Quoi qu’il en soit, à la veille des célébrations de la journée de Qods, le milicien Ahmadinejad était particulièrement remonté contre Israël et il avait accusé ce pays d’être la source de tous les problèmes de l’humanité. La journée de Qods aggrava son cas.

En effet, le régime des mollahs aime afficher des kermesses de foules en délire qui défilent par millions ou par centaines de milliers en scandant des slogans hostiles aux Américains et à Israël. Depuis quelques années, la foule se fait rare et le régime doit recourir à des images d’archives voir à des ruses de sioux pour gonfler ses effectifs de marcheurs-crieurs. Habituellement, les fonctionnaires sont contraints de participer sous peine de licenciement. Les étudiants aussi sont enrôlés sous peine d’être interdit à vie d’inscription universitaire. Les familles des miliciens sont d’office réquisitionnées et déplacées par autobus vers les lieux des manifestations. Les ministres, parlementaires, mollahs sont aussi présents et se déplacent avec femmes (les quatre) et enfants. Or, hier à Téhéran, la foule était absente. Selon Malbrunot, on ne décomptait guère que « quelques milliers convergeant depuis 7 mosquées ».

Explications | Bien heureusement c’est Malbrunot et non Delphine Minoui qui a écrit cet article. Le journaliste du Figaro a pudiquement évoqué la présence de moins de 10000 manifestants et le journal a eu l’heureuse idée de diffuser online les images vidéo faites sur place qui montrent à peine 2 ou 3000 participants de sexe mâle.

Un des avantages de ce régime est le look révolutionnaire « mal rasés et mal habillés » de ses ministres, parlementaires et autres hauts fonctionnaires, un œil inaverti les confondrait avec le peuple démuni. Téhéran compte 15 millions d’habitants et le régime n’a pu réunir sur place que la crème des mal rasés, présents parce qu’ils ne pouvaient pas se défiler. D’ailleurs les sites gouvernementaux de photos de presse n’ont rien publié le jour de l’événement et les premières photos ont apparu le lendemain, sorties d’on ne sait quelles archives ! Des photos faites parfois sous un beau soleil alors que la météo faisait état d’un temps nuageux comme on peut le voir sur la vidéo du site du Figaro. Nous vous avons enregistré le bulletin complet de cette journée sur Yahoo météo (ci-joint), l’on y voit également que le temps n’était pas radieux contrairement aux rares photos diffusées.

Décodages | De plus en plus de supporters du régime ne croient plus à la viabilité du régime et ne se déplacent plus pour ces messes sociales malgré les menaces de licenciement ou les compensations pécuniaires qui ont fait le succès de ces manifestations depuis 1979. Ces fonctionnaires et leurs familles craignent les lendemains de la chute prévisible ou du moins pressentie du régime et ne veulent être comptabilisés comme ses partisans, pour ne pas risquer un lynchage suite à un changement de régime.

Très irrité par le télescopage des mauvaises nouvelles et ce désaveu social sans précédent, Ahmadinejad a doublé la mise et ajouté l’Europe à sa liste d’avertissements. Cette fois, il a lancé une mise en garde à l’ensemble du monde occidental.

« Ceci est un ultimatum pour vous tous, prenez-le au sérieux, et demain ne venez pas vous plaindre qu’on ne vous aura pas prévenus… » Pourtant, hier c’est la foule des absents qui avait lancé une mise en garde au régime des mollahs. Un avertissement qui disait : « Nous ne voulons pas nous afficher avec vous ».

Pour de nombreux iraniens, l’escalade verbale des artisans du régime (Ahmadinejad, Rafsandjani à la Prière de Vendredi, l’ambassadeur Ahani à Paris) est l’expression d’une recherche délibérée pour provoquer un réflexe de légitime défense chez Israël ou chez les USA dont la marine sera bientôt dans le Golfe Persique pour des manœuvres militaires. C’est en effet, l’interprétation la plus évoquée en Iran et nous l’avons déjà signalée dans une récente analyse d’un article publié en Iran.

La menace d’une attaque serait officiellement une sorte de bénédiction pour le régime des mollahs, un moyen de fédérer autour d’eux toutes sortes de nationalistes, des pro et anti-mollahs. Cependant, comme nous l’avons précisé, il s’agit d’une lame à deux tranchants. Les rumeurs d’attaque sont nombreuses et de nombreux iraniens l’estiment inévitable, voire le seul moyen de venir à bout de ce régime sécuritaire et tentaculaire.

« La foule des absents » prend un sens nouveau dans ce contexte : Et si mêmes les partisans du régime souhaitaient une telle attaque ? Beaucoup se justifient par le fait que l’attaque pourrait être brève et libératrice des colères retenues. Beaucoup se justifient en disant qu’elle ferait le minimum de victimes civiles mais surtout qu’elle détruirait les infrastructures militaires et répressives du régime des mollahs. Ce sentiment est palpable, ces jours-ci à Téhéran, où l’on parle plus de ce genre de scénarios que des diatribes d’Ahmadinejad devant les 4000 derniers partisans du régime.

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