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Iran : Les comptes sont dans le rouge d’après Eurostat
10.09.2009

Pour forcer Téhéran à cesser ses activités nucléaires, les Américains ont mis en place en septembre 2006 des sanctions interdisant à leurs partenaires financiers ou commerciaux d’investir en Iran. Ces sanctions ont lourdement pénalisé l’économie iranienne. En l’absence d’une riposte, elles ont aussi prouvé l’absence de capacité de nuisance de Téhéran. C’est pourquoi Téhéran a mis en place un réseau de lobbying pour créer des îlots de résistance aux sanctions dans les milieux d’affaires européens. Les chiffres des échanges commerciaux irano-européens en 2008 et 2009 font état de baisses alarmantes qui montrent l’échec de ce lobbying.



Dans moins de 2 semaines, le régime des mollahs doit rassurer la communauté internationale (les Six) qui s’inquiète du risque de prolifération en annonçant l’arrêt de ses activités nucléaires ou en acceptant de s’asseoir à la table des négociations des Six pour esquisser un apaisement avec les Etats-Unis. Si Téhéran n’accepte pas de suspendre ses activités nucléaires ou de démarrer des négociations, les Six le menacent d’augmenter leurs sanctions économiques à son encontre.

On peut d’ores et déjà tabler sur un refus catégorique de Téhéran non pas parce que les sanctions seraient inefficaces, mais parce que cet apaisement indispensable au processus est incompatible avec leur stratégie régionale basée sur l’usage de menaces terroristes à l’encontre d’Israël et ses alliés. Accepter de négocier par peur des sanctions serait synonyme que ces promesses de djihad, ces menaces dissuasives ont toujours été du vent ! Le régime perdrait d’un seul coup sa capacité d’intimidation ainsi que le soutien de la rue arabe et de ses alliés anti-américains qui apprécient cette capacité : en acceptant de négocier sous l’effet des sanctions, il perdrait tout.

On peut affirmer que le régime a depuis toujours su qu’il n’avait pas d’autres choix que de refuser tout apaisement et aussi su que cette conduite l’exposerait à toujours plus de sanctions à la fois pénalisantes pour son économie, mais aussi nuisibles pour ses prétentions de capacités de nuisance. C’est pourquoi, il a très vite mis en place des réseaux de lobbying de soi-disant experts économistes pour neutraliser ces sanctions doublement dangereuses.

Le régime a publié des revues en Français ou en Anglais et a organisé des séminaires adressés aux investisseurs européens où ces experts évoquaient le formidable échec des sanctions à venir en raison de l’incroyable vitalité de l’économie iranienne. Par la suite, le discours a changé et ces mêmes experts parlaient de la croissance iranienne en assurant leurs interlocuteurs qu’ils étaient en train de laisser de formidables marchés très rentables à des camarades d’autres pays européens.

En fait, Téhéran ne visait pas les portefeuilles des petits investisseurs démarchés. Il cherchait à mettre en place une protestation des milieux d’affaires européens contre le processus américain de sanctions, d’où une certaine drague intensive en direction des souverainistes français (que nous ne mettons pas en cause). L’objet de ces démarches était aussi bien économique que politique puisque l’on voulait neutraliser ces sanctions conçues pour dévaloriser les mollahs auprès de leurs alliés.

Pour toucher un public plus vaste, l’opinion anti-américaine des pays d’Europe, les mêmes experts ont aussi écumé les plateaux télé pour réciter les mêmes chiffres et les mêmes arguments de croissance en concluant à chaque fois que les sanctions économiques étaient inopérantes et qu’il fallait en conséquence changer de politique pour dialoguer avec l’Iran, mais sans la menace des sanctions.

Téhéran avait vu juste, mais il doit admettre que sa défense était encore du vent. Les chiffres des échanges commerciaux irano-européens en 2008 et 2009, publiés par EuroStat et repris par le principal quotidien économique iranien Sarmayeh (capital), font état de baisses alarmantes sur les 10 principaux partenaires européens de l’Iran.

Les exportations des produits iraniens (pétrole ou gaz compris) vers l’Europe ont enregistré une baisse de 45% en moyenne. L’Italie qui était le premier acheteur de produits iraniens a diminué ses achats de 1901 millions d’euros à 811 millions d’euros soit une baisse de 58% qui la rétrograde à la seconde place des meilleurs acheteurs de produits iraniens. Avec 884 millions d’euros, l’Espagne devient 1ère du classement malgré une baisse de 38% de ses échanges avec l’Iran.

Les suivants du classement sont : les Pays-Bas avec 690 M€ (soit -53%) à la 3e place, la France avec 395 M€ (soit -59%) à la 4e place, l’Allemagne avec 126 M€ (soit -32%) à la 5e place, la Grèce avec 79 M€ (soit -55%) à la 6e place, le Portugal avec 73 M€ (soit -85%) à 7e place, la Belgique avec 71 M€ (soit -24%) à la 8e place, la Grande-Bretagne avec 60 M€ (soit +13% [1]) à la 9e place et l’Autriche avec 31 M€ (soit -66%) à la 10e place.

Les échanges ont également enregistré des baisses dans le sens inverse. Au premier semestre de 2009, l’Iran a importé pour 1627 M€ de produits d’Allemagne, soit 25% de moins qu’en 2008 (baisse due à la réduction des garanties à l’exportation).

On dénote également une disparité de baisses dans les exportations et les importations, mais aussi dans les dépenses et revenus qui font état d’un déficit. L’Iran a non seulement perdu des clients en 2009, mais il s’est aussi endetté.

La tendance est visible dans les échanges avec d’autres partenaires européens (sauf pour la Belgique avec 199 M€ soit +11%). L’Italie occupe la seconde place avec 894 M€ (soit une baisse de 15% par rapport à 2008) et la France est 3e avec 775 M€ (soit -10%).

Suivent de la 4e à la 10e place : les Pays-Bas avec 266 M€ (soit -16%), la Grande-Bretagne avec 219 M€ (soit -14%), l’Espagne 179 avec M€ (soit -21%), la Pologne avec 50 M€, le Danemark avec 49 M€ et la Roumanie avec 45 M€.

Au cours du 1er semestre de cette année, Téhéran a au total dépensé 4303 M€ (au lieu de 4800 M€ en 2008) pour gagner seulement 3220 M€ (au lieu de 6500 M€ en 2008). On comprend pourquoi les Européens continuent à vouloir sauver ce régime en parlant de ses « modérés ».

Évidemment, ce ne sont pas les seuls revenus ou pertes de l’Iran car ce pays a aussi d’importants échanges avec la Chine, mais d’après nos estimations en 2008 avec environ 8 milliards de dollars d’export et autant d’importation chinoise, la balance ne penchait franchement pas en sa faveur. Téhéran a aussi un autre partenaire économique : les Emirats Arabes Unis qui sont exclusivement une plateforme pour acheter des produits prohibés par les sanctions. Les échanges entre l’Iran et l’extérieur qui étaient à peine rentables sont devenus franchement déficitaires depuis cette année par la faute des sanctions bancaires américaines.

Résultats : en manque de devises, Téhéran ne paye plus ses petites factures (de quelques millions d’euros). Rien qui puisse rassurer les suivants sur la liste. Avec un tel comportement, les affaires risquent d’aller plus mal encore sans parler de l’impact de l’instabilité politique et des manifestations qui ont failli emporter le régime.

Sur le plan intérieur, ce déficit prend la forme de pénuries. Résultats : les prix montent et avec l’envie de protester. Comme à son habitude, le régime distribue des paniers de produits de base (sucre, thé, beurre..) et de l’argent sous forme de prime, ce qui l’oblige à importer des produits bon marché et bas de gamme et à faire marcher la planche à billets. Il continue ainsi à nuire aux producteurs locaux et à faire augmenter l’inflation. C’est un cercle infernal. D’après nos contacts au bazar, l’inflation dépasse les 60%. C’est d’ailleurs ce qui motive la publication de l’article : la crise économique interne a atteint une ampleur que l’on ne peut plus cacher.


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| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |
| Mots Clefs | Instituions : Politique Economique des mollahs |

| Mots Clefs | Résistance : Lobby pro-mollahs en France et ailleurs |
| Mots Clefs | Décideurs : Analystes & Experts |

| Mots Clefs | Enjeux : Intérêts Européens en Iran |
| Mots Clefs | Pays : Europe (UE, UE3, union européenne) |

[1Seule la Grande-Bretagne, alliée occulte des mollahs, a augmenté de 13% son niveau de commerce avec l’Iran. Cependant, la Grande-Bretagne fait ses principales transactions avec l’Iran en mode invisible en passant par les Emirats, on ne peut donc pas connaître la véritable hausse du chiffre des échanges entre les mollahs et les Windsor.
| Mots Clefs | Pays : Grande-Bretagne |
| Mots Clefs | Pays : Emirats Arabes Unis |