En décembre 2007, alors qu’il était tenu par contrat de livrer du gaz à l’Iran pour une durée de 25 ans (jusqu’en 2031) à 75 $ les milles mètres cubes [1], le Turkménistan a choisi une période de grande vague de froid polaire pour interrompre sans préavis ses livraisons vers l’Iran. A l’évidence, les turkmènes n’étaient pas sincères : dans un premier temps ils ont évoqué des problèmes techniques sur le pipeline puis des défauts de paiement de Téhéran avant d’admettre qu’ils avaient décidé de doubler le prix du gaz à l’exportation pour le passer de 75 $ à 150 $ les milles mètres cubes.

Le Turkménistan dépend totalement de la Russie qui est son principal client gazier. Pendant toute la durée de la crise du gaz avec le Turkménistan, les Russes ne se sont guère manifestés pour jouer les intermédiaires afin de résoudre le conflit. Au contraire, ils ont été ravis de récupérer le principal client gazier de l’Iran : la Turquie. Au regard de l’intérêt stratégique d’une alliance Iran-Russie, le silence russe était suspect, tout portait à faire croire que la Russie semblait satisfaite de la situation provoquée en Iran par cette rupture de contrat. En effet, peu avant les mollahs avaient signé un important accord gazier avec la firme italienne Edison, accord qui leur permettait de se substituer à la Russie comme principal fournisseur gazier de l’Europe !

Les russes ont infligé une sévère punition aux mollahs par l’intermédiaire du Turkménistan, prouvant au passage que l’Iran était incapable d’assurer en situation de crise. Téhéran a refusé de payer l’addition turkmène et a terminé l’hiver sans le gaz qui lui était dû par contrat. Aujourd’hui, les mollahs ont changé d’avis et ont accepté le nouveau tarif turkmène car ils ont besoin du Turkménistan.

Depuis fin mars, ils courtisent ce pays mais aussi le Kirghizistan et l’Ouzbékistan afin que ces pays appuient leur candidature d’adhésion à l’Organisation de Coopération de Shanghaï pour contrer les avis négatifs de la Chine et de la Russie, les deux parrains de cette OTAN asiatique. Les mollahs souhaitent se placer sous le parapluie de la protection économico-militaire sino-russe afin de se protéger contre les futures sanctions économiques américaines.

La Russie et la Chine savent que les mollahs souhaitent cette protection pour continuer à provoquer les Etats-Unis afin de mieux monnayer une entente avec les américains. C’est une situation de non sens, mais qui illustre à merveille l’instabilité inhérente à la politique extérieure des mollahs.

A cause de cette diplomatie abracadabrante, l’Iran a vendu du gaz à très bas prix pour obtenir une super protection européenne, l’opération a irrité la Russie, mais le gaz vendu reste dû à l’Europe… Le Turkménistan a interrompu ses livraisons et l’Iran a été privé d’un gaz dû par contrat et doit aujourd’hui le payer à son double du prix de départ sans avoir aucune garantie que les turkmènes tiendront parole aussi bien pour la livraison du gaz que pour appuyer leur adhésion à l’OCS. Au final, l’Iran est perdant sur tous les tableaux…

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