La candidature de Karroubi en soi | Karroubi avait déjà annoncé sa candidature en août dernier : au moment où Larijani est tombé en disgrâce redonnant de l’actualité à une réélection d’Ahmadinejad.

Pour l’anecdote, il faut savoir que Karroubi est un personnage moqué en société, mais aussi dans son parti, pour avoir promis lors des dernières élections un billet de 50 dollars à quiconque voterait pour lui ! Pour les présidentielles 2009, il a évoqué la prime de 100 $ ! Sa candidature loufoque a donc été perçue comme un cadeau à son adversaire (Ahmadinejad).

L’enjeu | Pour bien comprendre la situation, il faut se remémorer que l’enjeu de ces élections n’est pas la gestion interne du régime mais sa politique extérieure en relation avec le programme nucléaire ; c’est-à-dire son choix d’un compromis ou pas avec l’Ouest plus particulièrement avec Washington.

Téhéran utilise son intransigeance pour excéder Washington et obtenir des clauses d’entente plus favorables à ses intérêts régionaux (garanties de sécurité pour le régime, le Hezbollah, le Hamas et les Sadristes irakiens). Mais en cas d’entente, Téhéran devra cesser son intransigeance et devenir plus modéré.

La réélection d’Ahmadinejad (accompagnée d’une candidature aoûtienne de Karroubi) a été une réponse de Téhéran à la tentative américaine de remodeler le régime de l’intérieur avec la complicité de Larijani et ses amis issus des Pasdaran.

Mais vers la mi-septembre, Washington a répondu positivement à une demande iranienne de lui lancer une invitation officielle pour la reprise des négociations et Téhéran a alors commencé à évoquer une candidature de Khatami, candidature logique et rassurante pour l’Ouest.

Cette candidature hésitante qui a changé tout au long du mois de septembre est finalement abandonnée car les Etats-Unis ont trouvé une variante d’accès vers l’Asie Centrale via une entente avec les Talibans ce qui repousse à plus tard l’urgence d’une entente avec l’Iran. Par ailleurs, Washington a aussi œuvré pour affaiblir les deux partisans de dialogue avec Téhéran, la Chine et l’Europe.

Dans ces conditions, Téhéran revient à son option de la poursuite de la confrontation via un non modéré c-à-d Ahmadinejad. C’est pourquoi le régime élimine de la course à la succession d’Ahmadinejad, le candidat Khatami, censé le battre logiquement. Il réactive la candidature du ridicule Karroubi qui n’a aucune chance d’être élu.

Est-ce tout ? | La roue pourrait encore tourner si le besoin se faisait sentir, mais il ne faut pas parier sur une réélection de Khatami car en septembre il a été le second choix d’alternative à Ahmadinejad.

Le candidat alternatif est le mollah Hassan Rohani, (ex-collaborateur de Khatami, ex-négociateur nucléaire) qui se veut le représentant d’une tendance nouvelle mi-modérée mi-conservatrice : c’est un homme nouveau avec un programme flou, un joker qui permettra au régime de garder le mystère dans ses futurs choix aussi bien sur le plan nucléaire et régional. Cependant, le régime pourrait réactiver la candidature de Khatami afin de le faire battre par Rohani et ainsi lui donner une légitimité sans faille.

Cette élection sans enjeu national sera intéressante pour les choix tactiques qu’elle offre au régime pour résister aux pressions américaines et consolider sa base sur le plan international.

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