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Etats-Unis : La naissance d’un géant !
29.10.2008

Sur un fond de négociations secrètes et d’échanges d’émissaires entre Téhéran et Washington, les Etats-Unis ont attaqué le territoire syrien, raid interprété à tort comme un avertissement à Téhéran. C’est une nano lecture qui ne prend pas la distance nécessaire : il ne s’agissait pas d’un avertissement, mais d’un coup de pied d’un fœtus qui veut devenir un géant.



L’interprétation du raid américain comme un avertissement à l’Iran résulte d’un manque de connaissances géopolitiques ! Quand tous les experts évoquaient une attaque prochaine de l’Iran, nous avions écrit : l’Iran n’est pas l’Irak. Il y a aussi une méconnaissance de l’histoire, c’est-à-dire des liens entre les mollahs au pouvoir et les Etats-Unis : ce sont les Américains qui ont contribué à leur prise de pouvoir ! Ils souhaitent certes que le pouvoir échoie à des islamistes laïcs comme BaniSadr et le Front National Iranien, mais les mollahs ont permis aux américains d’éliminer le Chah dont le régime était un obstacle majeur à leur projet de déstabilisation et balkanisation du Moyen-Orient et l’Asie Centrale. En 1979, les Américains avaient besoin de cette déstabilisation et aujourd’hui aussi : c’est pourquoi ils ont donc attaqué Saddam et pas les mollahs dont le régime est un acteur régional de la déstabilisation via ses milices, milices que Washington souhaite avoir comme alliés.

Les Américains font tout pour préserver les mollahs quitte à reconnaître du bout des lèvres un certain rôle dans cette révolution, pour justifier la reprise du dialogue et faire admettre à leurs citoyens une entente, présentée comme une nécessaire continuité historique.

Les Américains ont même demandé au célèbre faux opposant iranien Abbas Milani d’écrire l’histoire de l’Iran à leur sauce ! De son côté, Téhéran oeuvre aussi dans ce sens en produisant des versions officielles inédites de la révolution où l’on évoque la sympathie des Etats-Unis pour la révolution islamique (le site « planète non violence » a publié l’une de ces versions commises par Omid Memarian, un agent notoire du régime des mollahs).

Il n’en va pas de même pour la Syrie dont l’intégrité ne convient pas aux Américains. Washington souhaite créer un super Etat Kurde, jalon premier de son projet de balkanisation de la région, balkanisation qui va exploser de l’intérieur l’OPEP et restituer le marché pétrolier aux grandes compagnies américaines privilégiées par la présence militaire des Américains dans la région. Les nouveaux pays créés seront petits et faibles et auront besoin de la protection militaire américaine. L’empire américain dont chacun annonçait la mort n’est pas encore né. Il est en gestation (dans les montagnes du Kurdistan).

La Syrie qui a fait semblant de rejoindre le camp américain l’agace car elle a choisi la Russie, on l’attaque ; l’avertissement, c’était pour Assad. Dans le même temps, on donne des visas aux émissaires de Téhéran pour trouver une entente avec son régime. Cette entente changera l’axe de la balkanisation, l’Iran est un temps épargné, ne laissant à l’empire naissant qu’une issue vers la Syrie. Les choses bougent aussi du côté de l’Afghanistan, territoire pivot pour agiter les régions musulmanes de la Chine. Bloqué en Iran, l’empire accepte de dialoguer avec les Talibans. Il s’adapte, mais sans l’invasion de l’Irak et de l’Afghanistan, l’empire n’aurait pas existé.

On se souvient qu’au moment où les Européens critiquaient l’invasion de l’Irak, Brzezinski, le concepteur de l’empire, avait pris la parole pour affirmer qu’un prétendu enlisement américain en Irak sonnerait la cloche du déclin des Etats-Unis. Les naïfs européens ont gobé cette histoire et se sont gardés d’aller en Irak, qui fût de facto livré aux faiseurs d’empire américains. Les Américains ont aussi compté sur le soutien de leurs amis experts, membres de think tanks européens, qui ont répété inlassablement cette vérité acquise. Les Européens sont aujourd’hui écartés de l’Irak.

L’Amérique qui jouait à l’empire blessé a aussi tendu un piège financier à ses adversaires en les encourageant à financer sa soi-disant décadence annoncée. Elle vient d’infliger une punition de taille à ceux qui espéraient vivre grassement grâce à ses dettes.

En 1979, les Américains ont fondé les bases de cet empire, mais leur plan a été contrecarré par les mollahs, protégés des Britanniques, puis partenaires de l’Europe. Cette fois, l’empire peut reprendre son expansion car les Américains ont appris de leur échec : ne pas se fier aux tiers (ils viennent de molester les systèmes bancaires de l’ensemble de leurs adversaires) et ne pas focaliser sur un obstacle (Iran). L’administration Bush a mené ce projet à ses limites les plus inattendues : reprendre dans l’immédiat l’expansion de l’empire sans l’Iran.

Mais Washington n’oublie pas son cas : le journal israélien Ha’aretz a rapporté que Bush était entré en contact via une lettre secrète avec les mollahs pour normaliser les relations et qu’il l’annoncerait après les élections présidentielles. Concernant l’Iran, l’administration Bush reste fidèle au plan initial de Brzezinski : normaliser les relations, encourager l’ouverture et la démocratisation pour reprendre à zéro le projet de 1979 avec les mêmes acteurs (sans les mollahs) pour déboucher sur un gouvernement de transition avec une forte présence de fédéralistes. Pas étonnant que les mollahs affirment n’avoir pas entendu parler de la lettre secrète de Bush, ils entendent clairement les chenilles de l’armée invisible de l’empire. Et ce n’est que le fœtus d’un géant.

© WWW.IRAN-RESIST.ORG

Pour en savoir plus :
- Election américaine : Analyse de la déclaration iranienne sur Obama
- (24 OCTOBRE 2008)

La nécessité impérialiste d’un dialogue avec les mollahs :
- Obama-McCain : Les deux parleront à l’Iran !
- (21 MAI 2008)

| Mots Clefs | Enjeux : Remodelage du Moyen-Orient et de l’Asie Centrale |

| Mots Clefs | Violence : Kurdistan |

| Mots Clefs | Enjeux : Garanties Régionales de Sécurité : le DEAL US |

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : USA |