amplification de la crise | Depuis toujours Téhéran joue la carte des provocations verbales et des annonces anxiogènes pour engager les Etats-unis et leurs alliés européens dans une escalade afin que par la peur d’une guerre entraînant une rupture de l’approvisionnement pétrolier puis une nouvelle crise économique mondiale, tous cessent leur pression et acceptent le régime tel qu’il est. Pendant longtemps, les Occidentaux ont diffusé ces propos, mais ce n’est plus le cas depuis fin octobre quand Téhéran leur a remis une réponse quasi négative à leur offre de la dernière chance après 25 jours de flou délibéré (peut-être bien que oui, peut-être bien que non).

feinte sur feinte | Ne souhaitant aucune escalade ou mesures punitives parce qu’ils ont intérêt à avoir les mollahs comme alliés, les Etats-Unis ont opté pour un plan d’esquive ainsi que les Européens qui ont des intérêts à protéger contre de nouvelles sanctions. C’est pourquoi les agences de presse de chaque pays, qui fournissent la matière première pour des articles publiés dans la presse, ont expurgé de la réponse quasi négative des mollahs ses éléments négatifs pour en éliminer le poison. Les dépêches ainsi trafiquées laissaient entendre que la voie restait libre pour poursuivre l’apaisement et les négociations. Les articles publiés sur la base de ces dépêches affirmaient évidemment le même point de vue.

Les mollahs ont été bien déçus. Peut-être pour la première fois se sont-ils même mis à aimer le site Iran-Resist qui a diffusé le contenu exact de leur réponse divulguée partiellement par un discours d’Ahmadinejad, mais aussi des articles parus dans les médias iraniens. Mais l’initiative étant de haut-niveau, les médias occidentaux s’en sont tenus à la version souhaitée par les Etats. En réponse, Téhéran s’est lancé dans une folle fuite en avant de provocations qui à chaque fois a reçu le même accueil : une expurgation du poison suivie de l’indifférence pour des propos ainsi fortement étiolés.

Pour calmer définitivement les mollahs, les Six ont parachevé ce traitement médiatique indifférent par le renouvellement permanent de leur offre d’entente, par des solutions de substitution et aussi par l’adoption d’une résolution non-punitive à l’AIEA au lieu d’une résolution dotée de sanctions au Conseil de Sécurité.

Très déçu, Téhéran a décoché une super provocation avec l’annonce de la construction de 10 nouvelles usines d’enrichissement capables d’augmenter sa capacité actuelle de production d’uranium enrichi par 250 ! Cette annonce n’a rien changé. Estimant qu’il était allé trop loin sans rien obtenir de positif, Téhéran a programmé une interview télévisée d’Ahmadinejad où ce dernier a certes répété les positions de Téhéran, mais en modérant les propos tenus la veille avec une insistance sur l’absence de projet militaire et aussi la disponibilité pour poursuivre le dialogue autour de la dernière offre américaine avec une participation franco-russe. Pour relancer cette solution qu’il avait écarté en remettant en cause la participation de la France, Ahmadinejad a également eu des propos très amicaux en direction de Sarkozy qui aurait selon Téhéran « envie de faire le bien, mais serait empêché de le faire à cause d’un ministre des affaires étrangères un peu encombrant et simplet ».

plan B | Malheureusement pour Téhéran, les Etats-Unis et leurs alliés n’ont pas détecté la belle nuance d’Ahmadinejad et n’ont quasiment pas consacré d’article à cette interview de recollage, sans doute à cause des propos très impolis sur Bernard Kouchner.

système D | Boudé par les médias, Téhéran a décidé de les attirer avec une petite ruse pour leur exposer sa nouvelle position (retour aux négociations sans fin). Le régime a chargé Ali-Asghar Soltaniyeh, son ambassadeur auprès de l’AIEA, de se rendre à la Conférence de la Solidarité avec le Peuple Palestinien à Vienne avec la mission de tenir des propos modérément hostiles sur Israël (loin des excès habituels de Téhéran). Il espérait un intérêt amusé des journalistes qui auraient permis à son représentant à l’AIEA de croiser quelques micros où de fil en aiguille, il aurait aussi exposé les nouveaux points de vue modérés de Téhéran.

not happy end | Hélas, cette autre belle nuance des mollahs n’a pas séduit les médias. Echaudés par des propos toujours très hard des différents dirigeants du régime sur Israël, les journalistes ont boudé l’intervention de l’envoyé spécial des mollahs au physique très avenant de nain de jardin. On n’attrape pas des mouches avec du vinaigre. Téhéran devra charger de recette pour attirer ces mouches, mais il ne le fera pas car le mollah et le franc parler font deux.

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dernier recours | En l’absence de cette option franchise, le régime des mollahs se reportera sur ses mouches d’élevage comme Delphine Minoui, George Malbrunot [1] et quelques autres journalistes ou lobbyistes qui ont le privilège de recevoir régulièrement des visas pour aller en Iran et rapporter avec talent ce que les mollahs souhaitent nous faire croire.

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article complémentaire :
 Iran : Vers un changement nuancé de la politique nucléaire
 (2 DÉCEMBRE 2009)