Hier, la chaîne d’info France 24 a consacré un sujet aux sanctions bancaires américaines à l’encontre des partenaires économiques de l’Iran. Cependant, le ton du reportage n’était pas à l’information mais à la complainte. Le reportage a été suivi par un débat avec un expert sur l’Iran. Cet expert n’était autre que Thierry Coville, un des lobbyistes notoires du régime des mollahs, qui depuis des années affirme qu’il ne faut pas sanctionner Téhéran car cela est sans effet sur l’économie iranienne, un avis contredit par le classement des pays à risques de l’OCDE. Il y a quelques mois, dans un entretien accordé à un quotidien du régime, Seyd-Kamal Seyd-Ali, le directeur de la société iranienne de l’assurance à l’exportation a même reconnu les effets nuisibles de ces sanctions sur l’économie iranienne.

En fait, les sanctions ont déréglé une situation en équilibre précaire pour différents motifs. Après la révolution islamique, l’ensemble des outils industriels et bancaires ont été nationalisés. La majorité des hommes iraniens (les femmes étant à 97% exclues du monde du travail) sont des fonctionnaires. Parallèlement, la principale source de revenu de devises est le pétrole qui, selon le site iranien des informations pétrolières, est vendu depuis des années en contrats dits buy-back (pré-achat), c’est-à-dire long temps à l’avance et à un prix fixe indépendant des fluctuations du marché. Parallèlement, pour satisfaire les mollahs ou les Pasdaran impliqués dans le commerce de produits importés, le régime maintient depuis toujours une politique de dollar à taux bas à grands coups d’injections de dollars sur le marché iranien afin que les hommes d’affaires du régime ne soient pas lésés par la chute de la monnaie iranienne, le rial. De ce fait, l’Iran a des revenus fixes et des dépenses toujours en hausse.

En raison de ces choix, le régime s’est trouvé très endetté quand la manne des investissements étrangers s’est arrêtée à la suite des pressions américaines sur les partenaires étrangers de l’Iran. Le régime a alors imprimé l’équivalent de plusieurs dizaines de milliards de dollars en billets sans provision pour payer les salaires et créer un faux pouvoir d’achat afin de relancer la consommation (et le business de ses hommes d’affaires). Le régime a par la suite reconnu cette création monétaire sauvage. Cette masse d’argent imprimée sans contrepartie a créé une inflation monstrueuse qui date de bien avant la flambée des prix de pétrole, de plus, cette flambée n’a pas enrichi le régime qui vend son pétrole à prix fixe, mais elle l’a surendetté car les prix de l’essence que l’Iran importe ont augmenté proportionnellement. Cette hausse de l’essence a aussi eu une répercussion sur la facture des produits importés, facture qui a encore plus endetté le pays. L’Iran est économiquement isolé, aujourd’hui à la recherche d’investisseurs, très endetté et avec des milliards de billets sans valeur.

Quand en 2006 et 2007, le régime se livrait à ces opérations folles de création monétaire, Coville affirmait que le pouvoir d’achat était en hausse, ce qui expliquait selon lui l’inefficacité des sanctions américaines ! A présent que cette inflation a déréglé encore plus la situation économique, Coville parle d’une mauvaise gestion des revenus pétroliers de l’année 2008, revenus extraordianres qui n’existent que dans les slogans rassurants des mollahs et leurs lobbyistes.

Coville ne parle jamais des vrais maux de l’économie iranienne comme la politique du dollar à taux bas par la faute de laquelle, les produits importés par les mollahs businessmen sont bien moins chers que les produits locaux qui subissent les effets de l’inflation. C’est ainsi que des pans entiers de la production nationale et des centaines de milliers d’emplois ont disparu : nous avons parlé du cas du thé iranien, mais le riz iranien a aussi cédé la place au riz asiatique ainsi que les agrumes iraniens ; ceux-ci même qui s’exportaient jadis dans tout le Moyen-Orient pourrissent à présent dans les entrepôts, faute d’acheteurs.

Le même problème existe pour le blé : ce qui a une incidence dans la vie quotidienne des Iraniens dont 85% qui sont fonctionnaires ont des salaires très bas, et selon les normes du régime, ils sont sous le seuil de pauvreté. Le prix du pain a doublé ces dernières semaines. Nous avions d’ailleurs consacré un article très lu sur le sujet, nous avons été surpris qu’au beau milieu du débat, Ali Laïdi pose à Coville une question sur le prix du pain : Coville a affirmé que le pain était très abordable, que les sanctions n’étaient pas efficaces et qu’il serait « naïf de croire que l’on peut résoudre (la crise nucléaire) avec des sanctions »... et nous avons alors entendu Ali Laïdi intervenir pour affirmer que l’on ne l’avait « jamais fait dans l’histoire ! »

En fait, tout au long de cet entretien, la soi-disant inefficacité des sanctions est revenue comme un leitmotiv dans les propos de Thierry Coville et Ali Laïdi.

Vous l’ignorez sans doute, mais les deux hommes se connaissent : ils travaillent tous les deux pour l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) fondé et dirigé par Pascal Boniface, un grand partisan du dialogue [1] avec les mollahs ! Désormais, les lobbyistes du régime ont le pouvoir de placer leurs lieutenants aux commandes de l’info. C’est du beau.

Il est certes autorisé de penser que l’on doit faire ami-ami avec ces mollahs qui agitent le Moyen-Orient pour préserver leur régime, mais la question est de savoir si France 24 doit devenir une base de lobbying pour un régime criminel ?

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