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Iran : Téhéran se prépare à une longue nuit américaine
17.08.2010

Les Six envisageaient de reprendre le dialogue avec les mollahs en vue d’un début de compromis sur la base d’un projet américain d’échange des réserves iraniennes d’uranium enrichi contre du carburant atomique franco-russe. Or, le régime des mollahs perdrait le soutien de la rue arabe s’il acceptait de s’aligner sur une proposition des Etats-Unis, ami et protecteur d’Israël. Pour faire échouer ce dialogue à risque, il a annoncé la décision de construire un nouveau site d’enrichissement d’uranium. | Décodages d’une provocation très intéressante |



Le régime des mollahs ne peut pas accepter un quelconque apaisement avec les Américains alors qu’il est sanctionné car il perdrait le soutien de la rue arabe. Il se retrouverait alors incapable de provoquer un conflit au Moyen-Orient et devrait s’incliner devant Washington en acceptant le partage du pouvoir avec les pions de Washington. Le dialogue est vu comme un piège mortel. Téhéran ne peut cependant le refuser clairement : il multiplie les provocations pour provoquer une escalade guerrière afin de pousser l’autre partie à abandonner.

Par le passé, il a utilisé des tirs de missiles accompagnés de slogans anti-israéliens pour provoquer cette escalade dissuasive, mais Washington qui a besoin des mollahs pour instrumentaliser les musulmans dans le sens de ses intérêts a ignoré ces provocations. Cette esquive, qui sous Obama a pris le nom de l’apaisement, a permis à Washington de mener une véritable guerre d’usure économique et psychologique à base de sanctions et de contrats autorisés mais annulés à la dernière minute pour briser lentement mais sûrement l’économie du régime, mais aussi le moral des mollahs pour les amener à demander grâce en acceptant ce dialogue qui équivaut à une capitulation.

Les mollahs n’ont pas cédé car ils ne veulent pas perdre leur mainmise sur l’économie iranienne. Pour continuer à résister, ils ont reporté la pression des sanctions sur la société et le peuple notamment en supprimant des aides alimentaires et en annonçant une suppression prochaine des produits à prix subventionnés, seul moteur de la consommation des ménages. Il s’agissait en fait de paupériser le peuple pour brider la consommation et empêcher des pénuries donc des émeutes.

Ce choix a provoqué la rupture des alliés intérieurs notamment les retraités, les plus jeunes bassidjis chargés de la sécurité intérieure et les Bazaris. Téhéran a désarmé les jeunes miliciens et il a incendié le Bazar. On a assisté à une vague de désertion chez les jeunes bassidjis et le Bazar qui avait été un artisan de la révolution a montré les dents en se lançant dans une grève générale à la première occasion qui lui a été offerte. A cette occasion, on a d’ailleurs constaté que le régime n’avait plus de troupes pour l’aider à intimider les Bazaris. Le régime a alors eu la certitude qu’il ne fallait pas trop titiller la milice en évoquant sans cesse la guerre dans le Golfe Persique. C’est pourquoi après plusieurs années de tirs de missiles insinuant la destruction d’Israël, des attaques contre les pays Arabes du Golfe Persique ou même une guerre contre les pétroliers, dernièrement il a changé l’axe de ses provocations en fixant des conditions irréalisables pour la tenue du dialogue.

Cette fois, Washington a censuré ces offres de dialogue conçues pour provoquer des conflits avant de renforcer sensiblement ses sanctions contre les mollahs. Le régime a encore déporté les pressions sur la société et le peuple. Dernièrement, le Bazar a commencé une grève générale sur le plan national et des miliciens quadra ont commencé à donner leur démission en masse au point que le régime a annoncé des poursuites contre les demandeurs de retraite anticipée pour trahison envers l’Etat, un délit passible de la peine de mort.

Affaibli sur tous les plans et proche d’un effondrement, incapable de provoquer une escalade avec « ses conditions » pour la reprise du dialogue, le régime est revenu à une ligne dure, mais suicidaire en annonçant des attaques contre les pétroliers, en promettant de nouvelles armes très destructrices et enfin pour la première fois depuis des années, il a oublié les insinuations pour dire clairement qu’il n’y aurait jamais de dialogue avec les Etats-Unis.

Washington a encore ignoré cette réponse et il a encore infligé quelques punitions économiques aux mollahs notamment une réduction des exportations d’essence qu’il avait autorisées avant de proposer le dialogue (la capitulation). L’essence est un produit essentiel pour les transports, mais aussi la production d’électricité. Washington pensait infléchir le régime car celui-ci avait déjà perdu 50% de sa capacité de production d’électricité avant cette réduction.

Hier, Téhéran a renouvelé sa réponse négative par la voix de Larijani. La figure montante du régime a déclaré dimanche que l’Iran et les Etats-Unis ne pouvaient pas entreprendre des négociations, car ils ne poursuivaient pas la même voie. Non seulement ce dernier a rappelé l’absence d’un terrain de dialogue, mais encore il a insisté sur la nécessité pour tous les responsables (miliciens et Bazaris) de « faire preuve d’unité et d’entonner le chant exaltant de la résistance ! » Accessoirement, en avance sur le programme de paupérisation pour brider la consommation, le régime a multiplié par 10 le prix de l’électricité et craignant une autre grève déstabilisante du Bazar, après une semaine de brimades contre les Bazaris, le régime a incendié la section des marchands de fruits et légumes, section connue pour ses capacités révolutionnaires.

Washington a encore esquivé le refus formulé par Larijani. Téhéran a été obligé de faire passer le message autrement : il a évoqué la construction d’un nouveau site d’enrichissement d’uranium au premier semestre 2011 dans le cadre du projet de construction d’au moins 10 nouveaux centres d’enrichissement !

Or, précédemment, Téhéran avait dit que ce mois d’août serait consacré à la présentation d’armes capables de lui donner une suprématie régionale absolue (contre les pétroliers). On peut donc considérer l’annonce d’un nouveau centre d’enrichissement comme une provocation moins importante que ce qu’il avait programmé.

Il est important de préciser que les mollahs avaient déjà annoncé la construction du premier de ces 10 centres d’enrichissement en novembre 2009 quand Washington leur avait proposé le dialogue sur la base de l’échange entre leurs réserves et du combustible franco-russe. C’est donc non seulement une provocation moins importante que prévue, mais aussi du réchauffé. Le régime aurait conclu qu’il était allé trop loin. Sachant que la partie adverse occidentale a esquivé toutes ses provocations et esquivera encore (ce qu’elle a fait entre temps [1]), le régime vient de reculer (dans la mesure du possible) pour garder des cartouches en prévision d’une longue nuit d’esquive internationale et d’insoumission interne qui l’attend.

© WWW.IRAN-RESIST.ORG
PS. | Avec les brimades contre le Bazar et la facture de l’électricité qui égale à présent le salaire d’un mois d’un instituteur, le régime risque l’explosion. Les Occidentaux qui s’attendaient à une entente et non à la disparition de cet allié utile ne communiquent pas sur le malaise social en Iran afin que le peuple iranien soit privé du soutien de l’opinion internationale. Ce refus de soutien accroîtra la détresse des Iraniens. Nous allons vers de l’inédit de la part du peuple et du régime.


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| Mots Clefs | Institutions : Provocations |
| Mots Clefs | Nucléaire : Politique Nucléaire des mollahs |
| Mots Clefs | Institutions : Diplomatie (selon les mollahs) |

| Mots Clefs | Instituions : Economie iranienne |

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Apaisement |

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[1La réaction américaine | Téhéran avait vu juste : personne ne veut admettre l’impossibilité d’une entente. Comme il y a un an après l’annonce de la construction du 1er site d’enrichissement d’uranium sur un ensemble de 10, Washington n’a rien dit et il a même tenté de sauver la situation en proposant par la voix de l’ambassadeur du Pakistan en Iran qu’il pouvait autoriser le contrat de pipeline Iran-Pakistan, un des éléments phares de sa guerre d’usure économique et psychologique (Source : Tehran Times).