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Zahra Kazemi : Le témoignage médical de Shahram Azam
24.06.2006

Il y a exactement trois ans, un certain 24 Juin 2003 une journaliste canadienne d’origine iranienne qui effectuait un reportage en Iran était arrêtée à la suite de son interview des familles de prisonniers qui protestaient devant la prison d’Evine.



15 jours plus tard, la journaliste était déclarée morte et enterrée en Iran en dépit des demandes de sa famille (mère et enfants) vivant au Canada, les autorités iraniennes ayant annoncée que puisque la grand-mère de Mme Kazemi était iranienne, la défunte l’était également !!!!

Dans son rapport d’autopsie, le ministère de la justice de la république islamique annonçait les raisons de sa mort : « la mort de Mme Kazemi est accidentelle ; suite à sa grève de la faim, elle a eu une baisse de tension et est tombée de sa chaise, la tête en avant ».

Mais l’histoire est très différente de ce qui est annoncé et nous allons vous relater les faits en ce triste anniversaire et au moment où la personne ayant participé directement à son assassinat est accueillie à Genève dans le cadre de la 1ere Session du Conseil des Droits de l’Homme.

Nous formulons le voeu que ce texte soit lu là-bas et nous comptons vraiment pour qu’il y soit diffusé le plus massivement possible si d’aventure un lecteur genevois voulait s’en charger.

Après son arrestation Ziba (Zahra) Kazemi fut accusée d’espionnage par les autorités iraniennes et par conséquent elle se retrouva à la prison d’Evine et aux mains des responsables du ministère des Renseignements de la république islamique, les services secrets du régime islamique, ministère fondé en 1984 par Saïd Hajarian [1].

Tout ce que nous relatons se passait dans l’Iran sous la présidence de Khatami, que certains s’évertuent à nous présenter comme un modéré et si nous l’admettons alors imaginez ce qu’est un ultra conservateur islamiste. Quoi qu’il en soit à l’époque déjà sévissaient les personnes qui aujourd’hui encore détiennent les rênes du pouvoir depuis la fondation de cette pseudo-république.


Ce qu’il faut savoir sur l’affaire

A la suite de son arrestation Ziba (Zahra) Kazemi fut battue à mort et subit toutes sortes d’exactions par des membres du ministère des Renseignements.

On se souvient encore qu’à l’époque, le journal arabe Al Sharq Al Awsat avait réussi à joindre un haut responsable qui sous couvert d’anonymat avait déclaré que les plus hautes autorités de la république islamique dont le Guide Suprême Khamenei étaient au courant du sort qu’avait eu à subir Zahra Kazemi.

Cette source avait également révélé que ces autorités connaissaient dans le détail les tortures cruelles endurées et les raisons de la mort de la journaliste canadienne. Ces révélations avaient alors déclanché un tollé et une levée de boucliers dans le monde, enfin surtout dans le monde journalistique, au Canada et chez certains opposants iraniens…

Khatami en parfait communiquant fit savoir qu’il allait ordonner une enquête dont il confiât la direction à trois hommes, Ali Abtahi, Ali Rabiï et Saïd Mortazavi (Procureur de Téhéran), tous trois membres de ce fameux ministère des Renseignements, tous trois ayant participé à l’interrogatoire et surtout aux exactions.

Et c’est eux qui publièrent le fameux rapport qui faisait état de : « la mort accidentelle de Mme Kazemi suite une chute due à une baisse de tension lors de sa grève de la faim ». Le rapport est d’autant plus choquant que la personne qui avait donné l’ordre de l’arrestation de Kazemi était justement le juge Saïd Mortazavi.


Chronologie


Le 23/06,
Zahra est arrêtée et soumise à la question dès le soir même avec accusation d’espionnage : elle aurait photographié la prison Evine ! Mais elle a déjà subit des coups quand au moment de son arrestation des pasdarans ont voulu lui arracher son appareil photo.


Le 24/06,
une fois de plus elle est l’objet d’interrogatoire que l’on va nommer musclé dans l’attente de vous donner plus de détails.


Le 27/06,
elle est admise à l’hôpital Baghyatollah en état de mort cérébrale mais maintenue artificiellement en vie, elle le sera durant deux semaines.


Le 10/07,
le ministère des affaires étrangères canadien demande un traitement médical spécial pour Zahra. La république islamique fait savoir qu’elle dispose de tous les moyens médicaux les plus évolués.


Le 11/07,
la mort de Zahra Kazemi est officiellement annoncée... et tout aussi officiellement elle n’a pas fait l’objet de violences.


Le 12/07,
la famille Kazemi demande que sa dépouille soit rapatriée au Canada mais au lieu de cela Zahra est déclaré iranienne par les autorités islamiques en vertu de ses origines et enterrée hâtivement dans le cimetière de Chiraz dont sa famille était originaire par le passé.


Le 13/07,
la république des mollahs se fondant sur le fait que Zahra est iranienne, annonce au Canada qu’il s’agit d’une affaire interne dans laquelle il n’a pas à intervenir.

L’enquête officielle démontrera que c’est un dénommé Mohammad Reza Aghdam Ahmadi qui est responsable de la mort de Zahra Kazemi mais les charges seront levées l’année suivante et Ahmadi sera lavé de tous soupçons. On saura par la suite que Mortazavi avait menacé les témoins et que tous les témoignages étaient faux.


Le transfuge

Peu de temps après un docteur du nom d’Azam se rend en Suède et entreprend des démarches pour obtenir l’asile politique au Canada pour avec les membres de sa famille. En tant que invalide de guerre Iran/Irak, il avait obtenu des autorités islamiques l’autorisation d’aller se faire soigner d’une infection en Finlande. Le docteur Azam obtiendra immédiatement l’asile pour lui-même et sa famille et grâce à son témoignage inattendu on saura plus sur ce qui s’est passé dans l’affaire Kazemi. En effet Azam a vu Kazemi le 27/06 quand elle est admise à l’hôpital Baghyatollah en état de mort cérébrale.

Azam est le premier témoin visuel du milieu médical à avoir vu le corps de Mme. Kazemi et il déclare ce que la majorité des iraniens avaient deviné à savoir qu’elle avait été torturée. Mais Azam révélera qu’elle a été torturée de façon encore plus atroce que ne le pensaient les opposants les plus virulents du régime des mollahs. Azam était de permanence à l’hôpital lorsqu’il reçut Zahra Kazemi le 27/06 sur les coups de midi, allongée sur une civière de la prison d’Evine. Voici les propos de Sharam Azam.


Témoignage du docteur Azam (rapport d’autopsie bis)

Lorsque je l’ai vu, elle était sur une civière couverte par un drap, a priori sans connaissance et avec une contusion au front, et pour pouvoir faire un diagnostic, l’infirmière qui m’accompagnait a voulu l’intuber par le nez et tout de suite nous avons constaté que son nez était cassé. Il était donc évident qu’elle avait été battue.

D’ailleurs trois heures plus tard, Azam dit avoir rencontré des collègues à l’IRM qui avait été choqués par l’état de Mme Kazemi.

Ils m’ont demandé si elle avait été battue en prison et lorsque j’ai répondu que je le pensais aussi, ils m’ont raconté l’histoire de sa capture. De toute évidence ils faisaient partie des manifestants de ce jour et c’est à ce moment que j’ai compris les implications politiques qui allaient en découler. D’autant que Mme Kazemi avait été envoyée à l’hôpital avec trois miliciens des Pasdaran et un compte rendu de la prison qui faisait état d’une hémorragie suite à des problèmes digestifs.

Après la découverte du nez cassé j’ai donc entrepris avec l’infirmière d’examiner plus minutieusement cette femme. C’est alors que j’ai découvert que son corps entier était couvert de marques de violence, des contusions multiples du front aux oreilles étaient visibles, l’oreille interne était éclatée. Des éraflures profondes faites par des griffures d’ongle étaient visibles dans son coup, son épaule droite était luxée. Il manquait des ongles à certains de ses doigts et deux d’entre eux à la main gauche étaient cassés. Au vue des traces, Zahra Kazemi avait été fouettée et l’infirmière qui avait pratiqué l’examen génital m’annonça qu’elle avait été gravement endommagée, (elle avait constaté des) signes de viols avec violence (en Iran islamique, un médecin homme n’est plus légalement autorisé à pratiquer des examens génitaux sur les femmes).

Elle (Kazemi) portait aussi des traces de coups sur la ceinture abdominale et au dos des jambes, jambes sur lesquelles les traces de coups de fouet étaient très clairement visibles. Par ailleurs le gros orteil du pied gauche avait été écrasé. Enfin dans à l’arrière de la tête on pouvait constater une fracture crânienne.


Voici donc la liste récapitualtive de ce qu’a constaté le docteur Shahram Azam :

  • traces de coup sur le corps dans son ensemble
  • meurtrissures entre le front et l’oreille
  • fracture crânienne
  • doigts cassés
  • oreille interne éclatée
    -*viol avec violence
  • ongles cassés ou absents
  • œdèmes divers abdominaux
  • luxation d’épaule
  • nez cassé
  • orteil écrasé
  • griffures dans le coup
  • traces de coups de fouets

Pour mémoire, trois des cinq membres de la commission d’enquête présidentielle de Khatami étaient au courant des sévices faits à Mme Kazemi : ils ont participé à travers cette enquête à maquiller les faits.

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Bonne lecture et à très bientôt.  

[1L’inquiétant Saïd Hajarian est l’ami et le mentor d’Akbar Ganji. Ce dernier le considère comme un maître à penser et le cite volontiers dans ses interviews (dernière exemple : Entretien avec Mohammad-Reza Chahid de VOA)