Il y a plusieurs mois, est né en Iran le Mouvement Vert qui réclamait la victoire de Moussavi qu’il présentait comme un modéré démocrate. Or, ce dernier est le représentant de la pensée la plus rigide et la plus islamiste du régime. Sur la base de leur connaissance des idées et du passé de Moussavi, les Iraniens ont compris que ce Mouvement était une création du régime pour simuler la démocratie et ils ont boycotté ce Mouvement. En fait, Téhéran avait une autre idée en tête : la simulation n’était pas destinée aux Iraniens mais à Obama, il voulait lui arracher un soutien officiel. Si ce dernier avait fait ce geste, il aurait légitimé le Mouvement Vert comme porte-parole légitime du peuple iranien et n’aurait pas pu sanctionner son refus d’un compromis sur le nucléaire à l’issue de l’ultimatum qui expirait le 31 décembre 2009.

Ce soutien ne vint jamais. Téhéran a dû attirer les Iraniens dans la rue avec un changement dans les slogans du Mouvement Vert avant d’annoncer un carnage. Obama a ignoré le Mouvement Vert et ses dirigeants, mais les médias américains ont commencé à amplifier les nouvelles de carnage mettant les mollahs dans un grand embarras.

Les mollahs ont alors recommencé plusieurs fois le même schéma, mais en remplaçant les annonces de carnage par des annonces d’arrestations musclées et des condamnations injustes car il voulait obtenir le soutien d’Obama sans écoper de nouvelles critiques des puissants médias américains. Malgré des scénarii très créatifs, cette approche n’a pas non plus été couronnée de succès. Après 6 mois d’efforts infructueux, à la veille de la fin de l’ultimatum, les mollahs ont renoué avec le schéma incluant l’annonce d’un carnage pendant la manif du 27 décembre. Cette fois les médias américains ont évoqué une révolution en Iran, preuve de l’impopularité du régime. On a alors vu Moussavi prendre la parole pour affirmer que le Mouvement Vert n’avait jamais été hostile au régime, mais soucieux qu’il revienne aux principes de base édictés par Khomeiny.

Ce manifeste salué par tous les sites du Mouvement Vert a été superbement censuré par les médias Occidentaux car ses propos étaient la preuve que le régime des mollahs est monolithique, définitivement irréformable, imperméable à tout dialogue. Dépité, Téhéran a recommencé l’opération avec Karroubi dont les propos ont été aussi censurés par les médias Occidentaux. Téhéran a compris le message : c’est ce qui nous vaut cette nouvelle évoquant la tenue de débats apaisés à la télévision iranienne entre les partisans d’Ahmadinejad et les partisans de Moussavi !

Le débat apaisé est à la fois l’expression de l’absence d’hostilité du Mouvement Vert contre le régime, mais aussi l’expression de la réformabilité qui plait tant à nos amis les Occidentaux. On a même poussé le perfectionnisme jusqu’à organiser la nouvelle autour de seconds couteaux, inconnus en Occident [1], plutôt qu’autour de Moussavi et Karroubi qui ont été grillés par leurs déclarations.

Tout le monde est ravi sauf que les Iraniens n’adhèrent pas à cette mise en scène de débats à la télévision iranienne appelée « Laine et Verre » en référence à la barbe omniprésente derrière le verre du tube cathodique. La raison de ce manque d’intérêt est l’absence de vrais sujets dans ces soi-disant débats, l’absence de toute référence à l’entrée en vigueur de la loi de la suppression des subventions qui est au centre de la préoccupation de tous les ménages. Les Iraniens n’ont que faire de palabres sur Moussavi qui fait partie de l’équipe dirigeante depuis 22 ans quand on vient de leur annoncer que les prix n’augmenteraient pas en fonction des subventions qu’ils recevaient, mais en fonction de la corrélation entre toutes les hausses. Ainsi l’électricité vendue à 1/5 de son coût de production pourrait être vendue non pas 5 fois plus chère mais 21 fois plus chère. Le débat qui simule une démocratie mais se fiche du peuple est même vu comme une insulte, l’expression d’un mépris qui donne envie d’étriper un jour tous les dirigeants surtout les simulateurs démocrates comme les Verts faussement victimisés, journalistes soi-disant censurés et les gens du pouvoir comme Moussavi.

Il serait utile de rappeler que tous les écoliers iraniens surtout ceux de l’école publique sont tenus de suivre des cours de maniement d’armes pour obtenir leur passage à la classe supérieure. Tout jeune Iranien de plus de 14 ans sait monter et démonter plusieurs types d’armes de combat. De fait, la colère présente en Iran est sans commune mesure avec la même colère dans un autre pays.

C’est pourquoi nous recommandons à ceux qui ont des intérêts économiques en Iran de ne pas se berner eux-mêmes avec le mythe de la réformabilité en diffusant ce genre de nouvelle. Le régime qu’ils protègent ainsi est assis sur une bombe à retardement.

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 (7 JANVIER 2010)