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La crise iranienne et les variations des cours du pétrole
01.04.2006

Contrairement à l’impression que l’on a lors d’un passage à la pompe à essence avec une automobile en France, le prix du pétrole brut n’est pas en hausse. La baisse des cours depuis quelques temps est-elle la signification que les mollahs ne font plus peur avec leur pétrole ?



Selon l’AFP, les prix du pétrole reculaient vendredi à l’ouverture du marché new-yorkais, alors que l’Iran a répété que le pays n’utiliserait pas son pétrole comme arme politique dans la crise autour de son programme nucléaire et après des nouvelles rassurantes au Nigeria.

Sur le « New York Mercantile Exchange » (Nymex), le baril de brut cédait 65 cents à 66,50 USD vers 15H05 GMT. Et les commentateurs économiques auprès de la NYSE se sont empressés d’analyser les discours nigérians et iraniens : la production nigériane reprend et le chef de la diplomatie iranienne de passage à Genève a dit qu’il ne comptait pas se servir de l’arme du pétrole comme levier dans les négociations pétrolières.

Revenons quelques instants sur les propos de Manoucher Mottaki, et remarquons comme cet homme, en digne représentant du régime islamique de Téhéran, sait avec un art consommé user d’un langage tout à fait faux et mensonger sans que personne ne songe à le relever. En effet, la république des mollahs ne peut absolument pas user de l’arme du pétrole et ce pour diverses raisons, c’est ainsi que nous allons vous montrer que la situation est exactement l’inverse de celle présentée par Mottaki : c’est le régime de Téhéran qui est en position de faiblesse.

Le pétrole des mollahs n’est pas aussi vital qu’ils le prétendent, et ce parce que malgré le fait que l’Iran soit le 4° producteur mondial de pétrole (4 millions de barils/jour), cette production ne représente que 5% de la production mondiale. Or l’Iran n’en exporte que 4,7 millions de b/j (c’est-à-dire bien moins que ces 5%) et ces barils manquants peuvent à tout moment être compensés par la production (actuelle) des autres pays producteurs, qu’ils soient ou non membres de l’OPEP. Cette dernière peut compenser 50 % à 70% de ce manque et l’Agence internationale de l’Energie (AIE) avait assuré le 11 mars qu’elle pourrait compenser une absence éventuelle d’exportations de pétrole iranien pendant « de nombreux mois » [1].

Le pétrole des mollahs, s’il ne coulait plus, handicaperait bien davantage l’Iran que le reste du monde, car malgré les efforts de diversification les revenus du pétrole représentent toujours plus de 85 % des rentrées de devises de ce pays et que c’est donc l’effondrement de l’Iran déjà en mauvaise santé économique qui en serait la résultante mathématique.

Si l’Iran ne vend plus son pétrole, la république islamique ne pourra pas non plus en importer car il faut savoir que ce pays est un grand importateur [2], en effet Téhéran n’a pas les capacités de raffiner ses propres besoins et il est contraint d’importer l’essence (à un prix supérieur à celui du pétrole vendu).

Si les mollahs tentent de bloquer le détroit d’Ormuz pour couper la route du pétrole sortant du Golfe Persique, c’est la république islamique qui s’expose aux sanctions militaires des forces présentes dans le Golfe Persique, forces américaines, anglaises, Otan, France ....

En admettant que le Golfe Persique soit bloqué, il existe encore le recours à une pipeline traversant les Emirats Arabes Unis et débouchant de l’autre coté du Golfe Persique en mer d’Oman.

La fermeture du Golfe Persique entraînant dans un premier temps des difficultés pour les pétromonarchies, la république islamique ne peut aucunement compter sur un soutien des frères arabes, d’autant que bien que musulmans, il s’agit de pays sunnites qui ne feront pas de cadeau à un pays chiite.

Et cette liste (d’inconvénients pour le régime totalitaire des mollahs) n’étant pas exhaustive, tout tend à prouver qu’une fois de plus, le représentant de la diplomatie iranienne n’a fait que désinformation et gesticulation sur la scène internationale.

Les variations des cours du pétrole brut sur les marchés financiers sont toujours de précieux indices et d’excellents moyens d’analyse de la situation quand ils ne font pas suite à des spéculations. Ainsi que les cours aillent à la hausse ou à la baisse, il y a chaque fois un sens en rapport avec la situation politique.

Ainsi si d’aventure les cours repartaient à la hausse à l’approche d’un conflit en Iran, il ne faudrait pas y voir les raisons d’une crainte d’un manque ou d’une pénurie mais bien plutôt l’inquiétude des marchés par rapport aux contrats en cours avec ce pays, et spécialement ceux très avantageux de Buy-back des compagnies de pétroles. Ce serait alors un signe que les puissants pétroliers ne peuvent plus faire confiance dans l’avenir du régime des mollahs et décident de les lâcher, car actuellement des sociétés telles Total, Shell et autres BP sont des soutiens inconditionnels de ce régime, avançant qu’ils ne font pas de politique mais que du commerce.

[1L’AIE pourrait compenser une absence éventuelle d’exportations de pétrole iranien (lien).

[2L’Iran importe abbuellement 24 Milliards litres d’essence. L’économie iranienne est un château de cartes.