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Revue de Détail de l’armée Française en 2002
27.06.2006

La France s’est distinguée par son pacifisme sur le dossier irakien. Alors que le régime des mollahs se montre intransigeant vis-à-vis des demandes de la communauté internationale, souvent les esprits se chauffent et l’on évoque la possibilité d’une guerre contre la république islamique sans que pour autant aucun des inspirateurs de cette guerre (ceux qui sont pour et ceux qui sont contre) n’envisagent un réel soutien aux opposants laïques et patriotes.



Nous avons souvent expliqué, sur ce site, qui étaient les auteurs des rumeurs et à qui elles pouvaient profiter. Pour résumer, on peut affirmer sans l’ombre d’un doute que les rumeurs profitent aux adeptes du dialogue avec les mollahs. La crise iranienne et les rumeurs de la guerre profitent également aux alter-mondialistes pour qui la misère des iraniens n’est rien à côté de l’occasion en or d’accabler leur ennemi américain.

Il y a aussi les états Européens qui sont assidûment hostiles à des sanctions économiques car l’UE est le plus important partenaire économique du régime des mollahs. Parmi ces états, la France est particulièrement hostile aux sanctions, mais aussi à une menace militaire. L’étude publiée en 2002 par l’Express dresse un tableau accablant de la situation de l’armée française… Et si tout simplement, le pays des droits de l’homme était dans l’incapacité de participer à une action militaire contre les mollahs ?

Et dans ce cas, le mystère s’épaissit car on ne comprend pas pourquoi l’état français persiste à refuser un soutien discret aux patriotes iraniens !

IRAN-RESIST.



L’Express : Les quatre vérités

par Vincent Nouzille


Absence de vision à long terme, artifices budgétaires, restructurations tardives et dérive des programmes: l'équipement des armées a été sacrifié depuis des années. Y compris par Chirac et Jospin. Revue de détail…

Un porte-avions, le Charles-de-Gaulle, qui a failli arriver dans l’océan Indien après la bataille, ses chasseurs n’ayant pu lâcher leurs premières bombes sur l’Afghanistan que début mars. Un satellite d’observation, Hélios, qui fournit des images uniquement de jour, et par beau temps. Une poignée d’agents de la DGSE (contre-espionnage) qui doivent se contenter de glaner, sur le terrain, des renseignements après tous les autres, au prix de mille astuces. Près de 650 « marsouins » et parachutistes que l’armée est incapable de transporter avec ses propres aéronefs jusqu’en Asie centrale, le tout pour des missions limitées. « Les premiers ont surveillé l’aéroport de Mazar-e Charif. Maintenant, les autres nettoient les toilettes de celui de Kaboul, noble tâche ! » ironise un initié. Dans l’opération « Liberté immuable », pilotée par les Américains en Afghanistan, la France est réduite aux utilités. Les faiblesses de son dispositif militaire apparaissent au grand jour. Et son statut de grande puissance s’en trouve affaibli. « Nous payons le prix d’une décennie de désarmement », tranche le député chiraquien Pierre Lellouche.

«Si l'on veut fidéliser les engagés, il faut bien leur offrir un salaire décent»


En décidant de polémiquer sur ce sujet délicat pendant la campagne, Jacques Chirac et Lionel Jospin se sont piégés eux-mêmes. Leur gestion est loin d’être exemplaire. Tout d’abord parce qu’ils ont mal calculé le coût de la professionnalisation des armées. Les états-majors ont réussi à se passer de 200 000 appelés en recrutant 80 000 volontaires. Au prix fort : la solde d’un militaire de base a, par exemple, été revalorisée de 60%, à 1 025 euros par mois. Les charges salariales des 436 000 soldats et civils de la Défense et les pensions des retraités coûtent désormais 25,2 milliards d’euros chaque année, soit les deux tiers du budget de la Défense. Avec une tendance inflationniste : les manifestations réussies des gendarmes, en décembre, ont réveillé les revendications dans tous les corps d’armée, obligeant Alain Richard à lâcher quelques sous dès la fin février. Cela ne suffira pas à calmer la grogne des casernes. « Si l’on veut fidéliser les engagés, il faut bien leur offrir un salaire décent et autre chose que des baraques pour loger leurs familles », commente Eric de La Maisonneuve, ancien général de l’armée de terre et auteur du livre Le Métier de soldat (Economica).

Le ministre de la Défense, le socialiste Alain Richard, se veut évidemment plus rassurant : « Nos moyens sont limités, mais il ne faut pas exagérer, nous tenons encore notre rang aux côtés des Britanniques et loin devant nos partenaires européens. » Il est vrai que l’Allemagne ne consacre que 1,1% de son PIB (produit intérieur brut) à sa défense, quand la France y investit 1,8% et la Grande-Bretagne 2,3%. Cependant, nos voisins d’outre-Manche ont maintenu leurs budgets militaires ces dernières années, tandis que la France, glissant de 2,4% à 1,8% du PIB entre 1996 et 2002, relâchait ses efforts : l’armée britannique dépense aujourd’hui deux fois plus d’argent pour chacun de ses soldats que l’armée française ! Alain Richard avance aussi que des crédits ont été ajoutés in extremis pour « tenir compte des événements du 11 septembre » : création de 200 postes supplémentaires à la DGSE, nouvelles commandes de sept ou huit gros hélicoptères de transport... qui ne seront pas livrés avant 2006. Maigre cadeau de dernière minute. « Il aurait fallu au moins 500 millions d’euros supplémentaires dès cette année pour rattraper notre retard », plaide le député socialiste Jean-Michel Boucheron, rapporteur du budget de la Défense à l’Assemblée. « Il manque au moins 1,5 milliard d’euros pour revenir dans le modèle d’armée 2015, qui a été défini en 1997 », corrige Pierre Lellouche.

Ensuite, les deux têtes de l’exécutif, en contradiction avec leurs propos d’aujourd’hui, n’ont cessé de sacrifier les dépenses d’équipement. « Diminuer les commandes d’avions, c’est moins douloureux que de fermer des écoles et cela ne fâche que des soldats obligés d’obéir en silence », explique Pascal Boniface, directeur de l’Institut des relations internationales et stratégiques. Le Premier ministre s’estime plus crédible que le président, puisqu’il affirme avoir appliqué à plus de 90% la loi de programmation militaire 1997-2002, qu’il avait pourtant révisée à la baisse après son arrivée à Matignon. « Nous avons fait bien mieux que tous les gouvernements précédents, en respectant nos engagements », martèle Richard. Un satisfecit que critiquent les chiraquiens. « En réalité, il manque plus de 12 milliards d’euros à l’arrivée, principalement à cause d’annulations répétées de crédits, soit l’équivalent d’une année d’investissements », explique le sénateur RPR Philippe Marini. Mais Jacques Chirac est mal placé pour donner des leçons : dès 1995, le gouvernement Juppé avait annulé 1,8 milliard d’euros de crédits militaires. Et il avait retaillé 1,3 milliard d’euros en 1996. Sans que le président s’en émeuve.

Triste constat : théoriquement sanctuarisé par les lois de programmation, « l’équipement des armées n’a cessé d’être une variable d’ajustement budgétaire », dénonce Jean-Michel Boucheron. Voire une poche pratique pour des besoins urgents. Dernier exemple ? Le président de la République et le Premier ministre voulaient acquérir deux nouveaux Airbus A 319 pour leurs voyages officiels. Qu’à cela ne tienne : on a ponctionné les budgets de la Défense de 128 millions d’euros, alors que cette dépense n’y était pas inscrite !

«La France sera une puissance maritime à mi-temps !»


A quelques jours du premier tour, le président-candidat s’est réveillé, dénonçant les « restrictions imposées par le gouvernement » et réclamant la mise en chantier urgente d’un second porte-avions. « Que ne s’en est-il aperçu plus tôt ! » ironise Alain Richard. Jacques Chirac a en effet signé en juillet dernier, avec le gouvernement, le projet de la future loi de programmation militaire 2003-2007. Ce document, des plus minimalistes, ne prévoit pas la construction d’un second porte-avions. Tout juste permet-il d’amorcer les études de ce géant, qui ne serait pas à la mer avant 2014. D’ici là, compte tenu des contraintes d’entretien du Charles-de-Gaulle, la France sera une puissance maritime à mi-temps ! « Le chef de l’Etat, qui est aussi chef des armées, n’a pas fait de remarque à ce sujet durant toute la phase de préparation », confie le ministre de la Défense.

Ces chicaneries politiques de campagne ne peuvent masquer les cruelles réalités militaires. Début octobre, le chef d’état-major des armées, le général Jean-Pierre Kelche, soulignait devant les parlementaires que « les retards d’équipement accumulés [avaient] provoqué sinon des ruptures de capacité, en tout cas une lente érosion des matériels » et s’inquiétait de la « cohérence des forces ».

Un budget qui repose sur de graves illusions


Au même moment, dans son scrupuleux document annuel sur le budget de la Défense, Jean-Michel Boucheron dressait un sombre état des lieux : faute d’argent, les pilotes d’Alphajet ou d’hélicoptère n’effectuent plus assez de vols d’entraînement, et les équipages des navires, pas assez de sorties en mer. L’usure ou l’insuffisance de pièces détachées rend inutilisables près de 40% des blindés, des avions et des navires de guerre. « Même les sous-marins, fers de lance de la dissuasion, ont perdu en capacité opérationnelle », s’insurge le député RPR Charles Cova. Et la plupart des programmes d’équipement lancés ont pris plusieurs années de retard. « En général, les matériels ne seront pas livrés avant 2008-2013, et encore, si l’on assure le financement de leur fabrication », s’inquiète Philippe Marini. C’est, en effet, au mieux en 2008 que les missiles ASMPA devant armer les Mirage 2000 et les Rafale seront opérationnels, tout comme la première frégate antiaérienne de type Horizon et la frégate multimission. La mise en service du quatrième sous-marin nucléaire, équipé du missile stratégique M 51, d’une portée de 6 000 kilomètres, a été reportée de 2008 à 2010. Pour ses hélicoptères NH 90 et Tigre, l’armée de terre devra attendre 2011. Et la Marine, douze mois de plus pour le sous-marin d’attaque de type Barracuda. Quant au satellite successeur de Syracuse II, il ne sera lancé qu’en 2013 !

ictime de coupes et de dérapages en tout genre, le budget de la Défense repose, en fait, sur de graves illusions. Première d’entre elles : la perception, naïve, de la fin des menaces. Après l’effondrement de l’Union soviétique, les gouvernements ont cru toucher les « dividendes de la paix » en taillant dans le vif des dépenses militaires, naguère jugées intouchables. « Or les risques militaires n’ont pas disparu avec l’enterrement de la guerre froide, affirme René Galy- Dejean, député RPR et spécialiste de la dissuasion. Au contraire, nous vivons sur une planète plus dangereuse. »

Depuis 1991, le monde a vécu successivement une guerre dans le Golfe, un génocide au Rwanda, de longs conflits dans les Balkans, une offensive au Kosovo, des attaques terroristes répétées. Sans parler de la prolifération nucléaire ou chimique, du conflit du Proche-Orient, des crises africaines ou de la tension indo-pakistanaise. « Nous n’avions peut-être plus besoin de milliers de chars pour contrer une offensive soviétique dans les plaines de l’Est, mais il ne fallait pas baisser la garde pour autant », estime Pascal Boniface. En dix ans, les gouvernements, faute de vision à long terme, se sont contentés de réduire les budgets de 30%, mais sans remettre en question des armements conçus pour la guerre froide : char Leclerc, avion Rafale, hélicoptère Tigre. « Comme tous ces programmes ont dérapé en termes de calendrier et de coût, on continue d’en payer la facture aujourd’hui », explique Jean-Paul Hébert, chercheur à l’Ecole des hautes études en sciences sociales.

Depuis le 11 septembre, le réveil est douloureux : les Etats-Unis, eux, ont déjà voté 48 milliards de dollars de crédits militaires supplémentaires pour l’année 2002, soit quatre fois les montants annuels des achats d’un pays comme la France ! « On ne va pas faire la course aux armements avec nos alliés, mais il faut certainement renforcer nos capacités de communications et de renseignement, nos forces de projection lointaine et nos systèmes de commandement intégré », estime Alain Richard.

Deuxième faux-semblant : le montant des dépenses d’équipement (présenté officiellement dans les titres V et VI du budget de la Défense) est trompeur, car artificiellement gonflé. Prenons la loi de finances votée pour 2002, qui prévoit théoriquement 12,4 milliards d’euros d’investissements. Elle inclut tout d’abord 412 millions d’euros de crédit, reportés de l’année précédente, votés en 2001. Si l’on veut comparer strictement les budgets d’une année sur l’autre, il faut donc soustraire ces reports : la hausse officielle de 0,7% se transforme en recul de 2,5% !

Ensuite, il faut retirer ce que Jean- Michel Boucheron appelle des « bourrages d’enveloppe », autrement dit des dépenses qui n’ont rien à voir avec l’équipement militaire. On trouve, notamment, 100 millions d’euros de subventions annuelles accordées à la Polynésie française pour compenser, durant dix ans, la fin des expérimentations nucléaires dans l’atoll de Mururoa. « C’est l’héritage Chirac-Juppé », soupire Alain Richard. Avec cet argent, Gaston Flosse, patron du territoire de la Polynésie française, vient, par exemple, de commander des Airbus pour la compagnie locale Air Tahiti Nui. Au grand dam des ministères de la Défense et des Finances, qui ont dépêché une mission d’inspection pour pister la destination de tous les fonds !

Eponger les dettes et les erreurs de gestion


Autre curiosité : le budget de la Défense soutient, à hauteur de 190 millions d’euros, le Centre national d’études spatiales (Cnes). Cette pratique ancienne, justifiée au nom des possibles retombées militaires des travaux du Cnes, a pourtant été formellement proscrite par la dernière loi de programmation militaire. Rien n’y a fait. L’enveloppe permet également de subvenir à d’autres besoins éclectiques : un fonds pour les restructurations de la Défense, les emplois de la direction des applications militaires du Commissariat à l’énergie atomique, l’augmentation des cotisations retraite des ouvriers des arsenaux d’Etat.

Sans ces « bourrages d’enveloppe », il reste à peine 11 milliards d’euros consacrés aux nouveaux équipements militaires. Or les gouvernements peuvent encore réduire cette somme, en annulant des crédits en cours d’exercice. Et, traditionnellement, seulement 90% de ces crédits votés sont finalement consommés durant l’année, à cause du décalage de certains programmes. Or, craignant de se faire subtiliser son reliquat par Bercy, le ministère de la Défense l’utilise pour des dépenses courantes. Les surcoûts occasionnés par les opérations à l’étranger des militaires, lorsqu’ils sont envoyés au Kosovo ou en Afghanistan - soit environ 450 millions d’euros chaque année - sont ainsi discrètement épongés par le titre V du budget. « C’est totalement anormal ! Proteste Philippe Marini. Il faudrait prévoir un financement spécial pour les opérations extérieures. »

Troisième illusion : au lieu d’être investi pour préparer l’avenir, le budget de la Défense sert d’abord à régler les ardoises du passé, notamment celles des arsenaux. Entre 1997 et 2002, le ministère de la Défense a dû verser 550 millions d’euros pour financer la préretraite des ouvriers de la Direction des constructions navales (DCN). Il a également fallu éponger 200 millions d’euros que la DCN avait perdus lors de la fabrication d’une plate-forme pétrolière et de la vente de sous-marins au Pakistan !

Le budget est surtout siphonné par Giat Industries, le fabricant de chars et de munitions, en pleine déconfiture : selon un rapport de la Cour des comptes paru en octobre 2001, le cumul des pertes de ce constructeur atteint 3,7 milliards d’euros en dix ans, dont plus de la moitié à cause d’erreurs de gestion. Et le calvaire n’est pas terminé, avec au moins 1,5 milliard d’euros de pertes d’ici à 2005. Avec cet argent, la France aurait eu de quoi construire deux porte-avions supplémentaires... « Vous ne le saviez pas ? Le ministère de la Défense finance un gigantesque programme d’armes ultrasecrètes : il s’agit des plans sociaux de Giat ! » ironise un parlementaire.

«Dans certaines divisions blindées, la moitié seulement des chars sont opérationnels»


Il est vrai que, en réduisant de 1 200 à 406 sa commande de chars Leclerc, monstre de technologie conçu en 1982, l’armée de terre a précipité Giat Industries dans le mur. « Notre marché s’est effondré de 70% et les gouvernements n’ont pas eu le courage d’assumer des mesures douloureuses que je proposais pour adapter notre outil industriel », raconte Pierre Chiquet, président entre 1989 et 1995. Contrats export désastreux, diversifications hasardeuses, décisions tardives : le pilotage chaotique de l’entreprise a ensuite alourdi la note. Giat Industries, dont les effectifs ont déjà été réduits de 10 300 à 6 700 salariés, n’évitera pas « un plan conséquent de resserrement des capacités industrielles », tranchait la Cour des comptes.

Le bilan est terrible : non seulement l’Etat actionnaire a renfloué Giat Industries en pompant dans ses crédits d’équipement, mais, en plus, l’armée de terre a payé ses 406 chars Leclerc au prix astronomique de 16 millions d’euros l’unité, au lieu des 2,3 millions prévus à l’origine ! Or les 17 premiers chars étaient inutilisables. Les suivants ont fait merveille au Kosovo. Mais la plupart restent souvent dans les hangars, en panne ou en attente de pièces détachées. « Dans certaines divisions blindées, la moitié seulement des chars sont opérationnels », confie un haut gradé de l’armée de terre.

L’exemple des chars n’est pas unique. C’est la quatrième illusion des dépenses militaires : on croit qu’en étalant les programmes on fera des économies. Or c’est le contraire qui se produit. « Pour la plupart de ses armements, l’Etat a réussi l’exploit d’avoir finalement moins de matériel que prévu, livré avec d’énormes retards et pour beaucoup plus cher ! » commente un conseiller de la Cour des comptes. Lancé en 1988, le programme des hélicoptères NH 90 prévoyait la commande de 160 appareils à 10,7 millions d’euros l’unité. A l’arrivée, c’est-à-dire entre 2005 et 2011, il y aura seulement 95 appareils, d’un coût compris entre 19 et 30 millions d’euros, selon les versions (marine ou armée de terre).

Même dérive pour le Rafale, conçu au milieu des années 1980. De reports en étalement budgétaire, ce chasseur polyvalent a pris dix ans de retard. En 2000, l’armée aurait dû disposer de 137 Rafale. Fin 2002, elle n’en aura que 13 ! « C’est un incroyable dérapage de l’Etat, qui a failli couler notre société », dit-on, rageur, chez Dassault Aviation, son constructeur. Les livraisons devraient monter en puissance, au rythme de 15 avions par an à partir de 2006. « Il est fort probable qu’il y aura encore des glissements », murmure un ponte de l’armée de l’air. La facture des 294 chasseurs prévus au total devrait frôler les 30 milliards d’euros.

Fonds de tiroir et choix déchirants


Rien d’étonnant que la France manque cruellement d’argent pour pallier ses autres faiblesses, comme celle de ses moyens de transport. Pour coller au modèle d’armée 2015 et au projet de force de réaction rapide européenne, l’armée française devrait être capable de déployer 20 000 soldats et une centaine d’avions de combat sur une base située à 7 000 kilomètres. Seul problème : la France n’a pas les appareils nécessaires à la logistique. Nos 66 antiques avions-cargos Transall, usés jusqu’à la carcasse, devront même être retirés du service à partir de 2005. Or la livraison des 50 gros-porteurs européens A 400 M s’étalera entre 2008 et 2015. « D’ici là, nous devrons affronter, dès 2005, un trou capacitaire important », constate Jean-Michel Boucheron. Piteuse solution : il faudra notamment louer des Antonov aux Ukrainiens.

La France fait également les fonds de tiroir pour financer ses projets de satellite (Hélios 2, Syracuse) et peine à investir dans les drones, ces appareils sans pilote capables d’espionner ou de frapper un territoire ennemi. « Malgré les efforts récents, nous manquons d’outils pour surveiller les théâtres d’opérations par tout temps et de capacités d’écoutes militaires », estime le député socialiste Bernard Grasset, spécialiste des questions de renseignement. Sans parler des retards pris pour constituer une armée de réserve de 100 000 hommes, encore dans les limbes, ou des crédits quasi inexistants consacrés à la défense civile.

Personne n’ose encore en parler ouvertement. Mais le prochain président et son gouvernement devront remettre tout à plat dans une nouvelle loi de programmation militaire 2003-2007, en tentant, cette fois-ci, de la respecter. « Il faudra bien refaire de la défense une priorité budgétaire si l’on veut tenir nos engagements », estime Pierre Lellouche. Mais son projet - remonter les dépenses militaires à 2,5% du PIB le plus rapidement possible - est contesté dans le camp chiraquien, où l’on évoque seulement un « rattrapage progressif ». « Plutôt que de rajouter de l’argent, il faudra plutôt revoir tous nos programmes pour en abandonner certains et en simplifier d’autres », réplique Jean-Michel Boucheron.

Les révisions risquent d’être déchirantes. Certains experts socialistes évoquent l’abandon possible du futur quatrième sous-marin nucléaire. D’autres ont dans le collimateur le programme, jugé faramineux et inutile, de missile balistique M 51, évalué à 4,5 milliards d’euros. Au RPR, certains caciques évoquent l’idée de lâcher la composante aérienne de la force de dissuasion - Super Etendard, Mirage 2000 N et Rafale armés de missiles ASMPA - au profit de la seule force océanique stratégique, les sous-marins basés à l’Ile-Longue, dans le Finistère. De quoi faire trembler les états-majors ! Malgré l’accouchement difficile du gros-porteur européen, l’A 400 M, le ministre de la Défense, lui, préférerait miser sur une coopération européenne, rêvant notamment de partager la facture du deuxième porte-avions français avec les Britanniques. Illusions ? L’Europe, en tout cas, s’impose comme la solution d’avenir, en matière de défense et d’armement plus que dans tout autre domaine. Mais l’armée et l’opinion sont-elles prêtes à ce que la Défense ne soit plus « nationale » ?

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