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Iran : L’histoire des 2 Bernard
19.09.2007

Les propos de Bernard Kouchner ont fait des vagues, notamment en Russie, pays pour lequel l’alliance avec les mollahs est d’ordre vital dans sa stratégie de reconquête de l’Asie Centrale et des autres ex-alliés arabes de l’URSS. Kouchner a reculé comme il l’avait fait en d’autres occasions. Pourtant des amis du gouvernement ont volé à son secours et des journalistes ou analystes soucieux d’être bien vue par le Quai d’Orsay se sont empressés pour expliquer l’extrême sagesse des propos du ministre au mieux de leur connaissance des bruits de couloir du Quai d’Orsay.



Les commentaires des uns et des autres sonnent faux après la rétraction de Kouchner, mais sont révélateurs d’un certain état d’esprit, nous en avons choisi 3 : Pierre Rousselin, le prudent, Alain Barluet, le factuel institutionnel et Bernard Guetta, le théoricien.

Au Figaro, Pierre Rousselin a expliqué que l’objectif (du ministre) n’était pas de pousser à la confrontation mais de mobiliser les opinions pour leur faire prendre conscience de la gravité de la situation. Pour Rousselin, l’hypothèse soulevée par Kouchner est impossible à ignorer. « Elle existe bel et bien. Plutôt que de nier la réalité, mieux vaut se préparer à cette éventualité. Pour mieux l’éviter ».

Toujours au Figaro, Alain Barluet a cru savoir pourquoi Paris avait décidé de hausser le ton ! « Même si Bernard Kouchner est coutumier des formules à l’emporte-pièce, sa petite phrase sur une « guerre » possible avec l’Iran, dimanche, n’a sans doute pas été prononcée par hasard ». La suite de son article n’est qu’un exposé des faits avec des bémols.

Le cas Bernard Guetta. Sur France Inter, nous avons eu droit à la chronique de Bernard Guetta, le théoricien, pour qui il n’y a pas dans les propos de Kouchner matière à scandale. Pour nous il y a en revanche matière à scandale dans les commentaires de Guetta.

Selon ce journaliste proche du Quai d’Orsay, Kouchner a voulu mettre en garde les plus radicaux des dirigeants de Téhéran pour qu’ils ne s’enfoncent dans une erreur d’analyse tragique en considérant que les Etats-Unis sont trop embourbés en Irak pour recourir à la force et que l’Europe les en empêcherait en tout état de cause.

« C’est ce malentendu, et non pas sa levée, qui pourrait mener à la guerre, c’est-à-dire bien évidemment à une catastrophe car, outre qu’ils feraient d’innombrables victimes civiles, des bombardements de l’Iran susciteraient de sévères ripostes iraniennes en Irak, au Liban et en Israël et éloigneraient pour longtemps, surtout, toute perspective de compromis dans les différents conflits de la région ».

Non seulement, nous avons un ministre qui assène des conseils lapidaires à ses collègues barbus ou enturbannés mais nous avons également un commentateur politique, qui d’abord reconnaît la capacité de nuisance terroriste des mollahs pour ensuite laisser entendre que c’est le rôle de la France de reconnaître ce rôle d’instigateur et d’arbitre du chaos au Moyen-Orient.

« Au-delà des déclarations incendiaires de son Président, l’Iran n’aspire, dans cette partie, qu’à une chose. Il veut être reconnu, et avant tout par les Etats-Unis, pour ce qu’il est déjà : la première puissance du Proche-Orient. L’Iran chiite, l’ancienne Perse, veut renverser le rapport de force régional avec ses vrais ennemis, les pays arabes et sunnites ».

Le petit Guetta dit tout haut ce que d’autres pensent tout bas au Quai d’Orsay. Pour plaire à ses amis du Quai d’Orsay qui rêvent d’imiter la stratégie américaine de se lier aux chiites aux dépens des sunnites, Guetta pousse le bouchon un peu loin et écrit même que l’Iran n’a pas de pires adversaires que l’islamisme sunnite et Al Qaeda. Et il ajoute :

« Le problème n’est pas que Bernard Kouchner ait été clair sur la question nucléaire. Il est qu’il n’ait pas proposé à l’Europe de se faire l’avocat collectif, auprès d’une Amérique désemparée et affaiblie, de la seule solution envisageable à cette crise : le grand compromis, donnant-donnant, avec l’Iran ».

Il est pas mal ce petit Guetta, il propose de délivrer tout le Moyen-Orient à ces mollahs qui ont selon lui-même la capacité de riposter sévèrement en Irak, au Liban et en Israël. Ce sera du donnant-donnant selon ce brillant esprit. Le donnant-donnant risque de tourner court.

Les mollahs ne sont pas des Perses, par ailleurs, leur « idéologie » n’est pas chiite mais islamiste révolutionnaire, et c’est depuis leur accession au pouvoir qu’ils financent des groupes armés de toute nature, d’extrême gauche ou d’extrême droite en Europe, et le plus souvent « ni sunnites ni chiites » mais islamistes dans divers pays musulmans.

En faisant du régime des mollahs la première puissance du Proche-Orient, les républiques islamiques alliées des mollahs remplaceront rapidement les Etats sunnites non révolutionnaires. Fin prématurée du « donnant-donnant » qui est un vieux projet du Quai d’Orsay à maintes reprises évoqué par différents ministres français des affaires étrangères souhaitant reconnaître le « rôle régional de l’Iran ».

A ce moment dans l’histoire, le chantage terroriste, économique, nucléaire, et religieux des mollahs et leurs alliés prendra des proportions inattendues.

La chronique démente de Guetta lui ouvre les portes de notre club des Bonnets d’âne. On y est en bonne compagnie. Il n’a pas le niveau, mais il amusera les autres.

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