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Iran : La semaine en images n°141 31.10.2010 Il y a un mois, le régime des mollahs a rencontré un problème inédit quand il a rendu tout compromis impossible en accusant les Américains d’avoir organisé les attentats du 11 septembre. Aussitôt les grands négociants du Bazar ont commencé une grande grève pour protester contre ce refus de compromis, contre les sanctions plus lourdes que cela allait leur imposer et surtout contre le renforcement présumé du plan de rigueur du régime (réduire la consommation pour éviter des pénuries). Cette grève a lourdement handicapé l’économie nationale : la bourse s’est effondrée et les prix du bâtiment ont doublé en trois semaines. Mais les mollahs n’ont pas assoupli leur position car le compromis demandé par Washington passe par une transition des pouvoirs des mollahs vers les islamistes pro-américains. Le Bazar était en train de pousser le régime à se livrer à l’ennemi : il devait casser cette grève par tous les moyens. Le régime a alors menacé d’incendier les Bazars ou de faire pendre les grévistes. Mais il n’a pas réussi à mettre à exécution ses menaces, ce qui a permis de confirmer le fait qu’il avait perdu le soutien de ses miliciens ou de sa base populaire. Chacun s’est alors dit qu’il serait incapable de résister à un nouveau soulèvement populaire. Le régime a alors changé de tactique en forçant sur la propagande vantant ses capacités policières. Cette durée lui a finalement profité car entre temps les Bazaris se sont essoufflés et la grève a été moins suivie la semaine dernière. Le régime n’a pas pu fêter l’événement car depuis deux semaines, il a rencontré une nouvelle difficulté : Washington a profité de sa faiblesse en demandant à Total de suspendre ses relations avec les mollahs, c’est-à-dire de ne plus leur fournir la part de pétrole qui leur revient de droit en vertu des contrats d’exploitation avec cette compagnie. La mesure a en fait privé Téhéran du pétrole dont il se sert pour produire 25% de ses besoins en carburant : de l’essence, mais surtout du kérosène dont il a besoin pour faire fonctionner ses centrales thermiques de production d’électricité. La mesure a rendu caduque le plan anti-sanctions basé sur une consommation basse et a mis le régime en demeure de réduire encore plus la consommation d’essence et d’électricité pour rallonger la durée de son autonomie. Il y a deux semaines, le régime avait annoncé l’entrée en vigueur du plan de rigueur. Mais par peur d’agitation sociale, il avait reculé en évitant d’annoncer la facture. Cette semaine, il a mis en avant sa capacité d’assurer l’approvisionnement afin de rassurer les Iraniens. Il a ainsi annoncé à grands renforts de publicité la production prochaine d’électricité à la centrale nucléaire de Bouchehr. Mais cette centrale ne peut produire que 6 milliards de KWh soit 5% de la consommation actuelle du pays. C’est pourquoi très pragmatiquement, cette semaine, le régime a surtout renforcé sa propagande pour affirmer ses capacités de répression. On a ainsi eu droit à de nombreuses images trafiquées du soutien massif des miliciens au Guide suprême… Pour comprendre le recours massif à des images évoquant la solidité du régime au lieu d’images évoquant sa capacité énergétique, il faut regarder de près la situation de la production d’électricité en Iran. Ça va mal ! vers une crise d’éléctricité | Il y a trois ans, le pays consommait annuellement près de 180 milliards de KWh produits à 88% par ses centrales thermiques qui fonctionnent avec quelque 18 milliards de litres de kérosène (ou 163 millions de barils de pétrole). Étant donné qu’il n’avait pas les capacités nécessaires pour produire ce volume de kérosène, il en importait et ce produit est de facto devenu un moyen de pression sur l’Iran. Les Etats-Unis ont cherché à limiter l’approvisionnement en sanctionnant Vitol, une compagnie britannique qui assurait la moitié des livraisons. Cela a entraîné une baisse de la production qui s’est traduite par des coupures de courant de plus en plus fréquentes. En mars dernier, à un moment où Téhéran semblait sur le point de céder aux Américains, les Britanniques qui assuraient la presque totalité des besoins en kérosène du régime ont cessé leurs livraisons pour le faire chuter afin que ce régime très nocif ne tombe pas entre les mains des Américains. Les coupures sont alors devenues plus longues et plus fréquentes. Mais les Américains qui ont besoin du régime islamique ont repris en main la livraison de kérosène via la Turquie et le Kurdistan irakien s’offrant ainsi les moyens de piquer les mollahs à leur convenance pour les amener à capituler. Cette réduction progressive de l’accès des mollahs au kérosène importé a provoqué de nouvelles baisses dans la production d’électricité en Iran. Aujourd’hui, la production annuelle iranienne pourrait être de l’ordre de 120 milliards de KWh par an dont 25% (soit 30 milliards de KWh) sont assurés par la production iranienne de kérosène. En prévision d’un embargo américain, Téhéran avait pensé pouvoir résister aux Américains en baissant la consommation sans nuire au fonctionnement de l’Etat. La difficulté était que l’Etat consomme 30% de la production soit 5% de plus que la capacité de production d’électricité sur la base d’un kérosène iranien. Il fallait donc réduire la consommation d’électricité des particuliers et augmenter la production du kérosène. Pour cela, le régime avait prévu de multiplier par 12 le prix de l’électricité des particuliers pour diviser leur consommation par 12 et dans le même temps multiplier par 7 le prix de l’essence pour baisser sa consommation afin de focaliser ses raffineries sur la production de kérosène ! Dernièrement, Washington a privé Téhéran du pétrole qui permettait d’exécuter ce plan démentiel. Téhéran s’est retrouvé avec ses réserves existantes : 3 à 6 mois d’autonomie en kérosène et en essence, plus une réserve flottante de 16 millions de barils de pétrole qui au niveau actuel de sa consommation pourrait lui assurer 53 jours d’autonomie électrique en plus (si tous ces barils étaient transformés en kérosène au détriment de l’approvisionnement en essence). Dans ces conditions, en cas d’un embargo total, le régime aurait 8 mois difficiles à gérer pour provoquer un clash afin de forcer Washington à reculer. Les 6 milliards de KWh annuels de Bouchehr pourraient alléger son fardeau, mais pour augmenter son autonomie, le régime devrait aussi réduire la consommation d’essence et d’électricité des particuliers tout en prenant en compte le fait que cela risque de provoquer un nouveau soulèvement d’où le recours massif à des images évoquant ses capacités de répression. Il y a une semaine, pour affirmer cette capacité à résister à un nouveau soulèvement, le régime avait diffusé des images faisant état d’une mobilisation monstre des miliciens et du petit peuple à l’occasion de la visite du Guide suprême Khamenei à la ville sainte de Qom. Les images étaient fausses car il avait en fait réuni près de 4000 de ses partisans notamment des étudiants (en théologie) étrangers dans une allée d’une longueur de 200 mètres sur une largeur de 20 mètres. Cette semaine, le régime a prolongé le séjour de Khamenei à Qom pour multiplier les shows de soutien évoquant des foules de plus en plus importantes de partisans du régime. Le trompe-l’œil vivant | Le premier show organisé le dimanche 24 octobre (2nd jour de la semaine en Iran) a été présenté comme le rassemblement géant des Bassidjis, ces miliciens qui ont rompu avec le régime et que ce dernier a même officiellement désarmés.
dimanche 24 octobre (2 Âbân) : show 1 : les Bassidjis dans la salle trompeuse | Il y avait en fait un peu de tout dans cette salle : des enfants, des vieux, beaucoup de mollahs et quelques jeunes sans uniforme que l’on a transformé en miliciens avec un bandeau rouge !
1. Bouchehr | Après avoir bombardé le peuple avec ces images censées le démoraliser, le régime a montré des photos inédites de Bouchehr pour montrer la grande taille des équipement pour évoquer sa capacité à résister aux sanctions. Mais l’objet de ses efforts étant de diminuer la consommation et non l’augmenter, lors de la conférence de presse qui avait été organisée pour annoncer ces capacités, aucun journaliste n’a eu l’idée de demander la capacité de production de cette centrale.
Le bilan de ces mises en scène | Ces jeux du régime n’amusent pas les Iraniens : ils auraient préféré que les mollahs et les Pasdaran s’occupent du pays ou de l’économie. Parce que la soi-disant opposition ne critique rien, certains jeunes photographes iraniens profitent de leur métier pour dénoncer la mauvaise gestion des dirigeants. Au cours de la semaine dernière, ils ont mis en avant la disparition de Karoun, l’une des grandes rivières du pays, qui sous le Chah produisait à elle seule la majeure partie des besoins iraniens en électricité alors que le pays avait 10 fois plus de grandes infrastructures industrielles.
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