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Iran-Bombe en 2009 : Analyse d’une expertise fondée sur des données fournies par l’Iran
15.01.2006

Selon les besoins diplomatiques du moment, des experts les uns plus réputés que les autres publient des estimations sur la date à laquelle les mollahs pourraient avoir leur première bombe nucléaire.



Cependant aucun d’entre eux n’envisage la possibilité d’un usage terroriste de la matière sale. Est-il besoin de rappeler que les experts les plus réputés en terrorisme n’avaient pas non plus imaginé l’attentat spectaculaire du 11 septembre ?

Aujourd’hui deux de ces experts mondialement connus ont déclaré que les mollahs auraient la première bombe nucléaire seulement en 2009 et surtout ils ont affirmé qu’il leur faudrait plusieurs années avant de constituer un arsenal nucléaire digne de ce nom. Nous nous sommes penchés sur cette expertise et les experts qui ont publié ce rapport qui arrange bien certains, au lendemain d’un revirement inattendu de la part de la Troïka qui nous avait habitués à plus de laxisme vis-à-vis des mollahs. Pourquoi pensons-nous que cette expertise convient à la Troïka ?

La Troïka a évoqué une possible saisine avant de faire marche arrière en rappelant qu’il est prématuré d’inclure des sanctions dans ce projet de saisine. Cette annonce décrédibilise la saisine avant même qu’elle ne soit prononcée. Au lendemain de l’annonce solennelle de l’UE3 au sujet de la saisine, le Quai d’Orsay déclarait que des sanctions seraient prématurées. Et l’on ne comprend pas pourquoi les media incriminent la Russie ou la Chine puisque c’est Paris qui se dit pas emballé par des sanctions. Il s’agit sans doute d’une bourde de plus d’un Quai d’Orsay livré à des jeunes stratèges qui oublient les règles de la bienséance diplomatique. Paris aurait pu attendre la réaction de Moscou avant de ruer dans les brancards et faire cette déclaration surprenante, mais il n’en est rien et Paris a vendu la mèche sur ses vraies intentions vis-à-vis de l’Iran et surtout vis-à-vis de la saisine.

Cette annonce des experts, qui nous promettent l’arsenal nucléaire du Jihad pour un avenir relativement lointain, arrive à point nommé pour les Européens, les Russes, les Japonais, les Chinois et les autres. Tous multiplient les déclarations pleines de contradictions espérant reprendre les négociations avec les mollahs et trouver un moyen respectable de neutraliser cette saisine qui était impossible d’éviter.

L’estimation de David Albright arrive providentiellement et change les données : Puisque les mollahs ne sont qu’au début de leurs recherches et que le terrorisme islamique n’est qu’une invention de George Bush, donnons une chance à la paix au moins jusqu’en 2009 (le temps de finir quelques gazoducs et autres pipelines qui nous mettraient à l’abri de nos besoins de pétrole iranien).

Et un 11 septembre nucléaire ? Nos supers experts n’ont pris en compte que des données scientifiques et non les élucubrations de petits esprits non scientifiques comme les nôtres.

Selon David Albright (ex-enquêteur de l’AIEA) et son adjoint Corey Hinderstein, l’Iran pourrait disposer de sa première bombe nucléaire en 2009 et en quelques années ensuite ce pays pourrait être capable de produire de 25 à 30 bombes par an. Donc tout va bien, aucune raison de s’inquiéter.

Les deux experts (qui travaillent depuis 1995 sur le sujet) ont basé leurs estimations sur des chiffres publiés par les mollahs qui affirment ne disposer que de 160 centrifugeuses. Selon l’Institut pour la Science et la Sécurité Internationale (présidé par Albright), l’Iran a installé fin 2003 à Natanz une batterie de 164 centrifugeuses et procédé à des tests sur une petite batterie de 19 machines, durant lesquels les Iraniens avaient rencontré plusieurs problèmes.

Les deux experts enchaînent ensuite une série de démonstrations techniques qui sont toutes fondées sur des données fournies par l’AIEA et ils arrivent à cette conclusion particulière. A l’appui de leur thèse, ils utilisent une supposition de l’AIEA qui affirme qu’environ 30% des centrifugeuses auraient été endommagées à la fin de ces tests. En outre, ajoutent les 2 experts, depuis l’interruption de ces activités en novembre 2003, certaine des installations ont pu souffrir de corrosion.

Or, en août 2005 Hassan Rohani (le responsable du nucléaire sous Khatami) avait déclaré que le régime islamique n’avait jamais cessé ses activités durant les deux années de pseudo-négociations avec la Troïka européenne (Allemagne Grande-Bretagne et France) : Rohani a déclaré que le régime islamique faisait semblant d’accepter les demandes européennes pour surmonter ses difficultés… Albright ne tient pas compte de ces déclarations et ne s’en tient qu’aux données de l’AIEA. Ces données sont basées sur les déclarations officielles du régime des mollahs à l’AIEA. Déclarations que personne n’a pu, ni véritablement cherché à vérifier. Déclarations qui font partie des garanties présentées par les mollahs pour affirmer le caractère civil et pacifique de leur programme nucléaire. En effet, l’estimation d’Albright est une estimation qui aurait pu être fait par le régime s’il finissait par admettre l’existence d’un programme nucléaire. Cette expertise présente de grandes lacunes et ce n’est pas tout.

La raison pour laquelle ISIS se base uniquement sur les données de l’AIEA est que cet institut dit avoir été échaudé par des informations inexactes ou incomplètes communiquées par le CNRI (les moudjahedines). Selon Albright, le CNRI est au courant de l’existence des sites clandestins, mais il ne possède aucune information sur ce qui se passe à l’intérieur des installations.

La mauvaise qualité des informations du CNRI aurait encouragé les experts de l’ISIS de ne se baser que sur des informations officielles. En réalité, Albright ne cherche pas seulement à discréditer les informations de CNRI : il cherche à réhabiliter les méthodes de travail de l’AIEA. Selon Albright, les Moudjahedines inventent les détails qu’ils ignorent et cela nuit à la partie exacte de leurs révélations, voire les discrédite. En réalité si Albright prenait en compte même partiellement et ne serait-ce que par jeu les éléments apportés par le CNRI : tous ses raisonnements s’effondreraient et la bombe des mollahs serait visible d’ici peu de temps.

Il y a des experts américains ou français qui ne partagent pas l’opinion et les méthodes de David Albright, ex-proche collaborateur de Sénateur démocrate Roy Romer qui fut le co-directeur de campagne de Clinton en 1996. L’opinion de David Albright est contestée par d’autres institutions d’expertises nucléaires qui ne politisent pas ce débat et n’en font une vendetta « démocrate » anti-Bush car l’enjeu concerne la sécurité de notre planète.

Parmi ceux qui se montrent exclusivement attachés à l’étude des possibilités, il y a l’Américain Paul Leventhal, fondateur du Nuclear Control Institute et le Français, Bruno Tertrais. Ce dernier a déclaré qu’il y avait trois hypothèses possibles. « Si le programme iranien continue d’aller au rythme qu’il suit depuis le milieu des années 1980, il faudra à Téhéran encore cinq à dix ans. Si les Iraniens décidaient d’aller au plus vite en utilisant la technologie de l’enrichissement de l’uranium, avec les installations que nous connaissons, Téhéran a encore besoin d’environ deux ans pour disposer d’assez d’uranium hautement enrichi pour faire une bombe. Troisième hypothèse : s’il y a des installations cachées, avec des centrifugeuses d’enrichissement plus rapides, alors ce délai pourrait être plus court. »

Pour Tertrais ou Leventhal, reconnaître la qualité des révélations du CNRI ne revient pas à nier le caractère terroriste et infréquentable de ce mouvement. Le Français Tertrais ne s’attarde pas sur l’origine des informations, mais Leventhal, qui milite en faveur de la non-prolifération, a abordé ce détail lors d’un débat télévisuel avec Albright [1]. Leventhal avait alors signalé que l’AIEA n’a jamais pris en considération les révélations de CNRI et ce malgré le fait que bon nombre de leurs révélations se sont révélées exactes. Révélations qui ont permis d’accéder à des sites que ni l’AIEA ni les services secrets américains n’avaient pu détecter. Leventhal affirme qu’il faut savoir que le CNRI est un mouvement terroriste qui a prêté main-forte à Saddam, mais ce fait ne peut mettre en cause la véracité des informations et le fait qu’elles ont mis les inspecteurs sur de bonnes pistes.

Leventhal a reproché publiquement à Albright son souci de termes techniques utilisés par le CNRI pour nommer les installations à Natanz. Prétextant que les « ingénieurs » du CNRI avaient utilisé les mauvais termes techniques pour désigner les appareils, Albright avait critiqué publiquement la qualité de toutes leurs révélations. Leventhal a profité de ce débat télévisé pour revenir sur cette constatation injustifiée et remettre les pendules à l’heure. Il a reproché par la même occasion à l’AIEA de sous-estimer perpétuellement ce genre information alors qu’elle-même n’a jamais rien découvert en Iran. En réalité l’affaire de l’estimation de l’ISIS qui éloigne la perspective de l’arsenal nucléaire iranien pour plusieurs années est une opération orchestrée par Albright pour le compte de l’AIEA. Une opération qui sert également les intérêts de l’UE.

Cette expertise a été amplifiée par la presse alors que son expertise est contestée par Tertrais et par Leventhal qui ont une réputation plus grande que Albright. Il s’agit d’une guerre menée contre des informations qui proviennent directement d’Iran et sont retransmises au media par les Moudjahidines. Ces informations proviennent des employés du régime islamique qui voudraient la fin du régime et pensent que c’est là un moyen efficace de précipiter la fin des mollahs et de la théocratie en Iran. Car rappelons-le, le CNRI ne dispose pas de satellites, il est dans ce cas précis uniquement un canal de transmission d’informations.

Albright affirme que les informations du CNRI sont mauvaises, car c’est un mouvement terroriste avec des objectifs politiques (être retiré de la liste des groupes terroristes). Tertrais ne remet pas formellement en cause les informations en question et les prend en compte avant de se prononcer publiquement sur la capacité nucléaire des mollahs et finalement Leventhal dit que le CNRI a effectivement des objectifs politiques et donc non scientifiques (ni humanitaires), mais que les révélations restent valables d’un point de vue scientifique et en plus elles ont été vérifiées sur place par les inspecteurs de l’AIEA.

Albright et son organisation qui sont très proches de la l’AIEA, ont toujours soutenu les négociations par l’intermédiaire de la Troïka, en critiquant copieusement « l’attitude hostile des Etats-Unis ». Malgré la mauvaise foi affichée par les mollahs, Albright va au-delà de la neutralité nécessaire à l’expertise et recommande la poursuite des négociations qui selon lui seront efficaces pour encourager les mollahs à abandonner leurs activités nucléaires. L’intérêt que porte Albright à la politique et aux « efforts diplomatiques de la Troïka » dépasse l’entendement et l’on est en droit de se demander si ses convictions politiques ne prennent pas le pas sur son expertise et s’il ne lui donne une orientation particulière qui l’empêcherait d’envisager tous les cas de figures comme le fait Tertrais.

Leventhal recommande depuis toujours un recours au Conseil de Sécurité alors que Albright y a toujours été opposé, même avant cette expertise. Ce qui explique cette sortie médiatique pour fusiller la possibilité de traîner cet état voyou et dangereux devant le Conseil de Sécurité.

L’expertise de David Albright est faite sur la base des documents des mollahs et de ce fait elle ne reflète pas la réalité du programme nucléaire de ce régime, mais l’image que les mollahs veulent en donner. Albright est à blâmer certes, mais on distingue derrière lui l’ombre de l’AIEA et de El Baradei. Ce dernier cherche un moyen plausible pour ne pas recommander la saisine.

El Baradei, très proche de la Ligue arabe, pense que la bombe iranienne établira un équilibre des forces nucléaires dans le Moyen-Orient. El Baradei est prêt à stabiliser le régime des mollahs pour contrer la force nucléaire d’Israël alors que le recours à cette force n’a jamais était évoqué lors des différents conflits qui ont opposé les arabes musulmans aux Israéliens. Le peuple Iranien est victime des mollahs au pouvoir et souffre également des retombées des vieilles rancunes qui gangrènent le Moyen-Orient et qui n’ont rien à voir avec l’Iran.

Même si n’importe quel citoyen de cette planète est aujourd’hui interpellé par l’imminence du danger d’une bombe aux mains des mollahs, on ne peut sous-estimer la puissance médiatique de ce genre d’expertise. Nous tenions à dénoncer cette expertise fallacieuse et incomplète malgré notre aversion pour le CNRI, ses dirigeants et leur conduite.

Que ce régime soit à 3 ans ou à six mois de la bombe, il faut s’en occuper avant qu’il ne dispose de matière nucléaire hautement enrichie car il en fera un usage terroriste de toutes les manières.

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