Dans l’immédiat les six pays concernés (Arabie Saoudite, Koweït, EAU, Qatar, Bahreïn et Oman) ont décidé de démarrer un programme énergétique nucléaire civil (une terminologie utilisé sur l’autre rive du Golfe Persique).

Selon Adel Al Harby, rédacteur en chef du Saudi Daily, cette annonce est très sérieuse et il est indéniable que la région est en passe de se lancer dans une course au nucléaire. Le Qatariote Abdulrahman Al Attiya, le secrétaire très iranophobe du CCG, a précisé au journal que cette annonce arrivait à un moment important. En effet, il s’agit d’un revirement à 180° pour le Conseil de Coopération du Golfe qui s’était prononcé contre le nucléaire il y a tout juste un an. En réalité, les Saoudiens ont déjà commencé à financer des activités nucléaires en Egypte et au Pakistan… L’annonce est un avertissement collectif pour montrer la solidarité inter-arabe hostile à l’ingérence des mollahs dans les affaires arabes aussi bien en Irak qu’au Liban.

Derrière cela se cache aussi une peur des sunnites vis-à-vis des chiites. L’Arabie Saoudite est le bastion de l’islam sunnite, doublé du prestige du gardiennage des sites sacrés de La Mecque. L’annonce des Saoudiens est aussi un avertissement pour prévenir les mollahs de se garder de faire du prosélytisme révolutionnaire alors qu’actuellement les musulmans du monde entier affluent en Arabie Saoudite pour le pèlerinage du Hadj. L’Arabie Saoudite est sur ses gardes car une des premières opérations d’exportation de la révolution islamique avait été la prise de la Grande Mosquée de La Mecque pendant le pèlerinage en novembre 1979. Le testament politique de Khomeiny recommandait en priorité le reversement des monarchies saoudienne, marocaine et jordanienne et l’établissement d’une république islamique dans ces royaumes ainsi qu’en Egypte. Les relations entre les saoudiens et les succésseurs de Khomeiny se sont appaisées mais des foyers de tensions ont toujours existé car le régime des mollahs conteste à l’Arabie Saoudite son leadership du monde musulman. Les ingérences des mollahs en Irak ont ravivé ces tensions car pour mettre la pression aux américains, les mollahs ont délibérément encouragé la guerre chiite-sunnite. Cependant, malgré les évidences, ces ingérences des mollahs ne nuisent pas à leur aura parmi les musulmans qui les considèrent comme les champions de la guerre contre les infidèles qui souillent leur sol. Les efforts des mollahs pour obtenir la maîtrise de tous les savoir-faire nucléaires augmente leur popularité.

Les Saoudiens craignent, à juste titre, une influence grandissante du chiisme dans un monde arabe traditionnellement sunnite. C’est le cas au Liban, en Irak, mais aussi en Afrique. Plus spécifiquement chez le gardien des lieux saints, on parle aussi de conversions au chiisme duodécimain de nombreux Saoudiens : un délit qui s’apparente à l’apostasie et la police religieuse Saoudienne (mutawa) traque avec une férocité ces adeptes de la révolution islamique. Les quelques mosquées chiites du Royaume sont très sérieusement surveillées quand leur accès n’est pas interdit. Certains observateurs saoudiens estiment qu’il s’agit de mesures de rétorsion, car Téhéran refuse aussi les mosquées sunnites en Iran.

C’est dans ce contexte de guerre d’influence que l’on doit placer la présente annonce nucléaire des 6 pays membres du Conseil de Coopération du Golfe (Persique). Sur un plan technique, les Russes sont depuis longtemps sur le coup et les Français sont intéressés (c’est la politique française de Prolifération Coopérative). La prolifération est comme un tango ; il faut deux partenaires.

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