Accueil > Bonnets d’âne > Iran : La méthode Olivier Roy



Iran : La méthode Olivier Roy
17.11.2006

Ahmadinejad campe sur ses positions. « Dans l’affaire nucléaire, nous sommes prêts pour accomplir le dernier pas et j’espère que nous allons organiser d’ici à la fin de l’année [iranienne qui se termine en mars 2007] la grande fête de la confirmation du droit nucléaire de l’Iran », a-t-il déclaré lors d’un discours prononcé dans la minuscule ville de Baneh.



Ces propos, comme d’autres tenus ces derniers jours, participent à la stratégie délibérée de se montrer plus fort que jamais. Parallèlement, les partisans du régime des mollahs montent au créneau pour insister sur cette hyper-puissance iranienne à venir.

Ces partisans sont des mercenaires de plumes ou des partisans idéologiques qui agissent par anti-américanisme ou anti-sionisme (comme Emmanuel Todd). Ils professent sous le titre pompeux d’experts, mais leurs expertises sont tronquées et évolutives.

Ces expertises soulignent le caractère nuisible du régime, mais recommandent de trouver un terrain d’entente avec ce même régime. Pour les besoins de leur démonstration, les experts se basent sur un certain nombre d’éléments qui varient selon leurs besoins ou face aux critiques.

Ainsi, après avoir nié toute ingérence iranienne en Irak et avoir attribué les attentats irakiens à des « sunnites » pro-Saddam, ces messieurs ont tous décidé d’attribuer les attentats à l’Iran et à ses réseaux régionaux et de faire fi de leur théorie de base : « les sunnites ne s’associent pas aux chiites ».

Théorie éminemment fausse puisque le Hamas (sunnite) a toujours entretenu d’excellentes relations avec les mollahs chiites iraniens ainsi que bon nombre de groupes terroristes islamiques sunnites payés par les mollahs qui agissent en Afghanistan, en Algérie ou en Afrique noire. Nous en avons eu la preuve ces derniers jours après la publication du rapport onusien sur les livraisons d’armes iraniennes aux islamistes somaliens. Les mollahs eux-mêmes ont suivi des formations terroristes dans les camps de l’OLP sunnite ou chez les frères musulmans, sunnites aussi.

Cette théorie (d’animosité entre chiites et sunnites) était très utile quand les experts voulaient innocenter l’Iran, et minimiser son implication dans les foyers terroristes, du temps de Rafsandjani et surtout du temps de Khatami. Ainsi ils pouvaient recommander le dialogue avec cet état islamique qui se reformait et se tenait loin des réseaux terroristes.

Olivier Roy est lui-même un des fabricants de concept comme le Nationalisme Chiite dont l’objectif était de refaire une nouvelle réputation au Hezbollah qui est le bras armé des mollahs dans la région la plus sensible du Moyen-Orient. Encore aujourd’hui, Olivier Roy évoque la capacité de l’Iran de faire empirer les choses en Irak tout en se gardant d’utiliser le mot terroriste.

Car rappelons-le Olivier Roy doit comme tous les autres experts aboutir à une conclusion qui reste le même : la nécessité de dialoguer !

Il y a cependant un problème qui relève du bon sens et il faut le résoudre : Si l’Iran est si dangereux et sans scrupule, comment négocier avec un adversaire aussi fourbe et cruel ?

La réponse d’Olivier Roy est simple, l’ennemi est Ahmadinejad. Avant lui, l’Iran était clean. Parallèlement, notre champion de rhétorique multiplie les déclarations contradictoires dans le but de brouiller les cartes et surtout de rassurer les lecteurs sur les intentions régionales des mollahs. Ses affirmations sont si ridicules, qu’il paraît aberrant de les commenter. Alors que l’Iran révolutionnaire et islamique a concentré l’ensemble de son énergie à faire du Hezbollah une armée moderne et suréquipée pour contrôler l’issue du conflit le plus sensible de la planète, Olivier Roy affirme : « En fait, il n’y a que deux choix pour Washington : soit faire de l’Iran l’ennemi principal ; soit faire de l’Iran l’interlocuteur principal ».

Le terme de l’interlocuteur principal a été emprunté au site Iran-resist (27 novembre 2005), et nous déplorons ce pillage intellectuel.

Mais, si Roy ne cite pas ses sources, il y a une raison majeure. Olivier Roy utilise ce concept non pas pour expliquer l’amplification délibérée de la crise par les mollahs sur les trois fronts du nucléaire, Liban et Irak, mais pour se l’approprier et le vider de sens. Ainsi selon lui, les mollahs auraient aimé devenir l’interlocuteur principal des Etats-Unis dans la région pour faire « profil plus bas au Proche-Orient sur le front israélo-palestinien, parce, selon Olivier Roy, que le conflit israélo-palestinien (ou la destruction d’Israël) est secondaire pour les Iraniens » !

« d’ailleurs, (les mollahs) ne sont pas en charge (sur le front israélo-palestinien) », affirme-t-il. « Si les Israéliens négocient directement avec le Hamas, l’Iran ne peut rien faire. » Il s’agit d’une pensée brillante qui suppose que le Hamas doit devenir le principal interlocuteur d’Israël comme l’Iran doit devenir le principal interlocuteur des Etats-Unis.

Il est peut-être inconscient car dans le feu de l’action, il a fait des confidences sur la future carte de la région : « Dans le fond, si Téhéran obtient la certitude de ne pas être attaqué et de pouvoir construire son programme nucléaire, le reste suivra, sans même qu’il faille négocier. Si les Américains s’en vont d’Irak, l’Iran deviendra l’acteur principal sur la scène irakienne. »

Mais ceci contredit Olivier Roy qui affirmait le contraire il y a à peine un mois, le 25 octobre 2006 dans les colonnes du Monde. Et il l’affirmait sur la base de 2 raisonnements : d’un, « les chiites d’Irak n’ont aucune envie de se retrouver iranisés » et de deux, « Téhéran ne vise pas créer un grand chiitistan ».

C’est la méthode Roy : à chaque jour sa peine, à chaque menace son explication. Pour encourager le dialogue avec les mollahs, insistons sur ses capacités de nuisance, pour ne pas alarmer l’opinion à propos d’une hégémonie chiite, insistons sur sa volonté des mollahs à ne pas envahir ses voisins, et enfin, pour calmer les inquiétudes sur le bon interlocuteur : désignons Ahmadinejad comme le coupable fou fou et recommandons de négocier avec d’autres au sein du régime. Qui ? Olivier Roy attend, il ne le sait pas encore mais, il s’adaptera.

Mais les grands progrès nucléaires clandestins des mollahs ont été accomplis avant que l’on apprenne l’existence même d’Ahmadinejad, est-ce que Rafsandjani [1] et Khatami sont pour autant les vrais fourbes pour Olivier Roy ? Réponse dans les prochains épisodes de la palpitante vie intellectuelle du petit Olivier.

Les défauts de la Méthode en O.R. d’Olivier Roy | L’imperturbable Ahmadinejad peut tranquillement continuer ses provocations mais la dure réalité de l’Iran est que les caisses sont vides et le peuple en colère, si le régime n’arrive pas à donner une meilleure image de l’Iran, les capitaux étrangers fuiront d’avantage ce pays et les chances de survie du régime seront plus minces que jamais.

Seule l’ouverture des négociations peut redonner momentanément espoir aux investisseurs étrangers. Tel est le défaut de l’expertise de M. Olivier Roy : il néglige les données économiques du régime, le boycott des banques suisses, le retrait des japonais du marché pétrolier, le taux d’inflation dépassant les 20%, le chômage qui caracole officiellement à 45% dans un pays où les femmes ne travaillent même pas, l’endettement du pays malgré la hausse vertigineuse des prix du pétrole en 2006. L’expertise d’Olivier Roy est à la petite semaine et sans contenu. Par ailleurs, il oublie un autre pays qui aussi aimerait peser dans région : la Russie. Il évoque longuement les Etats-Unis et oublie de citer la Russie, est-il inconscient ou agit-il délibérément ?

Les expertises d’Olivier Roy ne sont jamais innocentes et sous les dehors d’un opportuniste qui s’adapte à la demande, il entend influencer l’opinion et ses élèves pour diaboliser les Etats-Unis et endormir l’opinion sur les vraies intentions des états comme l’Iran (des mollahs) et la Russie dont l’unité changera la donne énergétique mondiale.

Le quotidien le Temps a consacré deux articles à la puissance montante de l’Iran dans la région en recommandant le dialogue avec ce pays. L’un donne la parole à Olivier Roy et l’autre (écrit par Stéphane Bussard) à l’inénarrable Professeur Djalili, un autre qui s’adapte à tout et parle sans évoquer la faillite économique du régime et signale la capacité du pays de « vivre relativement bien son isolement ».

Tous nos lauréats du Bonnet d’âne !

[1Actuellement, Rafsandjani est infréquentable et le petit Olivier cherche une justification plausible pour insister sur la nécessité de le réhabiliter.