Israël fait fausse route
07.08.2006
Quand nous avons écrit les commentaires qui suivent, Israël n’avait pas encore subit les derniers tirs de roquettes et le Liban n’avait pas connu une nouvelle journée de destruction. Nous sommes aussi des adversaires du Hezbollah et même si nous n’avons aucune armée pour le combattre, nous savons comment l’abattre… Nous estimons qu’Israël doit nous écouter et comptons sur des confrères israéliens pour nos aider à nous faire entendre… Cette guerre ne concerne pas le Liban mais l’Iran et Israël. Cette guerre inutile et si meurtrière nous encourage à publier ces commentaires qui complètent l’avis d’un expert de la région.
Jean-Paul Chagnollaud : « Les Etats-Unis ont la clé » (Le Parisien)
auteur de «Frontières au Moyen-Orient» (Ed. l'Harmattan).
La guerre au Liban risque-t-elle de durer encore longtemps ?
Jean-Paul Chagnollaud. Jean-Paul Chagnollaud. J’en ai peur. Les Américains sont les seuls, aujourd’hui, à pouvoir imposer un cessez-le-feu aux Israéliens. Or Georges Bush ne semble pas pressé. 11 pense que ce conflit fait partie de la grande croisade des démocraties contre le terrorisme. Il attendra donc que les Israéliens aient atteint leurs objectifs. Mais je ne pense pas qu’ils puissent y parvenir.
Pour quelles raisons ?
JPC. Israël a annoncé qu’il voulait casser le Hezbollah, l’éradiquer, comme on fait disparaître Al-Qaïda d’Afghanistan. Mais la situation n’a rien à voir. Nous sommes dans un cas de figure radicalement différent. Le Hezbollah est une organisation très implantée, très soutenue, qui a des députés et deux ministres dans le gouvernement libanais. C’est un mouvement populaire au Liban et dans une partie du monde arabe, popularité que cette guerre renforce. Autrement dit, même si Tsahal parvenait à le repousser de quelques kilomètres, il est évident que le Hezbollah se reconstituerait d’une façon ou d’une autre.
Jugez-vous la réaction d'Israël disproportionnée ?
JPC. Complètement L’Etat hébreu a attaqué l’ensemble du Liban, pas seulement le Hezbollah. Le bilan est déjà extrêmement lourd, avec plus de 900 victimes civiles, des infrastructures lourdement endommagées et près d’un million de personnes déplacées, soit un Libanais sur trois. Le Liban est en train d’être détruit On ne voit plus très bien ce qu’il y a à bombarder.
Philippe Douste-Blazy a-t-il eu tort de dire que l'Iran peut jouer un rôle de stabilisation dans la région ?
JPC. Il faut tout faire pour privilégier le dialogue et encourager une sortie de crise diplomatique. Bien sûr qu’il faut parler avec l’Iran comme avec la Syrie, le Hezbollah ou le Hamas. C’est un point de vue raisonnable qui est partagé, par exemple, par le Vatican. Le problème des Etats-Unis et d’Israël, c’est qu’ils frappent d’abord et qu’ils discutent ensuite. Mais on n’obtient jamais rien de durable par la force. Au contraire, on crée les désordres et les violences de demain.
Que peut faire la France ?
JPC. Il faut être honnête, ce sont les Etats-Unis qui ont les clés. Mais la France joue son rôle. Sa position est équilibrée. Elle a raison de demander dans les discussions à l’ONU un cessez-le-feu immédiat et un accord politique avant tout envoi d’une force internationale sur le terrain. Plus le temps passe, plus on s’aperçoit que c’est la seule solution viable.
Israël fait fausse route
Encore une fois, un très bon diagnostic d’un spécialiste : l’attaque d’un état contre une entité plus petite risque de victimiser cette dernière et attirer la sympathie de larges couches de populations qui ignorent la réalité et les précédents qui ont créé le conflit.
Aujourd’hui, même si les occidentaux et les arabes ont consciences que les évènements sont téléguidés par l’Iran ou plus exactement par les mollahs au pouvoir en Iran, la puissance militaire israélienne joue en sa défaveur dans la guerre médiatique que lui livrent ses adversaires. C’est ce que nous avions appelé la guerre dans «la guerre». Cette guerre sera perdue par Israël mais aussi par les adversaires du Hezbollah.
L’analyse de Challognaud est intéressante, mais comme toujours avec des analystes français nous partons d’un très bon diagnostic pour déboucher invariablement sur une accréditation sans restriction de la diplomatie française en cours qui est devenue elle-même une partie du problème.
Toute attaque contre le Hezbollah ne fera que renforcer son image et affaiblir ses adversaires. Il ne faut pas s’attaquer aux tentacules mais au cœur du monstre : il faut aider les vrais opposants à abattre la république islamique. Or, pour l’heure, l’état d’Israël apporte son soutien, via ses liens à Washington et la Radio Col Israël Persan, à des simili-opposants qui désirent uniquement réformer ce régime. Les mollahs eux-mêmes et Rafsandjani en tête préparent cette mutation nécessaire pour le régime. Ce ravalement laissera intacts les réseaux du régime.
Actuellement Israël aide ces réformateurs (via des Think Tank américains qui sont pro-israéliens) et isole les patriotes laïques. Les conseillers des services des Renseignements qui ont mis au point cette stratégie s’imaginent que le futur état iranien doit rester chiite afin de diviser le monde musulman. Les faux réformateurs sont d’anciens miliciens islamistes...
Pour assurer la sécurité d’Israël, il faut abattre le régime des mollahs et non pas essayer d’aider des éléments sélectionnés (par les mollahs) pour faire triompher leur plan de mutation ! Il ne faut pas leur donner les moyens de se renforcer sur la scène internationale et étendre leurs réseaux.
Israël fait fausse route.
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