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Iran : La semaine en images n°108 14.03.2010 Dimanche prochain, le 21 mars, les Iraniens fêteront l’arrivée du printemps et le nouvel an perse. La période doit être propice à la joie et aux retrouvailles en famille, mais ce n’est pas le cas car depuis des mois, l’économie iranienne croule sous le poids des sanctions américaines. Le régime qui manque de devises pour approvisionner le marché a supprimé les aides en nature par des aides en liquide dénuées de valeur avec l’inflation à 60% et s’apprête à supprimer les prix subventionnés tout en gelant les salaires pour brider la consommation et éviter les risques de pénuries sources d’une révolte qu’il ne pourrait pas réprimer car tout le monde y compris les miliciens sont concernés. Le régime a même peur que les jeunes bassidjis retournent leurs armes contre lui, c’est pourquoi il leur a retiré leurs armes en novembre dernier. Dans ce contexte tendu, à la veille du nouvel an, le seuil de la pauvreté a atteint les 1200 dollars par mois ce qui est 4 à 6 fois supérieur aux revenus les plus courants. Les prix sont élevés, les allés des marchés sont vides, l’ambiance est morose, mais on est aussi inquiet pour l’avenir car les mollahs ne cèderont pas, ce qui sous-entend la poursuite de la guerre économique de Washington, c’est-à-dire des difficultés grandissantes. On voit très bien cette inquiétude sur les images de la semaine passée qui fut comme d’habitude marquée par les navrantes et incessantes provocations de dirigeants insensibles à la détresse des Iraniens. le contexte international | La détresse des Iraniens est en fait double car ils ont compris cette année que Washington n’avait aucune intention de les sauver des mollahs, mais cherchait au contraire à éviter leur chute car il a besoin d’eux pour avoir les musulmans séduits par leurs slogans dans son camp. En effet, pour renforcer sa puissance économique, Washington doit dominer le marché pétrolier. Ainsi il pourra fixer les prix et affaiblir ses adversaires économiques. Par un hasard inconnu – une malédiction-, la majorité des régions pétrolières sont habitées par des musulmans qui sont dans l’ensemble fascinés par les mollahs. Une entente avec les mollahs est donc nécessaire pour mener cette politique de domination pétrolière. Cela nécessite cependant la pleine coopération des mollahs, ce qui est impossible tant que ces derniers disposent de moyens de pression anti-américain comme le Hezbollah, c’est pourquoi Washington mène à leur encontre une guerre d’usure économique, pour les affaiblir mais sans les renverser, afin de les contraindre à se défaire de leurs moyens de pression. Il leur demande aussi de se démocratiser, un moyen pour permettre à ses pions de prendre le pouvoir de l’intérieur pour lui procurer un Etat islamique conforme à ses objectifs, où les mollahs ne seraient que des distributeurs de fatwas. C’est pourquoi, même économiquement aux abois et défaits par la guerre d’usure, les mollahs refusent de céder. En fait, incapables de résister, ils multiplient les provocations pour encourager une escalade guerrière afin que la peur d’un risque pour l’approvisionnement pétrolier ne force les Européens à se retourner contre Washington ou à défaut se rendre antipathiques et ainsi rendre cette entente empoisonnée politiquement incorrecte. Dimanche, un missile | Dans ce contexte sans issue qui désole surtout les Iraniens, la semaine a commencé avec presque une routine : des déclarations fortement anti-américaines d’Ahmadinejad : une remise en cause du rôle d’Al Qaeda dans les attentats du 11 septembre. En fait, déçu par son incapacité à provoquer une escalade guerrière dans le golfe Persique via des provocations riches en insinuations, Téhéran avait décidé de jouer la carte de l’antipathie. Quelques jours plus tôt le régime avait reçu à Téhéran les leaders du monde islamique, il espérait générer un débat polémique planétaire. Ainsi à défaut d’une escalade guerrière esquivée par Washington et ses alliés atlantistes, Téhéran aurait engagé Washington dans une escalade verbale où il aurait pu placer ses menaces de frappes contre les pétroliers… Cette tentative a été un échec car il n’y a eu aucune répercussion sur les médias ou encore sur le net. On peut à présent penser qu’il y a eu aussi des blocages, mais peu importe, Téhéran n’a pas eu ce qu’il voulait, c’est-à-dire une escalade. Il a immédiatement mesuré les conséquences de son échec en revenant à sa stratégie de base et en annonçant dès le lendemain, c’est-à-dire le dimanche 7 mars, l’entrée en service d’un missile 100% iranien de type Cruise, le NASR 1, au sujet duquel le régime précisait qu’il avait été conçu pour couler des navires de 3000 tonnes (unité de mesure non métrique équivalent à 2,83m3). Quand un missile revendiqué comme 100% iranien a un nom arabe qui signifie victoire, il est évident qu’il veut conquérir le cœur de la rue arabe, allié indispensable des slogans et des polémiques des mollahs. Pour informer cet allié très enthousiaste, le régime des mollahs a envoyé des images de son missile victorieux à toute la presse internationale pour montrer cette merveille en train d’être montée sur la chaîne de montage dans une usine iranienne.
lundi, bain de foule pour un malpropre | Privé des effets anxiogènes de son missile arabo-chinois, le régime a décidé de riposter par une nouvelle tentative de polémique verbale (susceptible de déboucher sur une escalade guerrière) lors du voyage d’Ahmadinejad à Kaboul programmé pendant la visite de Robert Gates dans cette ville. Supposant à juste titre, un possible scandale d’Ahmadinejad, les Afghans ont reculé de quelques jours la visite. Le régime qui a pris cela pour un affront a prétendu qu’il avait lui-même déplacé la date parce que le président était attendu dans le sud du pays dans la région d’Hormozgan et pour confirmer cette hypothèse, il a diffusé des images de foules rieuses l’accueillant à bras ouverts.
A l’occasion du voyage d’Ahmadinejad à Hormozgan, la surprise est venue de l’agence ISNA, dont les photographes ne font jamais usage de Photoshop a publié sa version de la journée : il n’est plus question de foules imposantes, mais de quelques centaines de personnes. On y voit ces pauvres qui viennent autour des cortèges dans l’espoir d’un repas chaud. Pour expliquer leur participation, cette agence dont nous saluons les photographes a publié des photos de conditions de vie dans la région de Hormozgan.
Mais Téhéran est également très dépendant du gaz étranger pour ses besoins domestiques : le transport, le chauffage et aussi l’alimentation des centrales de production d’électricité. Soupçonnant un revirement de la politique américaine, Téhéran a aussi diminué la distribution du gaz destiné aux automobilistes, provoquant des queues interminables, les Iraniens se sont rué sur les bonbonnes de gaz !
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