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La France et les non-alignés : les carottes sud-américaines
10.08.2005

Les états non-alignés avaient, semble-t-il, bloqué un temps les négociations du Conseil des Gouverneurs de l’AIEA. Est-il plausible qu’ils soient capables de s’opposer à une demande française d’une résolution musclée contre les mollahs ?



La France est un partenaire important de certains de ces états qui se sont distingués ces derniers jours.

Argentine

Le 20 janvier 2005, le Président Chirac recevait le président argentin, Nestor Kirchner, qui venait chercher auprès de l’Union européenne des soutiens au moment où se renégociait la dette argentine.

Chirac a évoqué le « soutien de la France à l’Argentine », il a plutôt été question du soutien du gouvernement français ... aux exigences des entreprises françaises, présentes dans ce pays, et qui cherchent à obtenir une hausse des tarifs auxquels elles vendent leurs services.

Lors de la vague de privatisations des grandes entreprises d’État menée par le gouvernement Menem au cours de ses dix ans de règne (1989-1999), plusieurs grandes entreprises européennes se sont emparées des services publics, parmi lesquelles des entreprises françaises comme Suez, EDF ou France Télécom. Elles ont ainsi mis la main sur la gestion de secteurs névralgiques comme l’eau, l’électricité, le téléphone.

Mais l’effondrement de l’économie argentine en 2002 a bloqué les tarifs auxquels ces services sont vendus au public. La raison de cet effondrement est l’insolvabilité complète de la moitié de la population plongée dans une profonde misère.

Le gouvernement Kirchner a bénéficié d’un léger redressement de l’économie argentine. Celle-ci a retrouvé un rythme de croissance d’environ 8 ou 9% par an, ce qui a permis à une partie des classes moyennes de refaire surface mais une hausse des tarifs publics lui porterait préjudice.

Les grandes entreprises françaises ne cachent pas leur impatience. Les entreprises de l’eau et de l’électricité exigent que les tarifs publics soient réajustés en leur faveur. Pour obtenir cela elles ont donc mis la pression sur le gouvernement Kirchner ir. Le ministre argentin de l’Économie, Roberto Lavagna, a fait un pas dans cette direction en évoquant une augmentation des tarifs qui pourrait aller jusqu’à 16%. Mais Suez, qui à travers sa filiale Aguas Argentinas, dont elle possède 46% des actions, contrôle notamment le service des eaux et des égouts de la capitale, souhaite une hausse de 60% des tarifs !

  • Kirchner devait trouver une solution car les prochaines élections argentines auront lieu en Septembre. La partie populaire de son électorat est sensible à la situation des services publics dans un pays où la vie est, chaque jour, plus difficile.

Brésil

Les groupes français occupent sur le marché brésilien une position tout à fait significative : Carrefour est ainsi le premier distributeur brésilien et la troisième entreprise privée du pays, ACCOR est le numéro un brésilien de l’hôtellerie, Saint-Gobain (Santa Marina) occupe, dans ce pays, la troisième place dans le secteur des matériaux de construction, l’Oréal représente, pour sa part, la cinquième entreprise du Brésil dans le domaine des cosmétiques.

Propriétaire de deux usines dans l’Etat de São Paulo, on note que le groupe français Louis Dreyfus est le troisième producteur mondial de jus d’orange.

Quelques grands groupes, récemment entrés sur le marché brésilien, ont acquis très rapidement une position de leader sur le marché sud-américain. Ainsi VEGA (groupe Lyonnaise des Eaux) est devenu le 1er collecteur de déchets d’Amérique du Sud, tandis que COAM (du groupe Printemps-Pinault-La Redoute constitue désormais le premier distributeur de matériel électrique au Brésil.

La France est un partenaire commercial majeur du Brésil -7e fournisseur étranger & 10e client -, alors que le Brésil reste, pour la France, un partenaire moyen -16e client, & 23e fournisseur étranger -.

  • Les Brésiliens ont donc à gagner s’ils s’alignent sur les positions françaises et ce d’autant plus que 2005 est l’année du Brésil en France.

Cuba

Dans un contexte d’essoufflement de la croissance cubaine, les échanges commerciaux franco-cubains ont souffert en 2003 et le mouvement s’est encore accentué en 2004. Ces pertes de parts de marchés s’expliquent par la place acquise par les Etats-Unis dans l’approvisionnement alimentaire de l’île, où la France était jusque-là en première ligne.

La France est aujourd’hui le 6e partenaire commercial de Cuba (3e au sein des partenaires UE de Cuba) . Une soixantaine d’entreprises françaises sont implantées à Cuba, essentiellement dans les services (banques, tours opérateurs, transports, ingénieurs-conseils), l’agro-alimentaire, l’énergie et sous forme de bureaux de représentation. Selon le gouvernement français, ces investissements sont très insuffisants au regard du potentiel du marché cubain.

Au rang des Etats-membres de l’UE, la France est sans conteste l’un de ceux qui tentent d’oeuvrer pour un plus grand rapprochement de l’Union et de Cuba.

  • Ainsi, la France plaide « sans trêve » pour une levée de l’embargo « unilatéralement déclaré » par les Etats-Unis contre Cuba en 1960.
  • De même, la France s’est également opposée à la mise en oeuvre du « Cuban Liberty and Democratic Solidarity Act » ou loi Helms-Burton adoptée en 1996 par le Congrès des Etats-Unis, qui vise à aider les démocrates anti-Castristes : pour la France cette loi accroît l’isolement de l’île et compromet ses chances de développement !

- Les états non-alignés saisissent les opportunités et négocient leurs votes au sein des instances internationales en échange d’avantages commerciaux ou diplomatiques pour sauver leurs économies en état d’asphyxie. C’est chantage à tous les étages.

Pour en savoir + :
- Résolution de l'AIEA : nos commentaires


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