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Le Monde : Hugo Chavez militarise le Venezuela en agitant la menace d’une « guerre asymétrique » avec les Etats-Unis
02.08.2006 (Article paru dans l’édition du 26.07.06)

Depuis neuf mois, Hugo Chavez appelle ses concitoyens à rejoindre l’armée de réserve en prévision d’une « guerre asymétrique » : Un million et demi de Vénézuéliens se seraient déjà enrôlés, en majorité des anciens appelés.



Soraida Vega se peint le visage : une raie verte, une raie noire. Son équipe ? L’armée de réserve vénézuélienne. Fusil sur l’épaule, la jeune femme s’apprête à défiler pour la première fois devant « son » président, Hugo Chavez.

« Les Américains n’ont qu’à bien se tenir », rit-elle, en contemplant les tanks vénézuéliens stationnés derrière la tribune.

A deux heures de route de Caracas, 15 000 réservistes et 30 000 membres de l’armée régulière ont commémoré, le 24 juin, la bataille de Carabobo que Simon Bolivar livra contre les Espagnols en 1821. Colonel du cadre de réserve, le président vénézuélien a fait du « Libertador » de l’Amérique du Sud, l’inspirateur de sa « révolution bolivarienne ».

Depuis neuf mois, Hugo Chavez appelle ses concitoyens à rejoindre l’armée de réserve en prévision d’une « guerre asymétrique ». Il dénonce les velléités interventionnistes américaines. Un million et demi de Vénézuéliens se seraient déjà enrôlés, en majorité des anciens appelés. L’armée de métier compte 82 000 hommes, selon l’Institut d’études stratégique de Londres.

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«LA RÉVOLUTION JUSQU'AU BOUT»

Soraida aurait aimé « faire pilote d’avion ou servir dans la marine ». Mais, devenue mère à 16 ans, elle n’a jamais passé son bac. Grâce aux programmes d’éducation populaire instaurés par le gouvernement Chavez, elle a fait une formation en tourisme. Et tous les samedis, elle s’entraîne militairement pour être « prête à défendre la révolution jusqu’au bout ».

Pour le général du cadre de réserve Alberto Rojas Muller, auteur en 2005 de la nouvelle loi sur l’armée, « la défense stratégique de l’Etat incombe à la nation tout entière ; elle s’appuie sur la résistance à l’invasion par la population civile ». L’armée de réserve et la garde territoriale qui la complète sont directement rattachées à la présidence de la République. A qui s’inquiète de voir se constituer une milice aux ordres du président Chavez, le vieux militaire rétorque que la réserve est ouverte à tous les citoyens, sans distinction d’opinions politiques. Pourtant, à Carabobo, il est difficile de trouver un réserviste qui ne professe une loyauté sans faille au « comandante » Chavez.

Personne pourtant ne semble prendre au sérieux le risque d’une attaque américaine. Mais « mieux vaut se préparer au pire », avance un professeur d’anglais dans le civil. Le lieutenant colonel Hernandez, qui commande le bataillon, acquiesce. Le coup d’Etat avorté d’avril 2002 a fourni au chef de l’Etat l’occasion d’épurer l’armée, qui lui est désormais acquise.

Depuis l’arrivée au pouvoir de M. Chavez, en 1998, le ton n’a cessé de monter entre Caracas et Washington, inquiet de l’alliance du Venezuela, 5e producteur mondial de brut, avec Cuba et l’Iran. Affaiblie, l’opposition vénézuélienne, qui contrôle les grands médias, n’est pas la seule à s’inquiéter des « dérives militaristes » et des alliances provocatrices. « Le gouvernement brandit la menace d’une intervention américaine et embrigade ses partisans pour faire oublier les problèmes de corruption et l’insécurité grandissantes », estime un fonctionnaire municipal de Valencia. Les pacifistes vénézuéliens s’indignent quant à eux des sommes allouées aux achats d’armement.

Avant d’immigrer au Venezuela et d’ouvrir une épicerie, William Perez a fait son service en Colombie, dans un bataillon antiguérilla. Selon lui, « les partisans de Chavez jouent à la guerre parce qu’ils ne savent pas ce que c’est (...) mais ils ont raison de se méfier des Américains ».

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Marie Delcas