Iran : Les insultes à Carla, une diversion médiatique réussie 31.08.2010 Depuis deux semaines, tous les médias français sont focalisés sur Sakineh, l’iranienne condamnée à mort par lapidation. Les médias ont longuement évoqué l’engagement de Carla Bruni et Nicolas Sarkozy. Dans ce contexte très survolté, il y a deux jours, Téhéran a annoncé haut et fort sa décision de procéder à deux autres lapidations. Cette info n’a eu aucune répercussion en France car l’AFP n’y a consacré aucune dépêche. La même agence de presse a répercuté des insultes proférées par le principal quotidien iranien à l’encontre de Carla Bruni pour son engagement. Or, nous lisons chaque jour ce quotidien, mais nous n’avions pas vu ce genre de chose. Les insultes ont paru sur un site très peu visité. Nous sommes dans un cas de censure et de diversion. | Décodages | L’Iran est dans une situation sociale explosive car l’économie fondée sur le pétrole et le commerce et non sur la production a été mise en faillite par les sanctions américaines. Le peuple a envie d’un changement, mais il ne peut pas changer la donne car c’est une somme d’individus et non un corps organisé. Par chance, la faillite économique touche aussi les milices et le Bazar qui sont des corps organisés. Le Bazar est en froid avec le pouvoir, mais il a peur d’agir. La situation est plus tendue au sein des milices où chacun craint des représailles pour sa famille. Le régime est vacillant. Sa situation est instable, mais tout tient encore car personne ne bouge. Cela est principalement dû au fait qu’en juin 2009, les Iraniens ont bougé, mais ils n’ont obtenu aucun soutien de la part des Etats démocratiques qui ont intérêt à préserver ce régime. Le facteur décisif pour un changement de régime est le soutien de l’Occident et plus particulièrement l’opinion occidentale. C’est pourquoi très récemment quand le Bazar s’est mis en grève, le régime, qui ne parle jamais de ses lapidations, a évoqué un cas de lapidation imminente pour détourner l’attention de l’opinion occidentale de ce qui pouvait être le début d’un soulèvement par le plus important corps organisé d’Iran. Les Occidentaux ont sauté sur l’occasion et ne parlent que de ça et jamais de l’état explosif de la société iranienne. Cette campagne très particulière est animée par des partisans notoires des Etats-Unis et quelques agents médiatiques du régime des mollahs, partisans de réformes et non d’un changement de régime. Ils sont présents pour réajuster le discours sur la nécessité des réformes et non d’un changement de régime ou encore pour se poser en porte-parole du peuple iranien. A l’autre bout de la chaîne, le régime a assuré le succès de cette campagne qui fait oublier la situation intérieure avec des rebondissements juridiques, ainsi que des annonces surmédiatisées de condamnations à mort à l’encontre de divers groupes sensibles comme les gays, les Bahaïs et les Chrétiens. Cela n’a pas plu aux animateurs occidentaux de la campagne car cela posait la nécessité du soutien à un changement de régime ce que les commanditaires occidentaux de cette campagne ne veulent en aucun cas. C’est ainsi que l’on n’a tout d’un coup plus entendu parler de ces infos qui avaient passé la grille de la censure silencieuse des Etats démocratiques de l’Occident. Ces condamnations étant de nature à faire craindre des pressions sur la communauté juive iranienne : on a même eu droit à un article sur la formidable vie des juifs sous le régime des mollahs. Le but étant de rester focalisé sur Sakineh pour ne pas parler de la situation explosive de l’intérieur ou réellement sauver des vies. Malgré ces précautions et les efforts pour rester focalisé sur Sakineh, cette campagne s’est essoufflée et les gens qui ne sont pas des robots ont fini par s’intéresser à l’Iran et à sa situation explosive. Il y a trois jours, ils étaient une cinquantaine à Paris, 12 à Londres ou encore 5 à Berlin pour s’intéresser à cette campagne, mais plus de 16,000 à lire notre lettre sur cette campagne. Après ces manifestations ratées, pour sauver cette campagne écran de fumée, Téhéran a annoncé deux autres sentences de lapidation à l’encontre d’un homme et une femme, Vali Janfeshani et Sarieh Ebadi, reconnus coupables de relations extraconjugales. Le couple était en prison à Ouromieh (Rezayieh) depuis 2008. Stupeur ! L’AFP qui est à l’affût de l’actualité iranienne n’a pas répercuté ces deux condamnations révoltantes. On n’a rien vu non plus sur le site des défenseurs de Sakineh car ces deux autres condamnations posent de manière plus explicite la nécessité du soutien à un changement de régime. Téhéran a vite compris le message : il a oublié les lapidations qui posaient problème à ses partenaires occidentaux, il a insulté Carla Bruni et eu la belle surprise que tous les médias rapportent ce fait. Des insultes sont certainement à leurs yeux plus graves que deux autres lapidations, la mise à mort d’un gay ou la pendaison des Iraniens convertis au christianisme. Il faut arrêter ces manipulations. Cela n’empêchera pas la chute du régime, mais cela provoquera une haine durable pour l’Occident. Arrêtez ceci. Arrêtez ceci. Sauvez des vies : Sakineh, mais aussi tous les autres et surtout les 70 millions d’Iraniens. Ils vous observent.
article complémentaire 1 :
article complémentaire 2 :
| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : France (diplomatie française) |
| Mots Clefs | Enjeux : Changement de régime |
© WWW.IRAN-RESIST.ORG
|