés affairistes du régime, qui sont issus de la caste dirigeante et ne peuvent pas prospérer sans ce régime, ont paniqué à l’idée qu’il ne puisse même pas simuler la puissance en diffusant sa propagande. Samedi matin, ils étaient des milliers à faire la queue devant les banques afin de transformer leurs fortunes menacées en devises ou en dollar pour préparer leur fuite. Pris au piège et à la recherche de solutions | Pour cesser cette agitation susceptible de précipiter sa chute, le régime devait rassurer ces gens en se montrant plus puissant que les ennemis de l’intérieur ou encore plus puissant que l’ennemi extérieur, c’est-à-dire Washington, qui par ses sanctions visant à affaiblir le régime pour le forcer à transférer les pouvoirs à ses pions contribue au mécontentement et encourage une révolution anti-islamique (qu’il ne souhaite pas lui-même). Puisque sur le plan intérieur, la caste dirigeante doit combattre des millions de gens, il ne pouvait qu’envisager l’offensive anti-américaine qui ne nécessite aucune troupe, mais des provocations pour mener à une escalade afin de contraindre l’ennemi suprême à capituler pour éviter une guerre susceptible de nuire à son approvisionnement pétrolier. Mais au cours des jours précédents, le régime avait déjà tenté de provoquer une telle escalade à deux reprises en évoquant d’abord des progrès nucléaires, puis la mise en œuvre d’un missile capable de fermer le détroit pétrolier d’Ormuz. Washington avait esquivé pour garder ses sanctions. Les échecs du régime avaient semé la panique parmi ses collaborateurs et provoqué un tsunami d’achat de pièces d’or. Le régime ne pouvait pas se permettre un autre échec. C’est pourquoi, il a renoncé à sa solution refuge qu’est la politique d’amplification de la crise et d’escalades : pour rassurer ses collaborateurs paniqués, il a misé sur l’apaisement en annonçant qu’il avait la capacité de satisfaire la demande d’or et en espérant le déploiement d’une nouvelle propagande protectrice quelques jours plus tard avec la diffusion d’un tsunami d’images d’archives de prières islamiques à chaque coin de rue à l’occasion de l’Aïd Fetr. Mais la base était trop agitée pour attendre. La demande d’or n’est pas tombée. Le régime a prononcé une condamnation à mort contre un ex-milicien des Pasdaran pour avoir tué un savant atomiste pour le compte d’Israël, insinuant une purge interne au sein des Pasdaran qui lui échappent et annonçant sa disponibilité pour aller titiller Israël afin de provoquer une escalade. Mais il n’a nullement mis ses menaces à exécution. A posteriori, on peut tabler sur un geste censé montrer sa disponibilité à combattre selon cette méthode classique de sa politique extérieure afin de rassurer les siens en attendant le déploiement de sa nouvelle propagande rassurante et protectrice. Pour les convaincre davantage, le régime a même parlé de mesures sécuritaires mises en place pour permettre une prière géante couvrant Téhéran tout entier et même sur les quais de son métro. Mais samedi soir, en début de la nouvelle semaine et à trois jours de l’avènement de sa nouvelle propagande protectrice, le ciel qui s’était dégagé après la Journée de Qods s’est à nouveau assombri. Il a plu toute la nuit. Téhéran est devenu une piscine géante ! Les prières publiques étant organisées lorsque les conditions météorologiques sont normales, le régime ne disposait pas d’images pour mener à bien son programme de propagande. © WWW.IRAN-RESIST.ORG
Le régime allait assister à une nouvelle panique. Il a craint le pire, un soulèvement, du moins des agitations, vraisemblablement des grèves. Il a changé ses plans : il a annoncé « l’amnistie d’une centaine de personnalités arrêtées après la contestation des résultats des élections », permettant à ses faux opposants internes qui ne sont jamais réellement internés de sortir de leur retraite pour revenir sur le devant de la scène afin de se mêler à la contestation et d’essayer de prendre le contrôle des slogans et demander des réformes et non un changement de régime. Ce même dimanche de pluies (à Téhéran), des journalistes du régime ont dénoncé une nouvelle baisse du niveau du lac salé de Rezayieh et le risque de sa disparition (alors que le site est à sec depuis plus d’un an).
Cet enfonçage (par étapes) d’une porte bien ouverte n’a pas alarmé les opposants en exil, friands de patriotisme anti-mollahs. Ils ont apporté leur soutien aux manifestants alors qu’en regardant la vidéo en question postée par un diffuseur de rumeurs, on entend une foule imposante s’exprimer, mais on le la voit jamais. C’est là une vidéo conforme au style du Mouvement Vert : beaucoup de bruits pour masquer l’absence de foule et de revendications anti-régime. Dans ce cas, il n’y a pas non plus de jeunes qui attaquent les agents du régime ou encore des slogans hostiles au régime.
En 2009 et 2010, le régime a tenté plusieurs opérations de ce genre et d’apparence patriotique (et non-islamique) pour rassurer les Iraniens et les attirer sous sa bannière. Ces opérations étaient menées par Karroubi qui est aussi sorti de son silence cette semaine. Lundi à la veille de l’Aïd Fetr, le ciel s’est montré encore moins clément avec le régime en lui envoyant de nouvelles averses qui ont cette fois transformé les rues, mais aussi le métro en piscine !
Le peuple est passé à côté de ce retrait car il n’est plus musulman et il se fiche des dirigeants, mais les derniers collaborateurs du régime y ont vu des signes inquiétants. Par le passé, cet état a provoqué des paniques qui ont ébranlé le système économique du régime. Ce dernier devait se montrer prudent, mais aussi attentif au malaise de ses derniers collaborateurs. Il a tenté de les rassurer en tentant encore de réanimer le Mouvement Vert en agitant encore l’affaire du lac salé de Rezayieh par des rumeurs de manifestations (sans diffuser de nouvelles images). Ils ont également envoyé un des porte-parole de la fausse opposition, le cinéaste Rassoulof, à Paris pour relancer ce machin insipide. Lundi dans la soirée, d’autres pluies ont provoqué une grande inondation à Kermân dans le centre faisant de nombreux morts et ravivant la douleur de l’avortement de la propagande programmée. D’habitude, le régime ne communique pas sur les catastrophes naturelles pour ne pas envoyer de secours car ils coûtent cher et ne rapporte rien. Les sinistrés ne savent que faire. Cette fois, le régime, comme à son habitude, n’a pas parlé du sinistre et de ses victimes, mais en revanche, il a beaucoup parlé de l’envoi rapide de plusieurs groupes de secours évitant de donner des prétextes à des manifestations hostiles à un moment où il est faible et qu’il encourage lui-même certaines manifestations pour relancer sa fausse opposition interne, le Mouvement Vert.
Mais l’expérience négative de la Journée de Qods avec un ciel gris de dernière minute et son propre manque de plan B, qui avait paniqué ses collaborateurs, l’a incité à prévoir une sortie d’urgence. Il a organisé un soudain et inédit festival de film qui a couronné Jaafar Panahi, le cinéaste soi-disant assigné à résidence et coupé du monde, le chouchou des bobos français et l’ami et collaborateur de Rassoulof, afin de préparer le terrain pour l’annonce de sa libération et son départ vers Paris pour donner un coup de main à Rassoulof qui ne décolle pas malgré les efforts des médias français qui ont jadis lancé d’autres mercenaires de ce genre.
Pour Qom, le siège du clergé iranien, le régime n’a pu diffuser aucune image de rassemblements de prieurs dans la ville ! Tout le monde avait boycotté le rituel immuable de prier dans les rues ! Le régime a sauvé son honneur en diffusant une photo d’un rassemblement dans une mosquée, photo qui peut avoir été prise n’importe quand.
A Tabriz, une des villes les plus pieuses du pays au temps du Chah, on a massivement boycotté le rituel de prier dans les rues : le régime n’a également pas pu produire une photo de ce genre et a diffusé un rassemblement dans une mosquée.
Enfin, ce même reportage dont voici une autre photo avait été publiée en 2010 à l’occasion de l’Aïd Fetr. Nous en parlions dans la semaine en images n°134 !
Les images du boycott dans les autres villes font état de la possibilité d’un tournant global ! C’est énorme ! Merci à la tricherie des mollahs et leurs médias mercenaires ! Le point n’a pas échappé aux ambassadeurs en Iran notamment ceux des pays musulmans qui ont sans doute voulu aller prier à un coin de rue pour exprimer cette foi que les iraniens ont perdue. Afin que ces observateurs avisés n’aillent pas rapporter les faits qui ridiculiseront le régime et le priveront de son rôle de leader du monde musulman, la caste dirigeante les a réunis chez le Guide pour essayer de rattraper le coup avec un sermon sur la religiosité des Iraniens, mais on n’a eu droit à aucune photo des visages des auditeurs. Le régime tout entier a sombré dans le silence comme pendant l’orage qui avait contrarié ses projets de propagande rassurante.
Vendredi, le régime a tenté de redresser sa cote en montrant la participation des militaires à la Prière hebdomadaire de Vendredi (une autre nouvelle propagande rassurante).
Le régime, qui manquait de partisans, a été privé de la moitié de sa gamme de provocations ! Il a compris qu’il devait mettre les bouchées doubles sur ses provocations balistiques sans se soucier des états d’âmes de ses derniers partisans. Son ministre de la défense a annoncé l’entrée en service de nouveaux missiles sol-mer très destructeurs sans même montrer l’image de la chose. Après la propagande rassurante, le voici embarqué dans une improvisation désordonnée qui est tout sauf rassurante surtout pour lui-même et ses derniers collaborateurs. Vivement qu’il continue à improviser et à tricher (avec des faux opposants qui ne proposent rien), entraînant le pays dans une nouvelle guerre ou de nouvelles sanctions, nous parions que sa salle de Prière du Vendredi se videra en à peine trois mois comme la place royale d’Ispahan !
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