Iran : La semaine en images n°100 17.01.2010 C’est une semaine riche en événements. Au début de la semaine, une bombe a tué un important maillon du programme nucléaire iranien. L’attentat a donné lieu à des accusations anti-américaines. Il a aussi provoqué des remous politiques : le Mouvement Vert, fausse opposition interne pro-Khomeiny et pro-nucléaire, qui cherche à mobiliser les Iraniens sous sa bannière pour légitimer ses positions, a appelé les Iraniens à transformer les funérailles de ce martyr en vague verte. Ce 100ème numéro de la semaine en images vous permet de voir si cet appel a été un succès ou pas. Cette semaine, le régime qui n’a plus de ressources par la faute des sanctions américaines a voté la suppression des subventions pour le peuple et l’interdiction de tout retrait bancaire élevé aux riches Bazaris. Ce 100ème numéro de la semaine en images vous permet de voir qui a réagi à ces mauvaises nouvelles. Et enfin, pour ce 100ième numéro de la semaine en images, le régime des mollahs nous a fait un petit cadeau avec un trucage photo hallucinant et totalement raté pour transformer en méga succès le voyage d’Ahmadinejad à Ahwaz qui a été une cata. Bombe | Le premier évènement de la semaine a été l’attentat à la bombe contre le professeur Massoud Alimohammadi, chef du département nucléaire de l’université de Téhéran. A la minute où l’on a appris sa mort, Internet s’est rempli de témoignages d’amis, proches ou collègues de la victime qui ont repris les accusations officielles d’assassinat organisé par les ennemis de la république islamique, mais en précisant que le professeur Massoud Alimohammadi n’avait ni personnellement, ni professionnellement, strictement aucun lien avec le programme nucléaire iranien. Or, Alimohammadi était le chef du département nucléaire de l’université de Téhéran, c’est-à-dire qu’il était au courant des parcours universitaires de tous les savants atomistes du régime. Il était en quelque sorte l’annuaire vivant de tous les acteurs clefs du programme nucléaire iranien. De ce fait, les Etats-Unis ou tout autre Etat désireux de percer le mystère de ce programme n’avaient aucun intérêt à le voir disparaître, mais à l’avoir sous la main. De fait, l’accusation ne tient pas. Mais quand on y ajoute l’insistance permanente sur l’absence de liens professionnels avec le programme nucléaire, cela devient un peu louche, d’autant qu’il était l’annuaire vivant de tous les acteurs clefs du programme nucléaire iranien. De par l’intérêt que représentaient ces infos pour les Etats étrangers, il est inconcevable qu’Alimohammadi n’ait pas été placé sous surveillance. C’est exactement cet argument qui a été utilisé sur les différents sites de dialogue en persan pour pointer l’accusation vers le régime lui-même. D’autres indices se sont accumulés au fil de la semaine dont le principal a été l’absence visible d’ambulance sur les lieux comme si les autorités appelées au secours savaient qu’il n’y avait pas d’autres victimes ! (Vous pouvez cliquer puis zoomer sur les images pour les agrandir une ou deux fois)
Funérailles | Ce qui est étonnant est que ces détails qui ont sauté aux yeux de simples internautes n’ont aucunement interpellé les journalistes ou animateurs soi-disant dissidents du Mouvement Vert. Tous ont joint leurs voix à celles des ténors du régime pour dénoncer un lâche assassinat par des ennemis étrangers qui espèrent profiter des saines querelles entre les composants de la vie politique iranienne. Tous ont dénoncé l’hypothèse qu’Alimohammadi était sur le point de quitter l’Iran. L’un d’eux interviewé par la Voice of America a même rejeté toute possibilité que le meurtre soit l’oeuvre du régime, une position qui n’a été nullement contestée au sein du Mouvement, chacun s’est alors demandé pourquoi dans ce cas ce Mouvement appelait-il les Iraniens à transformer les funérailles d’Alimohammadi en vague verte d’opposition ? C’est ce que reprochent les Iraniens au Mouvement vert ! Il veut profiter de toute occasion pour mobiliser les Iraniens sous sa bannière, mais on ne l’entend guère parler comme le peuple. L’affaire de l’attentant n’est qu’un exemple insignifiant. Cette semaine, le régime a adopté la loi de la suppression des subventions qui va multiplier les prix des produits de base par un coefficient allant de 5 à 60 alors que les salaires resteront bloqués. Eh bien, aucun membre du Mouvement vert n’a condamné cette loi, ils ont même tous voté pour en la saluant comme étant la réforme la plus équitable jamais adoptée depuis 30 ans ! Si au lieu d’appeler à transformer les funérailles d’Alimohammadi en vague verte, les Verts avaient appelé à une manifestation contre la loi des subventions, ils auraient déplacé 60 millions de personnes, mais ils auraient aussi renversé le régime. Aujourd’hui chacun sait que cela n’arrivera pas car le Mouvement vert n’est pas là pour cela, pas là pour être la voix du peuple. C’est pourquoi les Iraniens ont encore boycotté ce Mouvement bidon attaché du régime. L’appel du Mouvement Vert a même tenu à l’écart les curieux et le régime s’est retrouvé avec un problème de nombre de participants. Ce problème a imposé l’absence de couleur verte pour ne pas nuire à la réputation de popularité du Mouvement Vert. On s’est donc retrouvé avec une toute petite foule non verte dont les proportions ont été revues à la hausse grâce au logiciel Photoshop idéal pour remplir les rues, ce qui a donné ceci. (Vous pouvez cliquer puis zoomer sur les images pour les agrandir une ou deux fois)
Bazar | Cette semaine, le régime n’a pas seulement pris une claque de sa base populaire, mais il est aussi entré en conflit avec le Bazar, allié de toujours, base économique du régime. Par un hasard de calendrier, ce mardi meurtrier, le régime a annoncé un possible effondrement de son système bancaire et à partir de là il est entré en conflit avec le Bazar car il a attribué l’effondrement annoncé aux clients des banques alors que chacun sait que cela résulte des prélèvements effectués par le régime pour résister aux sanctions américaines. Le Bazar qui reproche aux mollahs leur refus de compromis avec les Américains a décidé de sauver ses billes, sans doute en se ruant vers les banques pour retirer leurs avoirs car le mercredi 13 janvier, le régime a interdit tout retrait supérieur à 15 millions de tomans, somme convertible en 15,000 dollars en Iran qui applique un taux de change préférentiel très sous-évalué pour ses hommes d’affaires liés au régime. Les Bazaris se sont retrouvés encore une fois en conflit ouvert avec le régime. Cela était arrivé en octobre 2009 quand Téhéran avait refusé la dernière offre de réconciliation de Washington. Le régime avait à ce moment incendié la section textile du Bazar. Cette fois, il a reculé un peu en évoquant la création de banques étrangères en Iran, banques capables de garantir la sécurité des avoirs bloqués sur le territoire national. Nous avions alors conclu qu’il avait pris conscience des potentiels révolutionnaires du Bazar car il a toujours été au centre des révolutions en Iran. Nous avions tort car le Bazar a encore flambé dans la nuit de jeudi à vendredi. L’info a été diffusée hier. Alors qu’en octobre dernier, la section textile qui est la plus politisée depuis 100 ans- avait été très endommagée, cette fois le feu qui a pris dans la section Papier, pourtant très inaccessible (1ère photo), a été très vite maîtrisé, mais tous les médias du régime y compris les Verts ont rappelé que le Bazar est vétuste et qu’il ne serait pas impossible qu’il brûle entièrement. © WWW.IRAN-RESIST.ORG
Bain de foule | Les mollahs ont donc cette semaine expérimenté deux situations de rupture avec une base fondamentale pour la survie de leur régime. Ceci explique sans doute le voyage d’Ahmadinejad à Ahwaz. On peut parler d’un test étalon pour mesurer la capacité de mobilisation de la base fondamentale car la région est l’une des plus hostiles au régime. L’hostilité résulte du fait que le Khouzestan est passé du statut de région très prometteuse et destinée sous le Chah à un avenir en or en raison de la concentration des activités pétrolières, nucléaires et portuaires, à une région en guerre par la volonté de Khomeiny d’exporter la révolution islamique en Irak. La région a été dévastée notamment parce que les dirigeants du régime l’ont prolongée pour se remplir les poches de commissions perçues sur les achats d’armes, mais depuis ils n’y ont entrepris aucune reconstruction au point que certaines grandes villes n’ont toujours pas d’eau ! Le régime voulait tester sa capacité à mobiliser sa base sur le terrain le plus défavorable et il n’a pas été déçu : selon nos infos, la mobilisation a été nulle ce qui a donné lieu à un exercice inédit pour les retoucheurs d’images : transformer les rues complètement vides en rues noires de monde. Le résultat vaut le coup d’œil. Voici d’abord le résultat de nos artistes retoucheurs, puis les défauts que nous avons trouvés.
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