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Iran : Un petit durcissement trompeur sur le front des sanctions
26.03.2010

Dans tout conflit diplomatique, il y a une grande part de diplomatie de l’ombre ou de négociations secrètes. Dans le cas de la crise nucléaire iranienne initiée par Washington, cette part très importante a été confiée par les Américains à la Turquie. Alors que tout commerce d’envergure est strictement interdit avec les mollahs, les Turcs leur proposent régulièrement d’importants contrats d’investissements à des moments précis où ces derniers sont au plus mal par la faute des sanctions américaines. Dans le cadre de ce chantage diplomatique, la Turquie avait récemment affirmé qu’elle voulait investir plusieurs milliards de dollars dans le secteur gazier iranien : elle vient d’annoncer un possible abandon de ces investissements au moment où les membres du Conseil de Sécurité se sont réunis pour parler sanctions. | Décodages |



Taner Yildiz, le ministre turc de l’énergie, a affirmé hier que son pays était « hésitant quant à la pertinence de son investissement dans le secteur gazier iranien ». Il a écarté tout motif politique (c’est-à-dire les pressions américaines) pour évoquer des « motifs purement économiques : des cabinets de conseils lui auraient signalé un manque d’intérêt du projet et l’alternative d’investir ses avoirs dans le secteur gazier irakien en coopération avec Gazprom ». Yildiz a promis « d’annoncer sa réponse (aux Iraniens) dans deux semaines, après d’autres consultations en cours ».

Analyses | D’un point de vue économique, ces déclarations ne sont pas convaincantes car le gisement gazier South Pars est le plus important au monde et les mollahs, des partenaires fauchés prêts à accepter n’importe quel prix. D’ailleurs si Washington n’avait pas adopté des lois pour sanctionner tout investissement sur ce gisement, toutes les grandes compagnies se sauraient ruées sur place ne laissant aucune miette à la minuscule compagnie pétrolière turque. En l’absence de ces géants impitoyables et puissants, l’investissement est plus que pertinent. Le propos ne peut, en aucun cas, être commercial. En fait, tout simplement, la Turquie retire sans aucune raison commerciale valable une proposition qu’elle avait faite avec l’accord tacite de Washington dans un contexte particulier en échange d’un assouplissement de la position de Téhéran. De fait, situé dans son contexte de diplomatie de l’ombre téléguidée par Washington, le retrait annoncé est une forme de pression américaine sur Téhéran.

Décodages | En retirant le cadeau proposé, Washington laisse entendre que l’avenir économique du régime dépend de son bon vouloir. Cela relève de la gestion des pressions, ensemble de dispositions grâce auxquelles Washington utilise la crise nucléaire qu’il a initiée pour malmener les mollahs (sans les renverser) afin de les forcer à devenir ses alliés régionaux, c’est-à-dire des complices pour agiter l’Asie Centrale afin de priver la Chine et la Russie de cette région riche en réserves gazières.

Ce petit durcissement a lieu au moment où ces deux pays ont donné les signes de vouloir constituer un front parallèle de sanctions pour priver Washington de l’exclusivité des pressions sur Téhéran. Dès que leur initiative a débouché sur une première réunion pour parler des sanctions communes via l’ONU, de peur que la très précieuse gestion des pressions ne lui échappe, Washington est passé à l’offensive avec cette déclaration turque.

Ce n’est pas la seule initiative américaine pour garder une longueur d’avance dans la gestion des pressions sur les mollahs puisque le même jour ses enquêteurs du tribunal pénal international ont convoqué 12 membres du Hezbollah dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat de Rafik Hariri, laissant planer le doute sur une éventuelle inculpation qui sera l’arrêt de mort politique du Hezbollah au Liban et en conséquence la fin des ambitions régionales des mollahs.

C’est une évolution intéressante dans la crise nucléaire iranienne puisque pour avoir cette petite longueur d’avance, les différents acteurs de la crise qui voulaient éviter une escalade dans les sanctions pour diverses raisons se voient obligés de se lancer dans une course aux sanctions.


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Pour en savoir +sur la diplomatie de l’ombre :
- Iran : Un sandwich turc à Téhéran
- (28 OCTOBRE 2009)

| Mots Clefs | Pays : Turquie |

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Apaisement |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : Chine |
| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : RUSSIE |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions (du Conseil de Sécurité) |
| Mots Clefs | Décideurs : P5+1 (les Six) |