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Lettre à M. Jean-Louis Debré
18.06.2005 Lettre déposée au Bureau d’accueil de l’Assemblée Nationale, le samedi 5 Mars 2005

Au sujet de l’invitation, le 9 Mars 2005, de Shirin Ebadi à l’Assemblée Nationale.



M. Jean-Louis Debré, Président de l’Assemblée Nationale.

Chaque jour, les actualités confirment l’absence de scrupules des dirigeants de la République Islamique et révèlent l’absence d’une politique alternative proposée par ses dissidents hétéroclites. Que pense Shirin Ebadi des inquiétantes facettes de la République Islamique : Création du Hezbollah, soutien financier et pétrole gratuit depuis 26 ans pour la Syrie terroriste, projet de destruction d’Israël ? Que pense-t-elle des conséquences nécessairement dangereuses de ces forfaits pour notre pays dans le contexte actuel ?

Shirin Ebadi a toujours critiqué les opposants à la République Islamique, leurs programmes et la sécularisation de la politique. Elle est, au contraire, montée au créneau pour défendre des positions extrêmement similaires à celles des autorités officielles de la République Islamique. Souvenez-vous de ses positions scandaleuses sur la loi interdisant les signes religieux ostentatoires en France !

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,

Le Comité de Coordination du Mouvement Estudiantin pour la Démocratie en Iran juge cette invitation inappropriée à plusieurs titres.

La République Islamique est, pour les Iraniens, synonyme de 26 ans de purges, de guerres, d’arrestations arbitraires, d’inimaginables tortures, de pendaisons et d’amputations publiques et d’Apartheid sexuel. 26 ans de défaites économiques et de corruption des mollahs qui ont mis KO un peuple tout entier et ont vidé toutes les caisses d’un état jadis riche.

Les jeunes Iraniens démocrates et laïques espèrent convaincre les autorités françaises et européennes que l’impasse dans laquelle se trouve l’Iran est imputable aux « réformateurs » de la République Islamique. Hélas, la diplomatie française persiste à défendre coûte que coûte la thèse d’une amélioration du régime de l’intérieur, au mépris des faits. Durant ces 8 dernières années, Khatami et l’ensemble des réformateurs, qui l’ont soutenu, ont donné un éclat politiquement correct à cet état totalitaire, et ont permis aux pères fondateurs de la République Islamique d’oeuvrer en toute quiétude et tromper la vigilance des observateurs étrangers. Et à chaque fois les réformateurs et les dissidents, loin de condamner cet aventurisme malsain, se sont portés volontaires pour défendre ces objectifs irresponsables des mollahs. Sans l’ombre d’un reproche contre le régime, ils ont soutenu les projets honteux des mollahs sans émettre la moindre critique !

D’autres comme Mme. Ebadi se sont terrés dans le un profond mutisme sur ces sujets : elle se dit en effet apolitique ! Apolitique, elle l’est quand il s’agit d’un sujet aussi grave qui engage l’avenir de l’Iran, sa sécurité et la préservation de son écosystème mais elle devient prolixe, infatigable oratrice et très politisée quand il s’agit de critiquer les jeunes Iraniens, le boycott pacifique des élections, le mouvement de la Désobéissance Civique ou bien dans un autre registre, l’état l’Israël ! En quoi propose-t-elle une alternative démocratique et radicalement différente des élucubrations des mollahs ?

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,

Shirin Ebadi n’est pas qualifiée pour représenter le changement vers une démocratie en Iran encore moins pour parler au nom du peuple iranien. Elle a très active dans ce « (pseudo)-Mouvement des Réformes » et elle continue de chanter les louanges de ce même Khatami qui a contribué à endormir les opinions publiques des états occidentaux. La France et autres pays d’Europe n’ont suivi que leurs intérêts économiques ou énergétiques à court terme : faire des affaires sans une opinion publique remuante. Quant aux dirigeants de la République Islamique, ils ont poursuivi leurs propres objectifs. Telle ont été et resteront la mission de Khatami et de ce simulacre des « Réformes ».

La France a d’innombrables intérêts en Iran et continue de privilégier tout ce qui confortera ce régime. Si l’on en croit les deux derniers ministres des Affaires Etrangères, MM. de Villepin et Barnier, la France est déterminée à faire de la République des mollahs un véritable « Pôle de Stabilité » !!!

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,

Soyez certain que la jeunesse iranienne connaît les raisons de cette écoeurante attitude.

Fort heureusement, la République Islamique est à bout de souffle. Malgré les menaces et les intimidations, les mollahs ne sont parvenus qu’à réunir 50,000 personnes à Téhéran le 22 Février dernier : une foule amenée par cars de toutes les régions d’Iran dans cette ville qui compte 15 millions d’habitants peu désireux de célébrer une révolution qui a anéanti leur vie. Le régime s’effondre.

Il ne lui reste qu’une Shirin Ebadi qui défend encore « les acquis » de cette révolution et vient réclamer à la France son soutien pour de nouvelles réformes islamisantes. Faut-il vous rappelez, Monsieur le Président, que la République Islamique demeure le pays de la répression de la presse et de l’Internet, celui de l’apartheid sexuel, des amputations publiques, des arrestations et détentions arbitraires et de l’absence de reconnaissance des délits d’opinions. Ces maux qui ont marqué l’Iran et fait des centaines de milliers de victimes et que, Shirin Ebadi assimile à de simples « lacunes » qu’il conviendrait d’éliminer à un rythme « adapté » à l’Iran.

C’est son discours complaisant avec un régime totalitaire et sécuritaire qui a disqualifié Shirin Ebadi auprès du peuple iranien. Elle paraît aujourd’hui en Iran comme un élément qui chercherait à continuer le faux-semblant des pseudo-réformes de Khatami.

Les Iraniens qui sont en désaccord total avec les objectifs terroristes, xénophobes, antisémites, et liberticides de ce régime totalitaire et se reconnaissent en ceux qui s’expriment sans langue de bois pour un projet clair : un Iran 100% démocratique et 100% séculier. Shirin Ebadi est à l’antipode de cette attente. C’est pourquoi Shirin Ebadi n’est pas qualifiée pour représenter le changement vers une démocratie en Iran encore moins pour parler au nom du peuple iranien.

Pour l’heure, la diplomatie Européenne, très largement inspirée par la diplomatie française, a choisi le camp des tortionnaires et des démagogues méprisant le camp de la relève. C’est-à-dire qu’elle néglige et tient pour quantité négligeable 70 millions d’iraniens dont 50 millions de jeunes.

Soyez certain que ces derniers connaissent les raisons de cette invitation inappropriée et maladroite et qu’ils vous en tiendront rigueur, Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale.

En souhaitant que la France révise cette politique méprisante à l’égard de la Jeunesse Iranienne, veuillez agréer, Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale, l’assurance de la haute considération du Comité de Coordination du Mouvement Estudiantin pour la Démocratie en Iran.

KAVEH MOHSENI

Porte-parole de 1999 à 2005 de la Section Française du Comité de Coordination
du Mouvement Estudiantin pour la Démocratie en Iran