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La Russie plaçait de grands espoirs dans ces négociations
22.02.2006

Analyse par Piotr Gontcharov, commentateur politique de RIA Novosti + un lien vers nos commentaires.



Comme il fallait s’y attendre, le premier volet des négociations russo-iraniennes de Moscou sur la création d’une coentreprise d’enrichissement d’uranium sur le sol russe s’est soldé par un résultat nul - les négociations ont été reportées à plus tard.

Ce résultat était tout à fait prévisible. Téhéran aurait trahi ses principes, s’il avait donné une réponse nette à la question de savoir s’il acceptait l’idée d’enrichir de l’uranium sur le sol russe.

On souhaite obtenir une réponse de principe de l'Iran qui n'a pas l'air de vouloir la donner. L’Iran ne dira jamais oui sans dire non. Tout en insistant sur le caractère pacifique de son programme nucléaire, Téhéran cherche à se doter du cycle nucléaire complet pour pouvoir enrichir de l’uranium et recycler le combustible nucléaire usé sur son territoire. Seule la volonté politique sépare ce niveau de technologies nucléaires de la création d’une bombe.

La proposition russe de mettre en place une coentreprise russo-iranienne d’enrichissement d’uranium et de recyclage du combustible nucléaire pourrait disculper le programme nucléaire iranien aux yeux de l’Occident et des États-Unis. Mais cela serait possible uniquement si Téhéran renonçait au développement du cycle nucléaire complet et se contentait de l’uranium enrichi à l’étranger, en l’occurrence en Russie. Mais l’Iran ne paraît pas seulement être loin de vouloir dissiper les doutes de l’Occident concernant son programme nucléaire, il semble qu'il ne le fera jamais. Dans le même temps, Téhéran ignore la position de Moscou et sa préoccupation face à la situation autour du programme nucléaire iranien. Les visions iranienne et russe des négociations tenues à Moscou sont différentes.

La Russie plaçait de grands espoirs dans ces négociations [1]. Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a déclaré lundi, au premier jour des négociations, que la Russie chercherait à sortir le problème nucléaire iranien de l’impasse et à empêcher la dégradation de la situation vers un conflit armé. Il l’avait promis au président russe au cours d’une rencontre de M.Poutine avec les membres du gouvernement. Il semble que les entretiens n’aient pas levé la préoccupation de Moscou à propos du dossier nucléaire iranien.

Commentant sa prochaine visite en Iran, le chef de l’Agence russe de l’Énergie atomique (Rosatom) Sergueï Kirienko a déclaré que les deux pays poursuivraient leurs négociations sur la création d’une coentreprise d’enrichissement d’uranium en Russie et que la Russie faisait "tout son possible pour donner [à l’Iran] la possibilité de sortir de sa situation difficile par des moyens pacifiques et constructifs".

Dans le même temps, Téhéran a qualifié de positives et de constructives les négociations menées à Moscou. Le fait que les deux parties aient conclu que le renvoi du dossier iranien devant le Conseil de sécurité de l'ONU ne serait pas une « démarche constructive » et que la situation autour du programme nucléaire iranien devait être normalisée dans le cadre de l’AIEA est le principal résultat des négociations, a déclaré mardi le sous-secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale d’Iran, Ali Hosseini-Tach, chef de la délégation.

Téhéran souhaite que la Russie vienne lui tirer les marrons du feu, alors que Moscou considère déjà la position iranienne d’un œil plus critique, prêtant l’oreille aux appels de l’Occident. Le président du comité parlementaire russe pour les affaires internationales Constantin Kossatchev estime que l’Iran ne manifeste pas assez de bonne volonté pour régler la situation autour de son dossier nucléaire et que les efforts russes ne sont pas suffisants. « Le tango se danse à deux. Nous ne sommes pas pris en otages, mais nous dépendons de la bonne volonté de Téhéran qui malheureusement n'en manifeste pas assez. »

Le parlementaire craint également que la situation évolue selon le scénario nord-coréen, « que l’Iran se replie sur lui-même, se retire du Traité de non-prolifération (TNP) et arrête de collaborer avec l’AIEA ». « Je considère que la communauté internationale y perdra et il faut profiter de cette chance tant qu'elle existe. C'est ce que la Russie est en train de faire », a noté le parlementaire sans reconnaître l’évidence - la Russie continue de danser le « tango iranien » seule et les négociations russo-iraniennes de Moscou l’ont démontré.