Iran : La Vague Verte qui vient du Londonistan 22.03.2010 Washington doit parvenir à une entente parfaite avec les mollahs, c’est-à-dire les dominer pour les instrumentaliser pour agiter les musulmans de l’Asie Centrale contre la Chine. Il emploie à cette fin une politique double combinant des sanctions et des offres d’entente. S’il parvenait à ses fins, les mollahs perdraient leur pouvoir au sein de leur régime, c’est pourquoi ils ne laissent pas faire. Par ailleurs, la mainmise de Washington sur l’Iran et Asie Centrale nuirait aux intérêts pétroliers de nombreux pays dont la Grande-Bretagne. La semaine dernière, Washington a relancé le jeu en faisant une nouvelle offre indirecte à Téhéran. Cela a déclenché une réaction en chaîne au Londonistan… L’Iran est un pays extraordinaire, non seulement à cause de ses immenses réserves pétrolières, mais aussi en raison de son emplacement unique sur notre planète. Au XIXe siècle, les Britanniques en parlaient comme du centre du monde géopolitique. Un Iran stable est la clef de la stabilité de la région et un Iran instable ou divisé sera le foyer de la déstructuration de la région. C’est pour cette raison qu’en milieu des années 70 Washington a choisi ce pays pour y implanter une république islamo-fédéralistes exportatrice de sa révolution. Il voulait exploser l’Iran pour déteindre sur son voisin du Nord, l’Union Soviétique. Il espérait que l’onde de choc ébranlerait l’Ouest musulman de la Chine et qu’ainsi il pourrait détruire ses deux grands adversaires de l’intérieur après les avoir endormis avec un plan de détente sous Nixon. La décision du Chah de ne plus renouveler en 1979 le contrat pétrolier liant son pays au Consortium comprenant les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France et la Hollande a déterminé la date de la révolution. Washington s’est ainsi adjugé le soutien de la France et de la Grande-Bretagne. Ces projets à très longs termes de Washington ont échoué car pour mener à bien sa révolution islamique, l’Etat américain a dû associer ses pions islamo-fédéralistes aux mollahs qui possédaient une base sociale plus importante et aurait pu bloquer cette révolution islamique qui empiétait sur leur domaine. Les mollahs ont joué le rôle des catalyseurs que Washington leur imposait pour lui permettre d’abattre la monarchie et installer au pouvoir ses pions islamo-fédéralistes avant de bouleverser ce nouvel ordre en novembre 1979 avec la prise de l’ambassade américaine et la révélation des dossiers concernant les aides financières octroyées par Washington aux nouveaux maîtres de Téhéran. Depuis ce 4 novembre 1979, Washington fait tout pour reprendre le contrôle de cette république islamique qui devait être au service de ses intérêts stratégiques et dans le même temps tous ceux qui souffriraient de ce succès stratégique et pétrolier aident indirectement les mollahs. En novembre 79, en tête de liste de ces alliés de facto des mollahs, se trouvaient les Russes, les premières victimes désignées de la déstabilisation de l’Iran, puis la Grande-Bretagne et la France, Etats qui avaient aidé Washington à renverser le Chah pour renouveler leurs contrats, sans se douter qu’ils allaient se retrouver avec un Iran instable impropre à tout investissement. La France a vite quitté ce trio car elle s’est retrouvée en conflit avec les mollahs dans l’affaire Eurodif. Elle a laissé le marché iranien aux Russes et aux Britanniques, déjà maîtres du destin de l’Iran au XIXe siècle. Trente ans après en 2010, l’Asie Centrale est devenue indépendante, mais reste liée à la Russie et à la Chine. De fait, ces deux pays craignent toujours les efforts américains pour la reprise en main du régime des mollahs. Par ailleurs, la Grande-Bretagne est encore la première puissance pétrolière mondiale, c’est pourquoi elle doit également continuer à contrer les efforts américains. Entre temps la France a renoué de bonnes relations avec Téhéran et de ce fait, elle doit contrer Washington pour éviter un changement de régime synonyme de la fin de ses contrats en Iran. L’Europe est aussi entrée dans le jeu pour éviter un quelconque changement de régime dans le sens attendu par Washington. La Chine s’est également intégrée pour la même raison. Face à ce front difforme d’opposition à ses efforts, Washington a inventé le prétexte nucléaire pour contraindre ces Etats à soutenir ses pressions contre les mollahs. Il a ainsi mis en place une batterie de sanctions contre ces derniers avant de leur proposer régulièrement la fin de ces pressions en échange d’une réconciliation entre les deux pays, une manière de faciliter le retour de ses pions dans l’arène politique iranienne pour prendre le pouvoir de l’intérieur. Les mollahs ont refusé et sachant qu’ils étaient face à une version plus musclée de la guerre d’usure menée par Washington depuis 30 ans, ils ont immédiatement opté pour une politique extrémiste à base de provocations pour entraîner Washington dans une escalade guerrière rapide afin qu’une menace pour l’approvisionnement pétrolier mondial le fasse capituler. Washington a toujours évité cette escalade tactique en esquivant les provocations des mollahs pour rester dans sa tactique de guerre d’usure qui lui permet d’affaiblir de jour en jour les mollahs afin de renouveler son offre empoisonnée de réconciliation. Pour neutraliser cette approche tordue, l’Europe, la Russie, la France ou encore la Chine ont joué à fond la carte du dialogue et non des pressions. La Grande-Bretagne s’est distinguée d’eux en faisant état via son représentant à l’AIEA qu’il existait des preuves établissant la nature militaire du programme nucléaire iranien pour entraîner Washington dans une escalade vis-à-vis de Téhéran et l’éloigner ainsi de toute entente. Washington ne s’est pas laissé perturber par les rapports établis par El Baradai sur la base des documents britanniques et a continué sa guerre d’usure contre Téhéran pour le forcer à accepter sa proposition de réconciliation conçue pour permettre le retour de ses pions dans l’arène politique iranienne. Cette réconciliation étant la promesse d’une révolution de couleur en faveur des pions islamo-fédéralistes de Washington, en juin dernier, Téhéran a anticipé ce projet en organisant sa propre révolution de couleur avec le Mouvement Vert qui contestait l’élection d’Ahmadinejad. Rétrospectivement, il est presque certain que le projet lui a été soufflé par Washington pour l’engager dans un processus incontrôlable susceptible de nécessiter un référendum sur la nature du régime, ce qui est un des vieux projets américains pour l’Iran. Sans se soucier de cette paternité américaine douteuse, la Grande-Bretagne a immédiatement soutenu les Verts iraniens (ceux de Moussai pour préserver le régime) et non ceux de Washington pour introduire un processus de transition. Un second front a été ainsi ouvert entre Londres et Washington. Les deux processus, sauver le régime ou réaliser une transition, sont devenus urgents quand récemment Washington a réalisé que le régime des mollahs était trop affaibli et qu’en conséquence, il devait éviter de nouvelles sanctions pour ne pas précipiter sa chute qui serait synonyme de la fin de tous les projets américains d’agitation régionale. Pour éviter l’adoption de nouvelles sanctions, Washington a changé de priorité : il a oublié les sanctions unilatérales pour demander des sanctions onusiennes à l’unanimité avant d’évoquer la réticence de ses alliés mineurs comme le Brésil, la Turquie et dernièrement le Liban ! La Grande-Bretagne a alors annoncé le retrait de ses compagnies qui livrent de l’essence à l’Iran pour contredire Washington et l’engager dans une escalade de sanctions vis-à-vis de Téhéran. Elle est ainsi allée très loin car il a de facto imposé un embargo unilatéral contre Téhéran le privant de 60% de ses besoins en carburant accélérant une chute annoncée qui n’est pourtant pas dans ses intérêts. Washington a boycotté la nouvelle, mais craignant un effondrement du régime ainsi affaibli, le 17 mars dernier, il a fait un geste très fort en direction des mollahs en débloquant partiellement ses pressions qui empêchent l’Inde et le Pakistan à signer l’accord pour la construction du gazoduc Iran-Pakistan-Inde d’une valeur de 7,6 milliards de dollars pour Téhéran. Sous ses pressions, l’Inde faisait état d’une mésentente avec le Pakistan et le Pakistan évoquait un manque de financement. Mais le mardi 17 mars, ce dernier a comme par magie trouvé les fonds nécessaires pour signer sur le sol turc un accord avec Téhéran pour la construction d’un gazoduc reliant le gisement géant de South Pars à la région pakistanaise de Sindh qui est collée à l’Inde. Le même jour Washington a exprimé le souhait que l’Inde et le Pakistan puissent résoudre leur problème, insinuant ainsi qu’il pouvait autoriser aussi l’Inde à signer déversant des flots de dollars dans l’économie exsangue des mollahs. Cela a agacé Londres car il était à l’origine d’un affaiblissement de Téhéran qui a permis à Washington de lui faire d’une offre alléchante susceptible de convenir aux mollahs : il a estimé qu’il ne pouvait pas tenter une opération similaire à son embargo unilatéral. Il devait revenir à son approche initiale qui consiste à soutenir les mollahs et entraîner Washington dans une escalade en évoquant la menace militaire que représentent les mollahs. Dans une révolution à 180°, il a donc décidé de renforcer la seule arme efficace des mollahs, c’est-à-dire le Mouvement Vert de Moussavi, en tentant de neutraliser son concurrent américain mené par Sazgara. Pour cela il lui a collé dans les pattes, son propre Mouvement Vert, à savoir la Vague Verte qui est menée tambour battant Amir Jahanchahi, un lobbyiste du régime des mollahs et Mehrdad Khonsari, un opposant notoirement anglophile basé à Londres, qui a travaillé avec Sazgara sur son projet de référendum. Depuis le 18 mars, c’est-à-dire le lendemain de la signature de l’accord du gazoduc, les deux hommes se pavanent dans tous les médias sauf les médias américains pour vendre leur soupe à savoir une transition comme le modèle américain, mais qui garderait tous les gens du régime aussi bien Moussavi et Karroubi qui siègent au Conseil de Discernement, mais aussi les Pasdaran. Il s’agit donc d’une relookage du régime des mollahs plus qu’une transition. Dans le même temps pendant que Barak faisait les yeux doux aux mollahs, Londres est passé à l’offensive anti-entente irano-américaine avec la charmante attention de diffuser sur sa chaîne publique Channel 4 un long documentaire très détaillé sur les armes fournies par les Pasdaran aux Talibans en zoomant lourdement sur les logos iraniens des mines qui tuent les jeunes Américains.
| Mots Clefs | Pays : Grande-Bretagne |
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