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Panahi à Cannes : la fuite en avant d’un système à bout de souffle
02.06.2010

Suivant un mécanisme bien huilé, nous avons une fois de plus été témoin du triomphe du cinéma des Mollahs à Cannes. Cette fois, il n’y pas eu de Palme pour un film iranien, mais le Prix d’interprétation féminine pour Juliette Binoche, actrice d’un film iranien, mais aussi animatrice du comité de soutien à un autre cinéaste iranien, Jafar Panahi. Ce prix a dégagé la voie pour que l’année prochaine, Jafar Panahi, un autre héritier du Khomeynisme reçoive sa consécration. Rien d’étonnant, puisque sur la Croisette, le client est roi et avec un portefeuille bien garni, un truand moscovite devient éminent industriel, un bédouin un prince de grande lignée ou un proxénète de Rio champion des bonnes mœurs. Alors, pourquoi un bourgeois-islamiste ne jouerait-il pas le rôle d’un activiste des droits de l’Homme ? De Palm Beach jusqu’au vieux port, Cannes n’est qu’un décor pour mettre en scène les scénarios les plus cyniques.

par Babak Khandani



Ce prix à Cannes était à point tombé pour nous faire oublier que le vrai visage de la République Islamique et de tous ceux qui ont œuvré pour sa création est Vakili-Rad, cet assassin libéré des prisons françaises pour être accueilli à Téhéran en héros. On apprenait alors que le meurtrier de Shahpur Bakhtiar ne s’était pas contenté de tuer sa victime, mais l’avait également découpée en morceaux. Mais Vakili-Rad n’est qu’un misérable homme de main qui passa dix-huit années de sa vie en prison pour permettre à d’autres de rester au pouvoir et de financer des navets comme ceux de Kiarostami et confrères.

Car, ce qu’on ne vous dit pas, c’est que l’industrie du cinéma dans le pays des Mollahs est sous un total contrôle de l’Etat. Aussi bien le financement que les autorisations de tournage sont au bon vouloir du prince et seules les personnes du sérail sont autorisées à produire la moindre chose. Les frais de déplacement et le train de vie des réalisateurs ou des acteurs ne peuvent être assurés que par le gouvernement des Mollahs. Dans ce système, rien n’échappe à la mainmise du régime et le moindre doute sur la fidélité entière d’une personne signifierait pour lui la mise à l’écart définitif de ce métier.

S’il existe un domaine où la République Islamique excelle, c’est bien l’art dramatique où les dirigeants du plus haut niveau s’y prêtent avec beaucoup de joie. Le régime des Mollahs n’est qu’une comédie à l’échelle d’un pays qui ne fait malheureusement pas rire ses habitants.

La bourgeoisie-islamiste est donc fin amateur du cinéma et son film préféré est Le Magicien d’Oz. L’histoire de ce film lui a appris qu’un diplôme suffisait pour remplacer le cerveau manquant, un réveil qui fait tic-tac un cœur qu’on n’a jamais eu, et une médaille qui brille, le courage qui fait défaut. Elle a aussi deviné qu’elle trouverait toujours une Dorothée qui la conduirait vers la cité d’Emeraude où habite l’imposteur magicien.

C’est dans les années 1970 que les islamistes ont compris l’importance de la notoriété obtenue grâce à l’appareil médiatique occidental. Quand Jean-Paul Sartre adhère au comité de soutien de Khomeiny et Michel Foucault affirme que la révolution menée par l’Ayatollah « rappelait quelque chose que l’Occident avait oublié depuis la Renaissance et les grandes crises de la chrétienté, c’est-à-dire, la possibilité d’une spiritualité politique… », il ne reste plus au commun des mortels que d’être persuadé que notre illuminé était un « Saint-Homme » (c’est Jimmy Carter qui l’a dit !) et que la chute de Shah libérerait des énergies telles qu’en peu de temps l’Iran connaîtrait une renaissance supérieure à celle connue par l’Occident.

De nos jours, le régime reconnu pour sa brutalité, a besoin plus que jamais de ces comités de soutien... Il les obtient en mettant en scène la victimisation des représentants de la spiritualité politique. Le dernier exemple en date est Jafar Panahi. Son cas a fait couler beaucoup d’encre pendant le festival de Cannes. Le festival fini, il a été libéré pour être à nouveau projeté sur la scène médiatique occidentale. Aussitôt il a souligné l’impact des « larmes de Mme Juliette Binoche, et les conséquences importantes qu’ont eues ces images, y compris chez le peuple ». La grande déception des Jafar Panahi ou Kiarostami sera le jour où ils se rendront compte que, des Michel Poiccard qu’ils sont, Juliette Binoche n’est qu’une Patricia. Une fois blasée, elle les lâchera et ne lèvera pas le petit doigt pour leur éviter le lynchage (médiatique bien sûr). Nos faux cinéastes mais vrais délinquants n’auront alors qu’à dire : « c’est vraiment dégueulasse ». Juliette Binoche osera-t-elle nous demander : « Qu’est-ce que c’est dégueulasse ? »


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Pour en savoir + :
- Iran : Les habits neufs de l’Empereur Jafar !
- (4 Mars 2010)

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