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Iran : La semaine en images n°91 15.11.2009 Cette semaine, le monde n’en a pas fini d’attendre la réponse des mollahs à l’offre américaine d’un échange de leur stock d’uranium enrichi contre du combustible nucléaire franco-russe. Au lieu de les punir pour cette attitude, Washington met un point d’honneur à les choyer : cette semaine, il a demandé à son allié turc de donner une place de choix à Ahmadinejad pendant la conférence économique des pays musulmans. Pour continuer ces manœuvres qui lui donne l’occasion de fanfaronner, le régime des mollahs prétend qu’une réponse est impossible en raison d’une querelle entre le président de la république Ahmadinejad et le président de l’Assemblée Larijani. Les images nous racontent une autre histoire. le topo | Les semaines passent et on a l’impression de revivre les mêmes évènements. Ce qui est tout à fait normal puisque les choses n’évoluent pas : il y a d’un côté Washington, qui a besoin d’une entente avec les mollahs pour accéder à l’Asie centrale et pour aussi utiliser leur savoir faire afin d’agiter la région musulmane de la Chine et de l’autre les mollahs, qui ne peuvent pas accepter cette entente car elle suppose une démocratisation de leur régime qui serait fatale à leurs privilèges. D’une semaine à l’autre, Washington continue à les sanctionner à petite dose pour les affaiblir afin qu’ils acceptent ses offres de négociations (reddition) et d’une semaine à l’autre, ces derniers doivent résister sans céder. Connaissant leurs limites, ils ont d’ailleurs dès le début opté pour une politique de confrontation en sachant que, traumatisés par l’Irak et l’Afghanistan, les Américains reculeraient face à la menace d’une nouvelle guerre. D’une semaine à l’autre, Téhéran joue sur le flou quant à sa décision en faisant valoir des dissensions internes et profite du délai pour essayer de nouvelles provocations. La tâche lui est facilitée par les Américains qui dans le cadre de leur politique d’entente leur tendent la main ou leur proposent des rendez-vous pour renouer le dialogue (directement ou via ses alliés régionaux). le grand bachibouzouk | La semaine dernière, le rendez-vous avait lieu en Iran avec la visite à Téhéran d’un grand allié des Etats-Unis, le Premier Ministre turc, qui arriva accompagné d’une forte délégation d’hommes d’affaires turcs prêts à investir d’énormes capitaux pour sauver l’économie iranienne. Téhéran n’a pas accepté l’offre d’un compromis sur son stock d’uranium contre des investissements et la délégation a quitté l’Iran sans faire de bruit. Cette semaine, le rendez-vous était en Turquie. Pour obtenir ce qui n’a pas été possible une semaine plus tôt, Washington a demandé à ses amis musulmans de faire une place de choix au représentant légal du régime des mollahs : Mahmoud Ahmadinejad. Le mauvais élève du monde musulman a été placé à côté de l’hôte turc de la conférence devant les représentants des Etats Arabes, alliés stratégiques de Washington dans le monde du pétrole. Dans le même temps, Obama annonçait qu’il voulait une entente cordiale basée sur le respect mutuel et Hillary Clinton a répété le message pour confirmer la grande disponibilité des Etats-Unis à faire un effort.
Cette semaine était en quelque sorte celle de cette Assemblée puisqu’elle a aussi fait entendre son mécontentement à propos de la possibilité d’un accord sur l’échange du stock iranien d’uranium contre du combustible franco-russe. Ce refus a d’abord été exprimé par Boroudjerdi, le chef de la commission des affaires étrangères, qui a remis en cause la fiabilité de la Russie puis par Larijani, le président de l’Assemblée, qui remet en cause l’accord dans sa totalité en raison, nous dit-on, d’une vieille mésentente avec le président Ahmadinejad. Il serait jaloux de lui ! Tout cela est évidemment du cinéma. Car parallèlement à sa fonction de président du Parlement, Larijani siège depuis 20 ans au Conseil de Discernement. Il est au conseil d’administration du régime. Il est le chef d’Ahmadinejad ! Un PDG ne peut être jaloux d’un sous-directeur ! Mais Téhéran joue cette comédie pour donner une raison valable à sa politique de flou nécessaire pour amplifier la crise. Précisons au passage que Moussavi et Karroubi, qui font office d’opposants, font également partie du Conseil de Discernement qui est dirigé depuis 20 ans par un autre soi-disant modéré, Rafsandjani. Les différents interlocuteurs des mollahs, en particulier les Américains, ne parlent jamais de ce cabinet noir et permanent du régime car ils devraient alors conclure à une absence de volonté d’apaisement. Ils préfèrent parler de divisions internes pour donner une raison valable au retard de réponse des mollahs et, de facto, une raison valable à leur absence de sanctions plus fortes. Cette version leur convient aussi car elle peut servir de preuve de l’existence d’une démocratie chez les mollahs pour vendre l’entente aux Américains sceptiques. Les photos des deux hommes racontent une autre histoire : quand un photographe est devant eux, ils se boudent, mais quand ils ne voient pas les caméras, ils se dérident !
La semaine dernière, le régime a mesuré le niveau de la démobilisation par le nombre limité de participants à la manifestation de commémoration de la prise de l’ambassade américaine. Le régime a aussi désormais un problème avec ses jeunes miliciens qui sont d’origine modeste car leurs familles sont touchées. Il en résulte une peur de les faire défiler en armes dans les rues au risque d’une insurrection à la roumaine (contre Ceausescu). Nous avions fait remarquer ce fait dans notre émission hebdomadaire diffusée en Iran sur Radio Toloo et qui y a une large écoute. Le régime qui est très sensible au contenu de cette radio a cru bon de nous donner la preuve du contraire avec l’annonce de grandes manœuvres urbaines de la milice dans la région agitée de Sistan- Baloutchistan. Il n’y a pas eu de photos pour prouver cette nouvelle, mais des images d’une manoeuvre de la milice dans une autre région frontalière : le Khouezstan. C’est à pleurer !
Le peuple ose. Le courage lui vient du fait qu’il se passe des choses à la tombée de la nuit (mais pas seulement) : on colle les photos de Reza Pahlavi sur les murs avec ce texte : « Cet homme n’est pas avide du pouvoir, il a laissé sa tranquillité pour nous rendre une vie digne, cet amoureux de la liberté nous aide, aidons-le. »
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