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Iran : Le mariage temporaire et le double apartheid sexuel
06.06.2007

En Iran, il y a des choses qui choquent les ONG pour la défense des droits des hommes ou des femmes, mais d’autres choses qui ne choquent personne, et quand le sujet est traité, les journalistes mettent un point d’honneur à minimiser leur gravité. Ainsi est traité le mariage temporaire (Sigheh) par l’agence américaine AP.



L’Associated Press écrit : « Le ministre de l’Intérieur iranien a déclenché une polémique dans son pays traditionnellement conservateur en apportant son soutien à l’idée de mariage provisoire pour tenter d’endiguer les pratiques sexuelles hors mariage, ont annoncé samedi les médias officiels ».

Il y a d’abord cette insistance américaine et même européenne à vouloir à tout prix confondre, la république islamique, c’est-à-dire le régime des mollahs, avec l’IRAN. Ceci est devenu la règle. D’emblée cette formule crée un lien entre le régime et le peuple. Ceci permet d’affirmer que le pays tout entier est traditionnellement conservateur. En deux phrases, le correspondant d’AP à Téhéran a réussi à faire passer la charia en vigueur en Iran pour une loi en conformité avec les attentes du peuple. Il faut tout de même être insensible à ces centaines de milliers d’iraniens qui choisissent l’exil et la misère de l’exil pour écrire une telle ineptie. Si on transposait cette réflexion sur les autres recommandations de la charia, tous les Iraniens approuveraient que l’on soit flagellé à mort pour avoir bu un verre.

En ce qui concerne le mariage provisoire, le journaliste de l’AP a tout simplement restitué le point de vue du régime qui annuellement fait fuir 500,000 personnes de leur propre pays, pousse 175,000 autres au suicide et des millions vers la toxicomanie et la prostitution. Ce dernier fléau est directement lié au mariage provisoire : un homme signe un contrat de mariage avec une femme ce qui l’autorise à coucher avec elle et de se séparer d’elle aussitôt qu’il le désirera. Cette pratique est une forme de prostitution. Dans un pays où l’âge légal du mariage est de 13 ans pour les filles, ceci est la porte ouverte à la pédophilie avec une autorisation religieuse et légale. Ce point crucial n’a pas été traité par le journaliste de l’AP dont l’article a été repris sur différents supports. Cet aspect de la charia perturbe les occidentaux qui préfèrent ne rien dire et détournent le regard.

Décodages | Article 1075 du Code Civil des mollahs : Le mariage temporaire (Sigheh) est légal pour une durée variant de une heure à quatre-vingt-dix-neuf ans. L’homme peut contracter autant de mariages temporaires simultanés qu’il le désire. Il peut cesser le contrat quand il le veut. La femme ne le peut pas.

L’article de l’AP ignore avec superbe le point de vue des femmes, à aucun moment l’illustre crétin qui a écrit ce papier n’a jugé nécessaire d’exposer le point de vue des femmes et pour cause, le taux de la participation des femmes dans le monde du travail sous le régime des mollahs est proche de nul : 1,7%. Les iraniennes sont dépendantes économiquement et leur seul moyen de subsister est d’être mariées. Celles qui ne le sont plus, après un divorce ou une répudiation, elles peuvent essayer de devenir des 2nde, troisième ou quatrième épouses, une sorte de bonne sans salaire qui est logée et maigrement nourrie. D’autres tombent dans le circuit du sigheh, mariage temporaire, si elles ont des attraits physiques. C’est une situation catastrophique et l’article d’AP n’en parle pas.

Le journaliste de l’AP n’expose que les points de vue des consommateurs mâles et fait la belle part à un mollah nommé ministre de l’intérieur connu pour sa cruauté et son implication dans la répression des opposants au début de la révolution islamique. Voici quelques extraits de cet article :

« Le mariage provisoire est une règle de Dieu. Nous devons l’encourager vigoureusement », a déclaré le ministre de l’Intérieur Mostafa Pourmohammadi, cité par la télévision d’Etat.

« Nous devons trouver une solution pour répondre au désir sexuel des jeunes qui ne peuvent pas se marier, a expliqué Pourmohammadi à plusieurs journaux locaux. La moitié des 70 millions d’Iraniens a moins de 30 ans.

Reza Carabi, un chauffeur de taxi de 23 ans exprime ainsi la frustration de beaucoup de jeunes Iraniens qui n’ont pas les moyens d’acheter une maison et de se marier.

« Je n’ai pas assez d’argent pour assumer une vie conjugale. Je ne veux pas fréquenter de prostituées. Que dois-je faire pour satisfaire mes besoins sexuels ? », demande-t-il.

Les opposants à la pratique du « mariage provisoire » craignent qu’elle n’entraîne une augmentation de la prostitution et une dégradation des valeurs morales.

« Ca va ébranler les fondements de la famille », a affirmé le juriste Nemat Ahmadi, arguant que cela donnerait aux hommes riches un alibi religieux pour avoir des liaisons. « ça va seulement promouvoir la prostitution », redoute-t-il.

Même quand l’article évoque la prostitution, il ne prend pas le soin d’expliquer l’étendue de la présence des prostituées dans les villes et y consacre un paragraphe très bref, où il est question de l’absence de statistiques officielles accessibles sur le nombre de prostituées en Iran.

Mais le plus grave est que l’article ne mentionne à aucun moment la place réservée à la femme dans le monde actif qui en a fait une assistée incapable de survivre sans le mariage ou le mariage temporaire. L’article évoque les difficultés des jeunes, mais il oublie également de préciser que seules les vierges trouvent un mari, il y a donc deux apartheids sexuels en Iran : le premier attribue un statut d’inférieur à la femme et la condamne à être un objet de plaisir, et le second crée deux catégories de femmes, les fraîches et les non fraîches qui ont encore moins de droits au pays des mollahs.

WWW.IRAN-RESIST.ORG

Pour en savoir + sur la situation des femmes iraniennes :
- L’Esclavage et le commerce des femmes en Iran
- (11 Juin 2004)

Témoignages à propos du mariage provisoire :
- Le sort peu enviable des femmes
- (2 Avril 2006)

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| Mots Clefs | Fléaux : Prostitution, tourisme sexuel & Sigheh |

| Mots Clefs | Violence : Violence contre les Femmes |

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Nous aimerions savoir pourquoi aucun mouvement féministe n’utilise ce vecteur pour parler de l’Iran et pourquoi les mouvements les plus connus utilisent leur poids pour ne défendre que les « féministes de l’intérieur » qui n’ont aucun bilan militant et ne sont que les alibis féministes d’une soi-disant capacité démocratique du régime des mollahs ?

Pour en savoir + sur la situation des femmes iraniennes :
- Iran : La Femme dans la Constitution du régime des mollahs
- (10 Mai 2007)