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Point de presse du Quai d’Orsay
17.09.2005 ( à jouer du langage jusqu’à l’absurde )

Ministère des Affaires Etrangères : point de presse du 16 septembre (déclarations du porte-parole adjoint).



- Avez-vous des informations concernant la réunion des trois ministres des Affaires étrangères de France, d'Allemagne et de Grande-Bretagne avec leur homologue iranien ?

- Jusqu'à présent, on avait compris que si les Iraniens ne revenaient pas sur le fait que l'usine de Ispahan était en marche pour la convention de l'uranium d'ici au 19 septembre, le dossier iranien serait transféré devant le Conseil de sécurité. Y a-t-il un changement de ton ? A quoi est-il du ?

Effectivement, il y a eu une rencontre à New York entre les trois ministres européens et les autorités iraniennes qui a permis de rappeler aux Iraniens qu’elle était notre position et d’entendre la position des autorités iraniennes. Cela dit, comme vous le savez, le président iranien va s’exprimer demain à l’Assemblée générale des Nations unies. Chacun est convenu que, tout en maintenant une pression forte, nous évaluerons les propositions qui pourront être faites demain. En fonction de ces propositions, nous déciderons de la suite qui sera donnée. Comme vous le savez, il y a une réunion du Conseil des gouverneurs de l’AIEA lundi 19 septembre. Nous sommes donc dans une séquence très rapprochée mais le discours du président iranien demain est un élément important qu’il faudra prendre en compte.

- La règle d'obligation pour les Iraniens d'arrêter la conversion de l'uranium est-elle toujours valable ou y a-t-il maintenant une autre interprétation ?

Nous n’avons pas changé de position sur le fait qu’il est nécessaire de respecter les accords de Paris et de respecter les règles du TNP. De ce point de vue, il n’y a aucun changement de position nous concernant.

- Le "Financial Times" a écrit ce matin que l'Iran proposera demain un compromis avec la coopération de la Russie et de la Chine. La France est-elle intéressée ?

C’est ce que j’ai rappelé il y a un instant, nous attendons les propositions qui pourraient être faites par le président iranien et sa délégation demain puisqu’il s’exprimera devant l’Assemblée générale des Nations unies. C’est effectivement un élément très important.


- Hier, le président iranien a proposé de partager son expérience dans le domaine nucléaire civil avec les autres pays musulmans. Est-ce contraire au TNP ? Quel est votre commentaire ?

Le commentaire que l’on peut faire à ce sujet c’est que, dès lors que l’on reste dans le cadre du Traité de non-prolifération et donc, que l’on reste dans une coopération qui ne va pas au-delà du Traité, chacun des partenaires peut avoir les coopérations qui restent dans ce cadre. Pour nous, l’important, c’est le respect des clauses du Traité de non-prolifération.

- Vous voyez donc d'un "bon oeil" cette proposition ?

Je ne dis pas cela, je dis que dès lors que l’on reste dans le cadre du Traité, les partenaires peuvent engager des coopérations.


- Il n'y a donc pas d'objection de principe ?

Dès lors que l’on reste dans le cadre du Traité, il n’y a pas d’objection de principe.

- L'une des conditions que vous poseriez serait donc que le pays à qui l'on souhaiterait transférer cette technologie nucléaire civile soit signataire du TNP. Est-ce bien cela ?

C’est ce que je dis en effet.

- Il semblerait que la Chine et la Russie ne soient pas d'accord avec les idées des Européens et des Américains. Peuvent-ils bloquer toute initiative au Conseil de sécurité ?

- Vous semblez très pressés de faire aboutir les choses pour l'Iran, mais, concernant Israël, on fait comme si rien n'existait. On sait qu'elle détient un grand arsenal nucléaire, mais personne ne dit rien. Comment expliquez-vous cela ?

Quelle est, précisément votre question ?

- J'ai lu une déclaration de la Russie qui indique que l'arsenal nucléaire d'Israël est civil uniquement. Dans le même temps, Israël possède l'armement nucléaire, mais personne n'en parle. Pourquoi ?

Le point fondamental de notre position vis-à-vis de l’Iran, c’est que nous considérons justement que le Traité de non-prolifération nucléaire, qui est le cadre dans lequel le développement d’une énergie civile peut se développer, n’a pas été respecté.

Il y a eu plusieurs contraventions au Traité qui ont été observées et le dernier rapport de M. El Baradeï montre qu’il y a eu un certain nombre de manquements. C’est donc dans ce cadre-là, vous connaissez bien le problème je n’y reviendrai pas, que le dialogue a été engagé entre les trois Européens qui parlent au nom de la communauté internationale et l’Iran.

Nous sommes bien au clair sur le fait qu’il nous faut rester dans ce cadre et que les Iraniens nous donnent les garanties pour que leur programme auquel ils ont droit soit un programme purement civil qui reste dans le cadre du TNP.

S’agissant d’Israël, comme vous le savez, ils ne sont pas signataires du Traité de non-prolifération, ce qui est un autre problème, ce qui est un souci forcément, ce qui fait que la négociation est différente, les conditions de la négociation sont différentes.

- Bien sûr, je comprends bien, mais pourquoi n'obligez-vous pas Israël à suivre les mêmes règles ? Actuellement se tient l'Assemblée générale des Nations unies, M. Sharon y assiste, ce serait une bonne opportunité non ? Pourquoi est-on si timide avec Israël ?

Comme vous le savez, la France est absolument favorable à ce que le maximum de pays signent le Traité de non-prolifération nucléaire et chaque occasion qui se présente pour inviter les non-signataires à rejoindre le groupe est saisie dans ce sens. A ma connaissance, chaque année, il y a effectivement une résolution qui est adoptée sur la dénucléarisation du Moyen-Orient, ce qui prouve bien que nous sommes préoccupés par cette situation.

Mais, ne pensez pas que nous ménageons nos efforts pour inviter chacun des pays à signer le Traité de non-prolifération. Nous les invitons à le signer et nous les y invitons fortement. De plus, lorsque l’on signe un tel traité, cela engage et nécessairement, il y a ensuite des obligations pour les signataires, d’où la question iranienne.

- Vous avez dit que pour une coopération dans le domaine nucléaire civil, les pays non-signataires doivent signer le TNP. Est-ce bien cela ?

J’ai dit que s’il devait y avoir une coopération entre plusieurs Etats, en effet, il fallait que cela reste, de la part de celui qui engage la coopération, dès lors qu’il est signataire du Traité de non-prolifération, que cela reste dans le cadre du Traité.

- Alors, si vous me le permettez, j'aimerai relever une contradiction : il y a deux jours, le Premier ministre Indien a discuté avec le président Chirac sur une coopération dans le domaine nucléaire civil. L'Inde n'est pas signataire du TNP. Comment concilier la position ferme à l'égard de l'Iran et la position tolérante et coopérative avec un autre pays qui n'est pas signataire avec qui ont envisage, éventuellement de faire une coopération nucléaire ?

Effectivement, nous l’avons d’ailleurs dit ici même, nous avons commencé à discuter de cette question avec les Indiens. A ce jour, il n’y a pas de coopération avancée dans le domaine nucléaire avec les Indiens, c’est un début de discussion.

Dans le cadre de cette discussion, la question de la non-prolifération sera une question essentielle et il est évident qu’aujourd’hui, les Indiens n’étant pas signataire du Traité, nous examinerons cette coopération en ayant à l’esprit cette limite dans nos discussions.

Mais, c’est une discussion qui est engagée aussi avec d’autres Etats et, comme vous le savez, chacun sera très vigilant sur les conséquences de cette coopération mais elle n’a pas encore concrètement débutée.

- Pourtant, on annonce des contrats ?

Pas à ce stade.

- Est-il possible de reprendre le dialogue avec l'Iran dans un cadre formel de négociations si l'Iran n'a pas, auparavant arrêté toute activité sensible, notamment la conversion à Ispahan. Est-ce un préalable absolu ? Ou bien, après le discours de demain, peut-on envisager une reprise de dialogue formel, sans l'arrêt d'activités sensibles ?

Honnêtement, je ne peux pas vous en dire beaucoup plus que ce que je vous ai dit tout à l’heure. Nous attendons les propositions iraniennes qui seront faites demain, nous évaluerons en fonction de l’équilibre de leurs propositions si nous pouvons poursuivre le dialogue, comme nous le souhaitons, ou si nous devons rentrer dans une étape plus exigeante qui serait, comme nous l’avions indiqué, la saisine du Conseil de sécurité.

Notre objectif est de poursuivre le dialogue. Aux Iraniens de faire en sorte que les conditions de ce dialogue soient réunies, espérons-le, dès demain.

- Il n'y a donc pas de préalable ?

C’est aux Iraniens de nous faire des propositions demain, nous jugerons sur pièce.

- Pour la France, qu'est-il préférable, un pays qui signe le TNP et qui a, parfois, quelques manquements ou un pays qui ne signe pas le TNP ?

- Concernant la question iranienne, les autorités ont fait savoir qu'elles souhaitaient redémarrer le site très sensible de Natanz après celui d'Ispahan dont tout le monde parle, pourtant, Natanz est potentiellement beaucoup plus dangereux. Ce problème entre-t-il dans les discussions actuelles avec les Iraniens ? Quelle est la réaction de la France à ce sujet ?

Sur la première question, nous préférons évidemment que les Etats soient signataires du TNP et, comme je l’ai dit, nous les invitons à le faire.

Sur le deuxième point, cela fait partie du cadre global des discussions mais comme je l’ai indiqué précédemment, nous verrons, en fonction de ce que les Iraniens nous diront, quelle est exactement la situation vis-à-vis des différents sites qui sont évoqués et par conséquent si nous pouvons considérer que les demandes que nous avons formulées sont couvertes par les propositions présentées par les Iraniens.