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A propos des livraisons d’armes russes à l’Iran
27.11.2006

Selon la RIA Novosti, les informations sur le début des exportations de missiles sol-air Tor M-1 [1] en Iran seraient fausses, a annoncé samedi Nikolaï Demidiouk, chef d’une délégation de l’agence russe d’exportation d’armes Rosoboronexport au Salon Indodefence-2006 de Jakarta.



« Je peux affirmer avec cent pour cent de certitude que cela n’était pas vrai au moment de notre départ de Moscou. Pour autant que je sache, les livraisons n’ont toujours pas commencé », a noté ce responsable. Or cette information avait été donnée par une autre agence de presse russe, l’Interfax.

La nouvelle de la livraison de ces missiles défensifs a été annoncée alors que les Etats-Unis ont levé des sanctions qui frappaient l’avionneur Sukhoï et l’empêchaient de concrétiser un important contrat de coopération avec Boeing. L’annonce de la livraison peut effectivement être préjudiciable à cette levée des sanctions et ce d’autant plus que d’autres sanctions à l’encontre des industries militaires russes sont encore en vigueur et touchent notamment la Rosoboronexport, l’agence russe d’exportation d’armes, mise en cause par la dépêche de l’Interfax.

En avril 2006, la Rosoboronexport avait d’ailleurs affirmé à la Ria Novosti que les premières livraisons étaient programmées pour l’automne 2006 afin que le personnel auquel les armes seraient confiées soit pleinement formé [2]. Il est fort probable que les Russes aient donc commencé les livraisons et essaient de se tirer d’une impasse en organisant une fuite d’informations car selon les Russes, un renoncement à ce contrat (de 900 millions de dollars), pour toutes sortes de raisons, aurait entaché la réputation de la Russie en tant qu’exportateur d’armes. En 2006, la Russie a été le premier fournisseur d’armes au monde et compte se maintenir à cette première place.

La Russie a de nombreux contrats d’armements avec l’Iran et doit lui témoigner sa fidélité sans quoi le régime des mollahs s’adressera ailleurs. Il est donc primordial pour les Russes de fidéliser le marché iranien et de livrer ce pays en équipements militaires ou civils russes.

Il existe une similitude avec le marché nucléaire. Les Russes, qui sont en train de finir la centrale de Bushehr, font traîner les dernières finitions, rendant ainsi impossible l’exploitation de la centrale. Ils refusent par ailleurs de livrer le combustible spécifique qui doit faire fonctionner ces centrifugeuses. Pareillement pour les systèmes anti-missiles TOR-M1, les Russes ont des moyens de pressions sur leurs clients iraniens tout en continuant d’honorer leurs engagements.

En continuant à faire ainsi, les Russes gardent un pied en Iran. Ils continueront d’avoir accès à des informations qui leur seront utiles s’ils jugent utile de changer de camp.

En tant que fournisseurs d’équipement militaires à l’Iran, les Russes sont les seuls à connaître le niveau de compétence des Pasdarans et les emplacements de leurs systèmes de missiles.

Il faut savoir que les missiles ont un code qui permet de les détecter. Pendant la guerre des Malouines, Thatcher avait demandé à Mitterrand de lui remettre les codes des missiles exocet que la France avait vendus aux Argentins. Mitterrand avait remis les informations aux Anglais qui ont pu facilement neutraliser les attaques des Argentins [3].

Aujourd’hui les Russes se trouvent dans la même position. Ils contrôlent les marchés des armes et du nucléaire, et ayant accès à des informations vitales sur les capacités militaires de l’Iran, ils peuvent facilement se repositionner vis-à-vis des Etats-Unis.

Contrairement à l’Irak où ils s’opposaient à une intervention armée, là ils peuvent être partie prenante et ensuite devenir partenaire pour la reconstruction de l’Iran : c’est-à-dire qu’ils ont les moyens de bombarder les infrastructures industrielles, militaires ou nucléaires iraniennes et de revendre les mêmes équipements à nouveau à l’Iran. (analyse publiée le 16.02.2006)

[1TOR-M1 est un Missile Surface-Air à moyenne portée qui a été conçu pour engager des avions et autres hélicoptères mais aussi des missiles de croisières. Ce système d’arme est apte à mettre en oeuvres des charges coventionnelles et NBC. Le bataillon de défense antiaérien sur Tor-M1 compte quatre batteries à quatre lanceurs chacune.

Le véhicule de lancement dispose de huit missiles 9M331 pouvant être lancé verticalement, d’un radar de surveillance 3D, d’un radar d’acquisition et d’un système TV. Une fois qu’un aéronef est repéré par le radar d’acquisition à une protée de 27 kilomètres, il est identifié est surveillé. S’il se révèle hostile, il est pris en charge par le radar de guidage à partir de 12 kilomètres pour une altitude allant jusqu’à 6000 mètres.

Si nécessaire, l'ordre de tir est donné. Contrairement aux autres systèmes AA, le Tor-M1 tire immédiatement deux missiles. Si l'avion est capable d'éviter le premier, il a très peu de chances d'éviter l'impact du second. Le missile fonce sur sa cible à une vitesse de 850 mètres par seconde et l'ensemble de la batterie peut déclencher un tir de 16 missiles en même temps. Pour éliminer une batterie, il faudrait que l'ennemie lance un "stryke" de 20 avions avec le risque d'en perdre un quart, sans compter sur les systèmes AA ZSU 23-4 ou Oerlikon de 35 mm qui traîneraient dans le coin pour protéger les lanceurs Tor-M1.

Chaque lanceur dispose de son propre radar d’acquisition capable de surveiller 10 cibles. Le lanceur peut tirer deux missiles sur le même aéronef ou tirer sur deux cibles et toutes les opérations se font avec une commande digitale. La probabilité de toucher la cible est de 60 à 90% pour un missile de croisière, 80 à 90 pour un hélicoptère et de 60 à 95% pour un avion de combat.

Une fois le tir commandé, le missile et son tube de rangement s'éjectent verticalement grâce à un système hydraulique, la mise à feu se fait immédiatement et le missile se désolidarise du tube. Ce système permet d'orienter le missile dans n'importe quelle direction.

La Chine possède 35 systèmes dont les premiers furent livrés en 1998. L'Iran a commandés 29 systèmes, le 04 décembre 2005. | Images de TOR-M1 |

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Fondation de Recherches Stratégique : L’Iran face à une attaque préventive

[2Avis d’un expert américain sur « le personnel » auquel les TOR-M1 seront confiées | S’exprimant au sujet des fusées anti missiles russes vendues à l’Iran, ce spécialiste américain a notemment dit que si la technologie de ce matériel était nouvelle et performante, ni les forces islamiques ni l’Etat Major à Téhéran n’avaient la connaissance et les capacités de s’en servir convenablement. -Source : UN MOUSTIQUE (DANS UNE TEMPÊTE) ! | 29.12.2005

[3Selon Ali Magoudi, François Mitterrand, lors de la guerre des Malouines en 1982, aurait livré à Margaret Thatcher les codes permettant de désactiver les missiles français livrés par Paris à l’Argentine. Il aurait pris cette décision après que après que quatre Exocet français, utilisés par la marine argentine, aient endommagé le Sheffield, fleuron de la Royal Navy. Furieuse de ce « Trafalgar », la Dame de Fer aurait menacé de déclencher une attaque nucléaire contre Buenos Aires si la France ne lui donnait pas le moyen de neutraliser lesdits missiles. François Mitterrand aurait accédé au désir du Premier ministre britannique dont il disait qu’elle avait « l’œil de Caligula et la bouche de Marilyn Monroe ».

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