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Lettre d’un exilé à Marjane Satrapi : J’avais 18 ans au moment de la révolution
30.06.2007

Nous avons reçu cet article, d’un auteur qui s’ignore. Nous avons décidé de le publier en espérant qu’il continuera de nous écrire car ce site appartient à ceux qui ont cette sensibilité.



Selon une croyance très répandue, le renversement du régime de l’Iran en 1979 était une très belle révolution, laïque et progressiste, mais hélas vite usurpée par les islamistes. Même un amnésique atteint d’Alzheimer ne pourrait croire à une chose pareille.

Qu’on l’aime ou pas, le régime islamique d’Iran tire son pouvoir légal de sa constitution qui fut adoptée par voie référendaire avec un taux de vote positif de près de 85%. J’ai dû voter également et il fallait un sacré courage pour voter contre.

Ironie supplémentaire, cette constitution islamique ne fut pas rédigée par le clergé mais plutôt par les forces soi-disant laïques et progressistes et plébiscitées par l’ensemble des partis et mouvements ayant pris part à la révolution de 1979.

On peut citer parmi les rédacteurs A. Lahidji ex-sympathisant des OMPI et actuel vice-président du FIDH, celui qui a nommé Satrapi ambassadrice pour les droits de l’homme. Il y avait aussi Hassan Nazih, Bâtonnier de Téhéran sous le Shah, et Shahin Fatemi, celui qui cherche actuellement à aider la bande à Timmerman-Bolton à balkaniser l’Iran. Du reste, Khomeiny ne voyait aucune utilité dans une constitution, le Coran pour lui se suffisant à lui-même.

En 1980, la belle entente des différents mouvements révolutionnaires a pris fin non pas du fait de l’opposition de certains à une constitution anti-démocratique, mais à cause d’une lutte de pouvoir pure et simple. D’ailleurs, d’un point de vue légaliste, les mollahs étaient et restent dans leur droit, droit qui leur est octroyé par une constitution écrite, répétons-le encore une fois, par les forces de gauche et mossadeghistes et adoptée par une large majorité que ces forces de gauche n’ont pas contesté.

Les révolutionnaires de 1979 n’aspiraient pas à la liberté et ne cherchaient pas à établir une société juste. Leurs modèles étaient calqués pour les uns sur le califat, pour les autres, ils se calquaient sur les républiques démocratiques cubaine, chinoise ou albanaise.

Les attaques des filles non-voilées et des cinémas projetant des films occidentaux avaient commencé bien avant l’arrivée de Khomeiny à Téhéran. Le dessein des mollahs était très clair et ceux qui se sont alliés à eux, nos aînés de la gauche, ne peuvent prétendre aujourd’hui à une quelconque escroquerie. Ces révolutionnaires de 1979 n’avaient qu’un message de haine où toute forme de violence était justifiée du moment qu’elle venait de leur part. Khomeiny a plu aux opposants du régime impérial très précisément par le caractère violent de ses idées. Et soyons juste envers le vieillard : il n’a jamais caché ses intentions et nul ne peut prétendre à une supercherie.

Aujourd’hui, plus de la moitié de la population iranienne est née après la révolution de 1979. Cette génération est très critique envers ses aînés qui n’ont laissé à leurs enfants que ruines et oppression. Le régime et ses ex-complices cherchent une voie de sortie en brandissant l’étendard de la « révolution volée », une « révolution faite par des idéalistes et volée par des cyniques », comme le prétend Marjane Satrapi.

Je ne suis pas d’accord avec Marjane Satrapi, ni avec ses parents progressistes qui ont voté la constitution coranique de la république islamique, je ne suis pas d’accord avec son mépris pour notre identité nationale, je ne suis pas d’accord avec ses répliques stéréotypées, elles me glacent le sang et me ramènent 28 ans en arrière.

Elle est la « gardienne d’une révolution morte » qui étouffe sous son cadavre 50 millions de jeunes iraniens et leurs parents qui ont mon âge : ils sont tous usés avant terme, victimes des erreurs de ces gens comme les parents progressistes de Satrapi... Ceux-là ont même prospéré avec la révolution en confisquant les biens des autres. Mais nous, les jeunes adultes de 79, avons tout perdu, et encore je n’ai pas fait la guerre et je suis entier, du moins en apparence.

J’ai de l’espoir quand même. Car hélas pour les « gardiennes de la révolution » et ses comploteurs, même la « révolution non volée » ne fait pas rêver les jeunes iraniens nés après 1979.

C’est le modèle Perse, Achéménide, qui a le plus de succès chez la jeune génération iranienne : si hier les fêtes de Persépolis de 1971 étaient critiquées comme le symbole des erreurs du régime impérial, elles sont devenues aujourd’hui un élément incomparable de fierté et de vénération. Il en va de même pour le monument led commémorant, la tour Shah-yâd, littéralement « Souvenir du Shah », qui symbolise l’Iran bien plus que les ruines enivrantes de Persépolis, pas la BD, mais le berceau de notre civilisation si ancienne.

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Ramine Y.

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