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Les investisseurs français se rendent en Iran
27.05.2006

Renault et l’Iran par son ministre de l’industrie ont finalisé l’accord de production de la L90 (Logan). Tout le monde semble content et les félicitations et congratulations officielles sont de mise, mais en fait l’histoire est plus compliquée qu’on ne le pense : ’il y a eu de tout dans cette histoire, y compris des menaces.



La menace de la république islamique iranienne n’était pas cette fois nucléaire mais industrielle et économique et le principal visé n’était pas Israël ou l’occident mais bien la société automobile Renault qui convoite un marché potentiellement énorme.

Tout commence après un appel d’offre de créer la « voiture du peuple » (cela ne vous rappelle rien ?) en remplacement de la vieille et désormais polluante Peykan. Renault avec son projet L90 (Logan) remporte l’offre. Une joint-venture (d’une valeur de 2 milliards de $) est créée et tout se passerait dans le meilleur des mondes si...

Les projets sont grandioses, on va fabriquer annuellement 300,000 véhicules en Iran avec l’espoir de monter en puissance pour atteindre le million chaque année vers 2010/2012. Le gouvernement iranien entre alors dans les négociations et demande à pouvoir exporter un certain nombre de ses véhicules : Refus poli de Renault qui ne veut pas impliquer sa marque en cas de malfaçon afin de rester maître du choix de sa clientèle et des prix de vente. Mais également, Renault ne voulait pas faire concurrence à son usine Roumaine ni à celle de pièces détachées du Maroc. Les autorités iraniennes menacent alors d’annuler le projet et Renault cède sur une autorisation d’exportation de 20% dans certains pays.

Voilà donc l’histoire presque officielle à laquelle viennent se greffer des rumeurs iraniennes. Non seulement, les mollahs ont menacé de rompre un autre contrat de Renault, le projet de l’assemblage des Mégane dont le démarrage était également prévu pour mai 2006 mais ils auraient laissé croire qu’ils pourraient se tourner vers un concurrent du Renault-Nissan, peut-être vers le Japonais Toyota. Le constructeur japonais veut devenir le plus important constructeur au monde et il a aussi un projet de « Logan à moins de 5000€ » dans ses cartons. Renault a accepté les conditions des mollahs.

« Renault-Pars s’est engagé à exporter au moins 20% des voitures produites en Iran », a annoncé un communiqué commun de Renault Pars et IDRO (Industrial Development and Renovation Organization), rendu public lors de la cérémonie de signature de l’accord.

C’est finalement le réseau Renault qui prendra en charge les exportations alors qu’au début, le constructeur français ne voulait accepter que les exportations de certaines pièces de rechange. Les voitures seront commercialisées avec un prix juste inférieur à 7000 €, c’est-à-dire 5 ans du salaire des ouvriers qui travailleront sur les chaînes Renault-Nissan et de 1000 € plus cher qu’initialement prévu au début des négociations. « Toutes les conditions ont été acceptées par les deux parties et la production de L-90 va commencer selon les prévisions », ajoute le communiqué qui oublie de préciser que le premier plan prévoyait le début de la production pour Mai 2006 et que les lignes de montage ne sont pas encore prêtes. La production devrait commencer en Septembre, si de nouvelles complications techniques ou diplomatiques ne se manifestent pas. Renault détiendra 51% du capital, un capital qui sera lui aussi sujet aux incertitudes liées au devenir de la république islamique dans la crise nucléaire.

Renault construisait déjà des automobiles à Téhéran avant la révolution et avait testé en Iran la première R5 (4portes) avec le succès que l’on sait. Mais l’accord sur la « Logan » est le plus important investissement d’une société française en Iran depuis 1979. L’essentiel de la production nationale iranienne est basé sur des accords de partenariat avec des marques étrangères. Le constructeur français Peugeot est déjà largement présent sur le marché automobile iranien (405 et 206) et l’autre société du groupe, Citroën assure le montage de quelques Xantia. Avec la finalisation du contrat Renault, les deux constructeurs français vont désormais contrôler une bonne partie du marché automobile iranien, ce qui prouve s'il l'était encore nécessaire, que la France n'a aucune intention d'imposer des sanctions économiques au régime des mollahs pour le contraindre à abandonner ses visées atomiques, son soutien au terrorisme islamique ou encore la défense des droits de l’Homme en Iran.

D’ailleurs, ces sujets sont le cadet des soucis des investisseurs français. Ces derniers se rendront en Iran, du 27 au 30 mai, chaperonnés par l’Agence Française pour le Développement International des Entreprises, UBIFRANCE.

L’opération s’appelle les Rencontres franco-iraniennes de l'automobile et elle permettra de « favoriser le rapprochement entre professionnels français et iraniens ». Il faut dire que l’industrie automobile iranienne s’accroît très rapidement, c’est même le secteur le plus florissant du pays avec une croissance à deux chiffres.

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Quelques chiffres (non iraniens) sur la production automobile en Iran en 2001
- Véhicules particuliers : 320000
- Camionnettes : 43500
- 4 X 4 : 5000
- Minibus : 1000
- Bus : 1400
- Camions : 6200
- Total : 377100

Les importations de voitures de l'étranger étant limité et soumis à de très fortes taxes pour protéger l'industrie locale, seulement 10,000 voitures ont été importées l'année dernière alors que 15,000 étaient exportées pour l'essentiel en Syrie et dans les ex-républiques soviétiques limitrophes de l'Iran. La taxe sur les importations doit passer de 300% à 100% du prix TTC. Daimler Chrysler prévoit aussi d'assembler quelques luxueuses Mercedes en Iran (probablement 2500). Le prix de vente des voitures neuves en Iran varie actuellement entre 6 000 et 20,000 € et la Mercedes 140,000 € (pour les dignitaires du régime) pendant que le salaire d’un ouvrier est de 100 €/mois. Dans de nombreux cas, les salaires des ouvriers ou des fonctionnaires en sont pas payés depuis des mois. Le rêve des autorités iraniennes est d'exporter 100,000 véhicules dès 2007.