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L’Iran serait bien un sanctuaire pour Al Qaeda
25.07.2007

Eli Lake [1], un célèbre journaliste américain, a récemment écrit un article sur la présence des dirigeants d’Al Qaeda en Iran. L’intérêt de l’article n’est pas tellement dans les informations sur cette présence que sur les remous que ces informations ont créé à Washington. Presque malgré lui, Lake confirme nos soupçons quant à la volonté de Washington de dissimuler toute information qui établirait un lien entre le régime des mollahs et les djihadistes d’Al Qaeda qui tuent des soldats américains en Irak.



Les informations sur la présence des hauts dirigeants d’Al Qaeda en Iran proviennent d’un rapport intitulé : « La menace terroriste pesant sur le territoire national américain ». Ce rapport a été rédigé par la CIA et d’autres agences de renseignements, mais le Département d’Etat (c’est-à-dire le ministère américain des affaires étrangères) serait également intervenu pour réinterpréter les informations à l’intérieur même du rapport et ces interférences posent des problèmes quant à la valeur objective du rapport et ses recommandations.

Une des choses qui ont fait la force de la diplomatie britannique a toujours été la collecte d’informations sur le terrain, au point que les chercheurs historiques se fondent sur ces observations dénuées d’interprétations politiques. En effet, ce sont ces observations qui permettaient aux décideurs Britanniques de décider quelles seraient les politiques à mener pour gérer ces territoires lointains. Le problème avec ce rapport est que les observateurs du terrain ont relevé un certain nombre d’indices qui ne concordent pas avec l’actuelle orientation politique du Departement d’Etat.

Explications | Les enquêteurs ont découvert qu’Al Qaeda disposait de deux Assemblées Consultatives, l’une se réunissant dans la zone tribale pakistanaise qui échappe au contrôle de Pervez Musharraf et l’autre se réunissait dans l’Est de l’Iran après un accord négocié entre Ayman al-Zawahiri et Ahmad Vahidi, le Commandant en chef de la Brigade Qods. L’information est cruciale car l’objet du rapport était d’expliquer comment et dans quelle mesure Al Qaeda a pu au cours des dernières années accroître ses capacités à préparer une nouvelle attaque sur le sol américain.

Le rapport devait également comprendre comment l’organisation s’était réorganisée, comment elle avait recruté de nouveaux cadres dirigeants, à partir de quels pays Al Qaeda opérait et quel était le statut de ses camps d’entraînement et de ses infrastructures géographiques dans différents pays d’accueil. En recoupant les indices, le rapport est arrivé à une conclusion explicite : les chefs du réseau résident en Iran sur plusieurs sites militaires (à Lavizan, à Tchalous, à Mash’had et à Zabol) distants de centaines de kilomètres.

Ces chefs résidant en Iran et les membres influents actifs en Irak ou en Afghanistan se retrouvent (selon nos estimations) à proximité de la triple frontière Iran-Afghanistan-Pakistan dans la région de « Sistan et Baloutchistan » pour tenir leur Assemblée Consultative afin de définir le consensus sur la direction politique du mouvement et préparer les projets d’attaque.

Interférences | Selon Lake, la CIA et le Departement d’Etat sont intervenus dans le rapport pour affirmer que, selon leurs interprétations, le régime des mollahs n’était pas au courant de cette présence en Iran. Et que les membres de la Brigade Qods des Pasdaran avaient agi de leur propre chef. C’est exactement la ligne de conduite imposée par le Departement d’Etat à la communication de l’armée américaine quant aux livraisons iraniennes d’armes aux Talibans ou encore aux combattants djihadistes irakiens.

On a toujours évoqué un rôle des Pasdaran dans le vain espoir de diviser le régime et obtenir le sacrifice des Pasdaran par les mollahs. A présent, dans une nouvelle version de cette stratégie de division, cette tendance se focalise sur la Brigade Qods qui compte environ mille membres (sans doute les américains ont-ils compris qu’il était difficile d’arriver à un accord avec les mollahs en demandant le démantèlement de toute la milice des Pasdaran).

Or, ces réunions de l’Assemblée Consultative d’Al Qaeda en Iran nécessitent un déplacement sans entrave des combattants d’Al Qaeda sur le territoire iranien. Cette conclusion sur la facilité des déplacements est sans doute ce genre de conclusion qui a affolé le Département d’Etat.

Non seulement, le Département d’Etat et la CIA refusent de reconnaître le rôle des mollahs dans le renouveau d’Al Qaeda, mais encore ils font intervenir des experts soi-disant indépendants qui prennent le relais pour « expliquer la situation » avec un point de vue proche d’eux. Ainsi Lake a interrogé un certain Vali Nasr, un Iranien, qui est connu pour faire du lobbying en faveur des mollahs au sein du Council on Foreign Relations (CFR), le saint des saints des centres de recherche américains dont les recommandations en matière de politique internationale sont très régulièrement adoptées par le Département d’Etat depuis les années 70.

Vali Nasr a évidemment dit ignorer qu’Al Qaeda se soit reconstitué dans l’Est de l’Iran et il a même profité de l’occasion pour expliquer les livraisons iraniennes d’armes aux Talibans : il s’agirait selon Vali Nasr d’une « ruse de realpolitik des mollahs »… Cette explication n’a pas soulevé de doutes chez Eli Lake car comme beaucoup d’occidentaux, il admet que les mollahs sont chiites et les Talibans des sunnites, et « comme chacun le sait », les sunnites et les chiites sont deux entités théoriquement insolubles l’une dans l’autre. Ce même raisonnement a cours au Departement d’Etat qui le rappelle autant de fois que nécessaire. Pourtant, les mollahs apportent de l’aide à des dizaines de groupes terroristes marxistes (comme le FPLP) et à des terroristes islamistes sunnites (comme le Hamas).

L’armée américaine affirme avoir intercepté en Irak une dizaine de messagers porteurs d’instructions de l’Assemblée Consultative de l’Est de l’Iran, elle a dû en laisser passer des dizaines d’autres vu les résultats quotidiens d’Al Qaeda en Irak. On se demande quel genre de conclusion peuvent tirer les Américains d’un rapport déformé par leurs soins.

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Pour en savoir + sur le sujet :
- Hezbollah - Al Qaeda : l’enquête avortée de Georges Malbrunot
- (16 avril 2006)

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[1Eli Lake | The New York Sun
- Iran Is Found To Be a Lair of Al Qaeda |July 17, 2007