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Iran : La semaine en images n°184 29.08.2011 Au cours des dernières semaines, tout particulièrement à l’occasion du Ramadan, les mosquées devaient être pleines, mais elles sont restées vides. Le peuple iranien, mais aussi le personnel du régime (près de 500,000 Pasdaran et 80,000 membres du clergé) ainsi que des dizaines de milliers de Bazaris avaient boycotté les mosquées. Ce mois qui devait rappeler la religiosité des Iraniens et par conséquent leur attachement au système islamique, a démontré leur rejet de l’islam et du régime des mollahs. Le boycott a rappelé l’isolement de la caste dirigeante. Les Businessmen issus du régime ont conclu que ce dernier ne pouvait plus assurer sa survie et leurs intérêts. Ils ont commencé à prendre leur distance pour ne pas couler avec le régime. La caste dirigeante qui a mis l’accent sur ses capacités sécuritaires pour les rassurer, mais en l’absence d’un déploiement policier dans les rues, personne n’a cru le régime. Lors de la 3e semaine du Ramadan, le régime a intensifié sa propagande sécuritaire et a misé sur le retour rassurant de la vieille garde afin de remplir les mosquées à partir du 19e jour du Ramadan (le vendredi 19 août) pour les 3 Nuits de Gratitude célébrant l’inspiration du Coran à Mahomet, puis pour les nuits de deuil à l’occasion de l’anniversaire de l’assassinat d’Ali, le fondateur du chiisme. Mais encore une fois, en l’absence d’un déploiement policier dans les rues, le régime n’a pas su intimider le peuple ou inciter les siens à se mobiliser lors de la première des 3 Nuits de Gratitude, la mobilisation a été inférieure à 1000 personnes dans tout l’Iran. La troisième semaine s’est terminée sur une note très déprimante. Les dirigeants n’ont pas osé s’exposer dans les mosquées. La très faible mobilisation de la première Nuit de Gratitude annonçait également un boycott des rassemblements programmés lors de la quatrième semaine du Ramadan dont la Journée de Qods qui au dernier vendredi du Ramadan doit marquer l’attachement du peuple au régime à travers son adhésion à son projet de destruction d’Israël. Le régime ne pouvait rien espérer car en 2010, les Iraniens ainsi que les Pasdaran, le clergé et les Bazaris avaient massivement boycotté cette journée de Qods. La semaine a commencé sous le signe de la peur. Le régime a annulé les commémorations avant de changer d’avis et se focaliser sur une propagande religieuse imaginative insinuant une forte mobilisation voire le débordement des mosquées. Ce qui l’a amené à maquiller les images prises avec le peu de partisans qui lui reste. En fin de semaine, lors de la journée de Qods, le régime a eu un malheur supplémentaire : le ciel était gris et pluvieux alors que le soleil brille à ce moment de l’année : il ne pouvait pas utiliser les images d’archives des années fastes du début de la révolution quand il bénéficiait du soutien des Pasdaran. Il a été amené à faire d’autres maquillages grossiers des images dont il disposait. Voici les images d’une semaine cafouilleuse marquée par de petites tricheries pour dissimuler de très grands problèmes, images qui évoquent les limites du régime, images qui vont déprimer davantage ses derniers partisans. Rappel des derniers événements survenus en Iran | Il y a une semaine, le régime avait renforcé sa propagande sécuritaire et incendié encore une fois le Bazar afin d’intimider le peuple et ses associés affairistes pour s’assurer de leur participation aux rassemblements de la dernière semaine du Ramadan : les 3 Nuits de Gratitude et les cérémonies d’hommage à Ali qui fut blessé pendant la première nuit de Gratitude et mourut lors de la troisième nuit. Mais le régime a échoué dès la première étape avec le boycott massif de la 1ière et principale Nuit de Gratitude consacrées à remercier Dieu d’avoir inspiré le Coran. Il a dû renoncer à la commémoration d’Ali. On n’a pas entendu parler de ce personnage de référence pour le régime. Le boycott était un désaveu politique, l’abandon d’Ali une défaite politique, mais aussi preuve de son incapacité à punir ses adversaires, un point essentiel pour pouvoir gérer la crise et empêcher la fuite de ses derniers partisans. Samedi, au lendemain de cette nuit d’horreur et au début d’une nouvelle semaine jalonnée de rassemblements impossibles à organiser, le régime a cédé à la panique. Pour limiter les dégâts, il a joué la carte du repli stratégique. Ses médias n’ont plus parlé de 3 Nuits de Gratitude, mais de la Nuit de Gratitude. Ils ont aussi annoncé l’ajournement des rassemblements pour les deux nuits restantes. On n’a vu aucun dirigeant. La base a paniqué : les associés du régime se sont précipités pour acheter massivement de l’or et des dollars. Le prix de l’or a augmenté de 20% en quelques heures alors qu’en Occident, sous l’impulsion de la crise internationale, son taux a enregistré 6% lors de la dernière semaine. La hausse soudaine de l’or en Iran avait une raison propre : la baisse de la confiance des associés du régime en son avenir après le boycott de la Nuit de Gratitude, l’abandon du soldat Ali et la disparition des dirigeants paniqués. Le petit passage à vide des dirigeants leur avait coûté cher ! Qu’allait-il leur arriver à la fin de la semaine au moment du boycott prévisible de la journée de Qods s’ils demeuraient invisibles ? Il était clair qu’ils allaient perdre des partisans. Ils devaient donc occuper le terrain pour limiter les dégâts tout en évitant de mettre en valeur leur isolement. Dimanche, le régime est revenu sur le terrain avec des solutions. Il a cessé de faire l’autruche : il a assumé le tsunami tout en l’attribuant au contexte international favorable à la hausse. Pour masquer leur isolement, il fallait également éviter les rassemblements officiels : le régime a annoncé l’ajournement des dîners de Ramadan autour du Guide par solidarité pour les enfants affamés de Somalie. Enfin, il a effacé son délit de fuite en faisant état d’un rassemblement officiel en hommage à Ali trois jours plus tôt pendant la première Nuit de Gratitude ainsi que des rassemblements populaires sur le même thème à la même date à Téhéran, à Ispahan et dans une station de police de Machad, ville marquée par un fort boycott au sein de ses Pasdaran.
Incapable de rassurer les siens avec les rumeurs de sa popularité, le régime a changé d’approche : il a parlé d’une mise à l’abri de ses centrifugeuses controversées pour provoquer et faire reculer Washington afin d’obtenir un gel voire la levée des sanctions, des choses qui peuvent rassurer momentanément ou même définitivement ses associés paniqués. Washington qui a besoin de ses sanctions pour forcer les mollahs à transférer leurs pouvoirs vers ses pions a esquivé. Paris, qui craint la chute du régime et la fin de ses contrats, a parlé d’une provocation pour ridiculiser les mollahs et mettre fin à cette initiative. Ce même lundi d’échec, un jeune conducteur de taxi, embêté par un groupe de miliciens fidèles au régime s’est aspergé d’essence sur la Place de la Révolution et a craqué une allumette. Les passants se sont précipités pour le sauver et pour intercepter les miliciens fidèles au régime. Ces derniers se sont enfuis. Par leur fuite devant des passants désarmés, ils ont cédé le terrain que le régime venait à peine d’occuper : les associés économiques du régime ont paniqué et la demande d’or s’est envolée : à nouveau, le marché est devenu fébrile ! Ne sachant que faire, le régime a annoncé qu’il avait simulé avec succès une répression gigantesque sur un site touristique retiré du nord du pays pour insinuer qu’il occupait le terrain, mais il n’a évidemment montré aucune image. L’absence d’images était préoccupante. Le régime était visiblement dans une improvisation de dernière minute. Cela ne pouvait pas rassurer ses derniers fidèles. Il allait vers de nouvelles ruptures. Le régime avait alors en tête le boycott de la Journée de Qods ! Désespéré par l’évolution de la situation, il a encore joué la carte de la provocation en annonçant la mise en service d’un nouveau missile sol-mer capable de couler les pétroliers en transit par le Détroit d’Ormuz, une menace pour faire reculer Washington sur les sanctions afin de récupérer ses partisans. Les Occidentaux ont ignoré ce missile qui n’est pas une nouveauté surprenante, mais un des nombreux vieux missiles achetés à la Chine par le passé.
Mais décidément, peu chanceux, ce mardi, un des plus grands ayatollahs iraniens, un « marja e taghlid » ou exemple à imiter, Vahid-Khorassani a trépassé. Son enterrement, s’il était boycotté, allait contredire la dernière propagande du régime. Il fallait trouver des gens pour accompagner le corps et éviter une nouvelle panique des associés. Dans le doute, le régime a préféré ne pas parler de ce mort encombrant. Il avait bien estimé le coup car la mobilisation a été insignifiante. Le grand ayatollah a rejoint sa dernière demeure dans une totale discrétion sous les regards étonnés des passants ignorant tout du cortège.
Le régime a mis au centre de l’actualité une visite des penseurs islamiques chez le Guide et la cérémonie de fermeture de l’exposition internationale sur le Coran : la journée a été consacrée au Coran. La photo de la soi-disant cérémonie de fermeture du Salon international du Coran montre d’ailleurs un non-événement. En fait, le régime a surtout agressé le peuple avec sa journée du Coran et a de facto occupé le terrain sans se mouiller.
Par ailleurs, sur cette première photo, nous avons remarqué que les posters étaient anciens, à l’exemple du poster avec les coins rouges que l’on voit depuis des années. La série comportait néanmoins des photos avec un ciel gris et des visages sans contraste comme celle-ci où l’on peut d’ailleurs voir un poster lié à l’actualité montrant les présidents arabes qui ont perdu le pouvoir.
Ce poster d’actualité, le ciel gris et des visages uniformément exposés sont de facto devenus nos critères pour différencier les images de la journée des images d’archives. Nous avons trouvé seulement 4 autres photos conformes à ces critères.
Cependant, le point intéressant du discours n’était pas son contenu, mais sa forme et son cadre. Le visage d’Ahmadinejad était peu contrasté, mais pas en raison du ciel gris : il a fait ce discours deux heures après la fin du défilé des bras cassés sous la grande couverture métallique du terrain de foot de l’université de Téhéran transformé en mosquée pour la Prière de Vendredi. Le point intéressant du discours était ce lieu et le fait que le régime a profité de l’occasion pour balayer la salle afin de démontrer que cet événement hebdomadaire n’était pas boycotté.
Le régime semble en fait nous avoir proposé un best of de ses archives pour illustrer la participation populaire à cet événement, à l’image du cocktail d’images qu’il a diffusé pour illustrer le défilé de la Journée de Qods à Téhéran ! En agissant ainsi, il a presque confirmé la thèse du boycott de la prière de Vendredi après le boycott de la Journée de Qods. Les associés du régime qui connaissent bien le site de la Prière de Vendredi n’ont pas aimé ce montage évoquant la faiblesse du régime et donc sa possible chute. Samedi à 7h30 du matin, les gens faisaient la queue devant les banques pour acheter de l’or afin de mettre leurs avoirs à l’abri ! Pour rassurer les gens, le régime a annoncé qu’il avait des réserves pour satisfaire tout le monde. Il a aussi diffusé des images du gouvernement tout entier en train de rendre hommage aux pères fondateurs du régime, Khomeiny et Beheshti pour rappeler à ses partisans paniqués que les responsables ne déserteront pas la partie.
Alors que le régime semblait dépassé, dans la soirée, il a eu un autre malheur : de la pluie à Téhéran et comme d’habitude, la ville a été rapidement inondée. Des milliers de SDF qui dorment le long des trottoirs des quartiers chics où ils vivent de mendicité ont été obligés de s’abriter à l’entrée des immeubles rappelant à chacun la fragilité de la société iranienne.
La semaine prochaine sera aussi placée sous le signe de la peur car le régime devra organiser une méga prière publique à travers Téhéran et toutes les villes du pays pour célébrer la fin du Ramadan, un événement qui fut unanimement boycotté l’année dernière. Le régime devra se montrer plus efficace, du moins dans sa gestion de la crise, pour se montrer capable de gérer la tempête qui se prépare en Iran afin de ne pas perdre le pouvoir comme ces dirigeants arabes dont il se moque sur un ton désinvolte.
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