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Iran : Le Monde relu et expliqué
30.09.2006

L’envoyée spéciale du Monde à Téhéran est allée recueillir les propos de Khatami. Hélas, nous connaissons Marie-Claude Decamps et sa spécialité : déguiser les louanges en critiques ou en questions pertinentes.



Elle aura un jour notre Pulitzer maison, c’est-à-dire le Bonnet d’âne, mais à présent nous nous penchons sur les propos de Khatami car l’envoyée spéciale du Monde a oublié de préciser de placer ces propos dans leurs contextes ou d’expliquer les références de Khatami notamment sa fidélité à la ligne politique de Khomeiny. Cette ligne n’est autre que celle d’Ahmadinejad en pire.

Très subtilement, dès la première question, Marie-Claude Decamps place Khatami sur un plan purement philosophique et le questionne comme une référence spirituelle du régime ce qui permet à ce dernier de se mettre immédiatement à l’aise pour s’exprimer. Il évoque son voyage aux Etats-Unis et ses rencontres avec les universitaires américains et elle oublie de mentionner les protestations soulevées par cette visite et les conférences chahutées par des questions pertinentes des étudiants en théologie qui ont demandé l’avis de Khatami sur les traitements infligés aux homosexuels en Iran. Khatami avait condamné la « sodomie » et justifié la punition qui consiste à jeter le condamné du haut d’une tour ou d’une falaise. Pire encore, Marie-Claude Decamps semble ignorer les péripéties de ce voyage et l’assignation à comparaître qui avait été remise à Khatami pour son rôle dans la persécution de juifs iraniens.

La réponse de Khatami à la première question de Décamps est du genre convenu (je suis pour la paix et le dialogue) et donne le ton de l’entretien : allégeance polie de la journaliste et approximations sur les définitions, approximations qui atteindront des pics concernant Israël, la tolérance, la liberté de l’expression et bien sûr le nucléaire.

Question n°2 de Marie-Claude Decamps | Le fossé s’est aggravé entre l’Occident et le monde musulman ?

Khatami débite ses formules sur la guerre des religions entre les Ottomans et les Chrétiens pour finir sur l’exemple du 11 septembre qui est selon lui l’œuvre des terroristes qui utilisent l’Islam. Evidemment, Marie-Claude Decamps ne lui rafraîchit pas la mémoire sur les attentats des groupes islamistes liés à Téhéran ou plus modestement sur les attentats qui ont ensanglanté Paris en 1986 et qui ont tué 58 de ses compatriotes au Liban. La journaliste laisse à son interlocuteur le loisir de débiter des approximations et des mensonges et tromper les lecteurs du quotidien français.

Question n°3 de Marie-Claude Decamps | Que dire des propos du pape sur l’agressivité de l’islam ?

Khatami | Ses déclarations n’étaient pas fondées, il les a regrettées. On ne s’attendait pas à cela de la part d’une personnalité aussi influente. Il y a déjà trop d’incompréhensions, le rôle des dirigeants est de les réduire, non de les amplifier.

Marie-Claude Decamps semble être d’accord puisqu’elle ne mentionne pas la liberté de critiquer. Elle ne fait aucun commentaire et dès lors, on s’aperçoit que l’entretien est une tribune offerte à ce mollah et rien d’autre.

Question n°4 de Marie-Claude Decamps | L’Iran ne devrait-il pas tenter de rétablir la confiance sur le nucléaire ? Un dialogue Téhéran-Washington est-il possible ?

Khatami | C’est l’Occident et surtout les Etats-Unis qui devraient œuvrer à restaurer la confiance. La politique américaine de deux poids deux mesures et de pressions continues au Proche-Orient, leur oubli total des Palestiniens…

Et ainsi de suite...

Marie-Claude Decamps et Khatami semblent avoir eux-mêmes oublié le voyage de ce dernier aux Etats-Unis qui avait pour objectif de rétablir un contact entre les deux états... Si le responsable de l’échec des négociations est l’Amérique, on ne comprend pas les raisons qui ont poussé Khatami à se montrer si amical à l’égard des Etats-Unis lors de son passage sur CNN !

Mais, la question de Marie-Claude portait sur un rétablissement de la confiance sur le nucléaire et Khatami parle de la Palestine ! Sur un plan purement journalistique, Marie-Claude oublie de rappeler à son très démocrate interlocuteur qu’il est hors sujet. Et pourtant les réponses de Khatami suggèrent qu’il avait une mission politique aux Etats-Unis, mais Descamps, décampe vite et évite d’aborder le sujet.

Khatami | Un dialogue direct avec les Etats-Unis ? Il n’est jamais trop tard, mais il y a des difficultés persistantes. A l’époque de M. Clinton, j’étais moi-même Président en Iran, nous avions accompli des « petits pas » pour nous rapprocher, mais son successeur a préféré aggraver le malentendu.

Marie-Claude Decamps est symboliquement l’interviewer car Khatami parle sans être contredit : les questions se suivent sans lien et à chaque fois, le mollah expose les points de vue qui sont les siens mais également, aux guillemets prés, ceux de Ahmadinejad. Mais l’envoyée spéciale du Monde ne souffle mot et ne fait aucun commentaire.

Khatami continue | Pourtant, sur le nucléaire, on pourrait s’asseoir à une même table, s’il n’y avait pas l’entêtement américain. De même, toute condition préalable rend difficile les négociations.

En réalité, au fur et à mesure du déroulement de l’entretien, Khatami égraine ses approximations et installe un lexique sans que la journaliste ne s’expose ou ne proteste sur ces approximations : ainsi le Monde devient un outil de propagande d’un régime qui utilise d’une manière surréaliste ses propres définitions pour aboutir à des constats dénués de sens.

Les négociations dont parle Khatami sont à l’image de cette interview : l’exposé des points de vue de la république islamique d’Iran, un exposé qui ne tolère aucune condition ou aucun compromis du côté de l’exposant. Et c’est là, le point de controverse de cet entretien : par des approximations successives, autorisées par la journaliste attitrée du Monde, Khatami parviendra en réponse à la 5e question de parler de la nécessité d’un compromis. Or, ce compromis dont parle Khatami est le contraire d’un compromis, car il est en fait l’acceptation par la communauté internationale de toutes les transgressions du régime des mollahs. Le compromis de Khatami est la capitulation de l’ONU et l’octroi aux mollahs d’un droit supplémentaire au sein du TNP.

Nous ne pouvons que condamner avec vigueur les fautes professionnelles de Marie-Claude Decamps qui au cours de ces dernières années est devenue une employée de la propagande de Khatami et du régime des mollahs tout en continuant d’être payée par le Monde.

Question n°5 de Marie-Claude Decamps | L’actuel gouvernement iranien a opté jusqu’ici pour la confrontation. Vous aviez été critiqué pour avoir décidé un gel de l’enrichissement d’uranium ?

Khatami | A cette époque, nous étions convaincus qu’une suspension volontaire faciliterait les inspections nécessaires de l’AIEA et aboutirait à un bon résultat pour l’Iran et l’Occident. Malheureusement les Européens, sous la pression américaine, ont retardé la solution du problème jour après jour.

Une réaction de Décamps ? non.

Khatami | En Iran, nous avions l’impression qu’on voulait nous priver, à l’usure, de notre droit légitime à la technologie nucléaire.

Le jour même de cet entretien Ahmadinejad a dit exactement les mêmes choses dans son discours.

Khatami | Tout cela a changé, mais je pense qu’il n’y a pas d’autre voie que celle de la négociation et du compromis.

Un commentaire de Décamps ? non. En fait comme nous l’avons précisé, il s’agit d’une tribune à Khatami et les réponses sont l’exposé des points de vues du régime. L’entretien est une mise en scène et probablement, une opération médiatique qui se veut la preuve de la souplesse des mollahs. Mais cette opération de marketing tourne court car le fond de pensée du plus démocrate des mollahs est calqué sur la rigidité mentale de Khomeiny. Malheureusement, les lecteurs du Monde ne sont pas prévenus et prennent ces propos pour une information critique.

Vous en voulez encore ?

Question n°6 de Marie-Claude Decamps | L’Iran a des visées nucléaires et prône « l’effacement d’Israël de la carte ». Comprenez-vous que cela inquiète ?

Khatami | Les grandes lignes de notre politique vis-à-vis du Proche-Orient et d’Israël sont claires depuis l’imam Khomeyni, j’y souscris moi-même.

Marie-Claude Decamps omet de préciser la ligne politique de Khomeiny. Nous le faisons à sa place : un appel permanent à la destruction d’Israël, qualifié de tumeur cancéreuse qui souille les terres d’Islam ! Nous publierons bientôt un florilège de ses paroles hautement spirituelles !

Question n°7 de Marie-Claude Decamps | Les guerres en Irak et au Liban ont renforcé la position de l’Iran. Va-t-il aider à stabiliser la région, en poussant, par exemple, le Hezbollah à désarmer ?

Khatami | … Nous ne sommes pas prêts (…) à subir l’animosité des autres. Si cette animosité diminue et que le rôle de l’Iran est bien perçu et admis, (…) nous coopérerons ensemble et (…) la région arrivera plus rapidement à la stabilité…

Marie-Claude Decamps laisse parler Khatami qui annonce sa condition qui rime comme une mise en garde : reconnaître la puissance de l’Iran au Liban. Et puis elle a le toupet de finir sa pseudo-interview en affublant cet adepte de Khomeiny… de réformateur ! Ainsi le partisan du Hezbollah, des fatwas de Khomeiny, le responsable des purges universitaires et du nucléaire inconditionnel, resterait un réformateur pour Marie-Claude.

Cet homme a ruiné l’Iran en généralisant le contrat Buy-Back sur le pétrole, mais selon l’envoyée spéciale du Monde, il aurait donné de l’espoir aux iraniens. Et Khatami saisit l’occasion pour dire que la révolution islamique a lié le désir d’indépendance et de démocratie avec l’identité historique et religieuse iranienne. Amen.

Et le supplice des femmes iraniennes ? et les lapidations ? et le viol des femmes en prison ? Le passé de Khatami ? Son rôle pour la création des commandos de tueurs des opposants en exil ? Son rôle dans l’élimination des opposants internes ? Son rôle pour gagner du temps sur le nucléaire ?

Marie-Claude Decamps comme Delphine Minoui fait partie des pasionarias de Khatami. Celles qui continuent de participer à la fabrication du mythe Khatami et à la comédie des réformes alors qu’elles vivent en Iran et voient la misère de ces dizaines de millions d’Iraniens en dessous du seuil de pauvreté.

WWW.IRAN-RESIST.ORG

<HTML>un autre exemple des interviews de Marie-Claude Decamps :
- Dans le Monde, Akbar Ganji révèle une vérité enfouie
- (25.06.2006)

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