Iran - EU : L’heure des choix 06.11.2009 Comme l’a rappelé cette semaine Obama, les Etats-Unis veulent parvenir à une entente avec les mollahs. L’objet de cette entente est la maîtrise territoriale, énergétique et politique de l’Asie Centrale, une région pétrolière qui compte pour beaucoup dans les économies russe et chinoise. En échange de cette alliance décisive, les mollahs exigent l’abandon des sanctions contre le Hezbollah et l’abandon des demandes américaines de sa démilitarisation pour avoir un mécanisme de représailles contre Israël en cas de désaccord avec Washington. Cette demande étant évidemment irrecevable, Washington mène vis-à-vis des mollahs une politique d’intimidations, de sanctions économiques et de déstabilisation régionale combinée à des offres régulières de reprise de dialogue. Cette semaine, Washington a mené des actions qui illustrent à la perfection les différents volets de cette politique. Le maître mot de cette politique d’intimidations, de sanctions économiques et de déstabilisation régionale combinée à des offres régulières de reprise de dialogue est que la porte reste toujours ouverte au cas où Téhéran réviserait ses exigences. Cette révision est cependant peu probable car ce qui fait peur aux mollahs est surtout un réchauffement des relations entre les deux pays. Ce réchauffement se solderait par la réouverture d’une ambassade à Téhéran et le retour au pays des « islamistes pro-américains » qui n’auront aucun mal à s’imposer dans des élections en Iran et pourront remettre cette révolution menée avec l’aide des Etats-Unis dans le droit chemin de son scénario initial. Les mollahs perdront alors le pouvoir et l’argent qui va avec. Ce qu’ils excluent en cherchant divers scénarii pour provoquer une nouvelle crise entre les deux pays. L’un des axes de cette politique de refus de tout apaisement est de faire des ingérences dans les zones sensibles pour les Etats-Unis (comme actuellement au Yémen, pays voisin de l’Arabie Saoudite et territoire dominant la corne de l’Afrique) et l’autre axe est de simuler une crise de gouvernance interne pour remettre en cause la légitimité du président élu afin de priver les Six de leur interlocuteur officiel. Cette attitude de refus permanent de tout apaisement a exaspéré Washington. Pressé d’accéder à l’Asie Centrale, Washington a récemment évoqué un renforcement important des sanctions contre Téhéran. Il a alors fait adopter par la Chambre des représentants la mise en place d’un embargo sur l’importation de carburant par l’Iran. Mais avant de la faire approuver par le congrès, Washington a réalisé que le degré de dépendance de l’Iran à l’égard du carburant importé était très élevé et que cette sanction pourrait renverser le régime dont il a besoin pour maîtriser le désordre idéologique islamiste dans l’Asie Centrale musulmane. C’est pourquoi il a ralenti les débats sur l’embargo de carburant pour un enchaînement de mesures moins fortes. 1 | Washington a fait le tour des options possibles et a fixé son choix sur des sanctions contre la First East Export Bank, filiale malaisienne de la Bank Mellat, établissement iranien déjà boycotté par les Etats-Unis. Cette sanction est certes une mesure palliative, mais elle est loin d’être sans importance car la First East Export Bank avait justement été créée en décembre 2008 dans la zone franche malaisienne par la Banque Centrale Iranienne pour permettre aux mollahs de contourner les sanctions qui frappaient la Bank Mellat, actionnaire de la banque Iran-Europe (IEHB), établissement chargé de financer les importations iraniennes. Cela veut dire que Washington arrive au bout du processus des sanctions molles. 2 | C’est ce qui explique la seconde action de cette semaine menée en collaboration avec Israël. L’Etat hébreu, le plus important allié régional des Etats-Unis, a annoncé l’interception d’une cargaison maritime iranienne de missiles destinée au Hezbollah en violation de la résolution 1701 du Conseil de Sécurité interdisant la vente d’armes à cet organisme. Quelle que soit l’authenticité de la prise, il a ainsi ouvert la voie à de nouvelles sanctions contre Téhéran, notamment contre IRISL (Islamic Republic of Iran Shipping Lines), organe de fret chargé de toutes les importations iraniennes, organe déjà dans l’œil du cyclone de possibles sanctions unilatérales européennes. Washington pourrait remplacer le renforcement des sanctions bancaires par des restrictions de transports maritimes ou aériens. 3 | Parallèlement à ces deux premières actions liées au domaine économique, Washington a aussi mené une action de déstabilisation régionale via un autre important allié régional, l’Egypte. Ce dernier a interdit la diffusion de la chaîne iranienne arabophone d’Al Alam hébergée par les satellites Arabsat et Nilesat. Il a ainsi privé les mollahs de l’instrument de base de leur rôle régional : la propagande destinée à retourner les Arabes contre leurs gouvernements pro-américains. 4 | Conformément à sa politique de sanctions combinée à des offres de reprises de dialogue, après ces trois coups de poings dans le ventre, Washington a encore dépêché en Iran un autre allié poids lourd, l’Emir du Qatar. Il a aussi envoyé un message d’apaisement aux mollahs via Obama : « vous êtes à un tournant ! » On est tenté de dire que les Etats-Unis aussi ! Si Téhéran refuse cette main tendue, Washington devra passer à un niveau supérieur de sanctions au détriment de ses propres objectifs.
| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Rôle régional de l’Iran |
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