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Pétrole : L'Alliance Iran-Russie et le statut Juiridique de la Caspienne (analyse)
26.07.2006

Ahmadinejad s’est rendu en Turkménistan afin de solliciter un alignement de ce pays sur les positions « iraniennes » concernant le conflit du Moyen-Orient. Le Président Turkmène a mis en avant la neutralité de son pays refusant toute discussion sur des sujets d’actualité (nulcéaire, Liban…).



En réalité, le Turkménistan avait souhaité rencontrer Ahmadinejad en espérant contribuer à un règlement rapide du problème du partage des richesses de la mer Caspienne, afin que du gaz naturel puisse être exporté vers l’Europe, selon l’agence officielle turkmène.

Les cinq pays riverains de la Caspienne (dont quatre sont d’anciennes républiques soviétiques) n’ont toujours pas réussi à conclure un accord général sur la définition de leurs frontières maritimes depuis que l’URSS a éclaté fin 1991, ce qui ralentit le développement des vastes ressources énergétiques renfermées dans le sous-sol de cette mer.

Le statut juridique de la Caspienne est un grave sujet de discorde entre les pays riverains, sur la question de savoir s’il s’agit d’une mer ou d’un lac. En effet, en droit international, l’utilisation des ressources d’un lac ne peut se décider qu’à l’unanimité des pays riverains, alors que chaque Etat riverain se voit attribuer des zones dont il est libre d’exploiter les ressources à sa convenance dans le cas d’une mer. Le problème vient de la Russie qui avait initialement pris parti pour « l’option lac », et par la suite a passé des accords bilatéraux avec l’Azerbaïdjan et le Kazakhstan qui étaient pour une option « Mer ». Par ces textes, la Russie s’alignait de facto sur la position du Kazakhstan et de l’Azerbaïdjan.

Le 14 mai 2003, la Russie a pérennisé sa position en signant un accord tripartite avec le Kazakhstan et l’Azerbaïdjan sur le partage des richesses du nord de la Caspienne en fonction de la longueur des côtes respectives, ce qui donne une part de 18 % à l’Azerbaïdjan, 19 % à la Russie et 27 % au Kazakhstan. L’Iran et le Turkménistan s’opposent à cette partition de fait et conteste à l’Azerbaïdjan ses droits sur plusieurs zones offshore. Depuis l’Iran bloque le processus.

Mais si la position de la plupart des pays riverains évolue en fonction de la localisation des nouveaux champs d’hydrocarbures et la position Russe est dictée aussi par le désir d’un contrôle total du transit de ces richesses. La situation indécise actuelle profite surtout à la Russie : en l’absence d’un statut et d’un accord entre tous les états riverains, ceux de l’Asie Centrale ne peuvent espérer entreprendre la construction d’un pipeline subaquatique qui leur permettra de contourner la Russie et son monopole gazier du Gazprom.

De son côté, la Russie souhaiterait reprendre le contrôle de cette zone et elle se sert des mollahs pour bloquer le processus du règlement du statut juridique de cette mer intérieure.

Comme dans le cas du nucléaire iranien, il y a un enjeu économique et énergétique : celui du contrôle des marchés nucléaire ou pétrolier de toute la région. En attendant, ce sont les pays de la rive Est de la Caspienne qui souffrent de ce conflit et ne parviennent pas à acheminer leurs hydrocarbures vers l’Europe sans passer par le réseau Russe : le Kazakhstan, l’allié de la Russie, mais aussi le Turkménistan. Ces états soutiennent le projet de construction d’un gazoduc sous-marin qui les relierait à l’Azerbaïdjan, en passant par la mer Caspienne, pour permettre de transporter leur gaz en Europe via le gazoduc nommé BTE (Bakou-Tbilissi-Erzeroum). La Russie s’y oppose et l’Iran aussi mais pour d’autres raisons. En réalité, ils agissent en tandem.

Comme dans leur dossier nucléaire, les mollahs jouent la carte des retards et de l’intransigeance. De nombreuses similitudes existent entre ce dossier et celui du nucléaire iranien, en particulier parce que la Russie est partie prenante. Pour ce qui concerne le dossier nucléaire, la Russie a été invitée à la table par une décision unilatérale du Président Chirac qui aujourd’hui cherche à modérer l’appétit de ses amis Russes. Mais pour ce qui concerne la mer Caspienne, la Russie est chez elle et s’estime lésée depuis le démantèlement de l’empire soviétique et l’indépendance des républiques soviétiques de l’Asie Centrale.

L’Iran est le troisième plus grand importateur de gaz turkmène et les deux voisins ont même conclu ces dernières années plusieurs contrats pour des projets d’infrastructure, notamment pour la construction du gazoduc Korpedje-Kurt Koy, d’un montant de 139 millions de dollars. Le comportement de l’Iran n’a donc aucune logique vis-à-vis de son voisin Turkmène à moins qu’on ne l’expliquer par une alliance Iran-Russie au service de leurs intérêts. Le refus de l’Iran du projet du gazoduc sous-marin transcaspien était l’objet de ce voyage.

Le Tandem. A l’image de ce qui se passe au Proche-Orient, les mollahs allument des brasiers et créent des crises, et les Russes interviennent pour demander de résoudre la situation en usant de leurs relations amicales avec le régime des mollahs. Ainsi, au Liban, les Russes soutiennent les mollahs et veulent confirmer leur rôle d’intermédiaire ou d’arbitre dans l’équilibre des forces. Parallèlement, dans la région de la Caspienne, les Russes se partagent les rôles du bon flic et mauvais flic avec les mollahs. Les gentils flics Russes bientôt intervenir, usant de leurs relations amicales pour demander aux méchants flics Mollahs de se modérer, leurs conférant ainsi un statut d’arbitre du conflit. Dans les deux cas, celui du conflit Caspien et la guerre « au » Liban, si la source du conflit (Lerégime des mollahs/le Hezbollah) disparaissait, le conflit n’existerait plus mais l’objectif des Russes n’est pas de résoudre le problème mais de maintenir l’état de nuisance de la crise. C’est pourquoi, le conflit du statut de la Caspienne est loin de se solutionner.

Le Point. De plus en plus, les régions limitrophes à l’Iran vont connaître des crises inextricables qui donneront aux mollahs la possibilité de s’immiscer dans les affaires de leurs voisins et ce avec la bénédiction des Russes qui ont trouvé un allié certes remuant mais très efficace. La Russie a d’excellentes relations avec le Kazakhstan, mais elles ne l’empêchent pas de s’allier avec les mollahs pour contrer le projet du gazoduc sous-marin transcaspien et échapper à ses propres obligations envers le Kazakhstan.


Petit historique

La Russie et le Kazakhstan ont d’importants liens énergétiques et militaires. La coopération énergétique est au centre de toutes les préoccupations de Poutine qui considère l’exploitation et le transit des hydrocarbures comme la colonne vertébrale de l’état Russe. En avril 2005, Poutine a obtenu du président Kazakh Nazarbaev la participation de firmes russes dans l’exploitation des trois principaux champs pétrolifères de la zone Caspienne, à savoir Kurmangazy, Kvalinskoye et Centralnoye. A cet effet, la Russie et le Kazakhstan ont signé un accord de développement de Kurmangazy, qui s’élève à de 23 millions de dollars. Parallèlement, Nazarbaev a confirmé sans réserve le maintien de la présence de bases militaires en Kazakhstan.

C’est au début du mois mai 2005, en marge du forum de l’organisation de coopération économique, qui regroupait à Bakou les représentants de ses dix pays membres (Afghanistan, Azerbaïdjan, Iran, Kazakhstan, Kirghizstan, Pakistan, Tadjikistan, Turquie, Turkménistan et Ouzbékistan) que le 1er ministre kazakh a annoncé que son pays envisageait de se connecter au gazoduc baptisé Bakou-Tbilissi-Erzeroum (BTE). La connexion se ferait au moyen d’un gazoduc sous-marin qui relierait le Kazakhstan à l’Azerbaïdjan, en passant par la mer Caspienne. Et Le 1er ministre kazakh a par ailleurs mentionné l’intérêt que Ahmadinejad avait montré pour ce projet évoquant une éventuelle coopération irano-kazakhe pour la construction de ce gazoduc.

Le 16 mai 2005 : L’ambassadeur de la République islamiste d’Iran au Kazakhstan a déclaré dimanche dernier que son pays était opposé au projet d’oléoduc transcaspien. Pour Téhéran, l’absence de statut légal pour la Caspienne et surtout les menaces que cet ambitieux projet font peser sur l’environnement sont des raisons suffisantes pour s’opposer à ce projet. Le souci écologique est désormais en tête de liste des inquiétudes des mollahs et de Poutine.

A chaque fois qu’un état riverain prend une initiative pour s’affranchir de la tutelle du Gazprom, la Russie brandit la menace écologique et tire le signal d’alarme. Le 23 juillet, ils avaient même envisagé de prendre des sanctions contre le Kazakhstan et l’Azerbaïdjan qui, en raison de leur exploitation offshore, seraient les principaux pollueurs de la Caspienne.

Ceci doit mettre en garde les amis et lobby Russe en France qui voient dans le ce pays un allié fiable. L’enjeu est de maintenir un monopole énergétique sur l’Europe et de peser sur ses politiques internationales.

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Pour en savoir + sur le Lobby Russo-Iranien:
- Alexandre Adler au centre d'une tempête
- (31 MAI 2006)

Pour en savoir + :
- Le partage de la mer Caspienne : un enjeu juridique
- (24 Juillet 2006)

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