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Connivences entre Ahmadinejad et les Britanniques ?
24.12.2005

Ahmadinejad dit que la Shoah a été inventée pour justifier la création d’Israël. Le même raisonnement est utilisé par d’autres pour contester la légitimité d’Israël : On accuse les juifs de « fabriquer un patrimoine inventé de toutes pièces, pour leur permettre de tromper les visiteurs étrangers … en leur faisant croire que Jérusalem est un lieu historique pour les Juifs »...



Jérusalem, annexée depuis le 30 juillet 1980 à l’État d’Israël, est l’objet d’une bataille féroce. Les Palestiniens, appuyés par l’Union européenne, refusent farouchement que la ville qu’ils appellent Al Qods, et dont ils prétendent qu’elle est le troisième lieu Saint de l’Islam, revienne à l’État juif. La réponse définitive à cette question est renvoyée par la « Feuille de route » à la dernière phase du processus de solution du conflit, celle du règlement final. On en est loin car les Palestiniens, en refusant de démanteler les groupes terroristes armés et de réformer leur embryon d’État, ne jouent pas la carte de la paix.

Israël de son côté ne reste pas inerte. Il est en train de définir les contours du territoire auquel il aspire. Et faute de partenaire, il consolide unilatéralement son implantation là où il veut rester, et avant tout à Jérusalem.

Et voila que l’Union européenne veut se mettre une fois encore en travers de son chemin. Elle veut engager une action d’envergure pour imposer à Israël, par des actions spectaculaires, le partage de la ville.

L’initiative européenne non officielle de cette fin d’année

Il semble que l’Union Européenne prépare un tour à sa façon sur la question de Jérusalem. A la mi-décembre, Le Figaro donnait avec jubilation les résultats d’un sondage qui indiquait que 49% des Israéliens seraient prêts à un compromis avec les Palestiniens sur cette question [1]. Un certain Alan Ross, le représentant du gouvernement britannique à Jérusalem venait de donner, le 9 décembre, au journal palestinien Al Qods, une interview qui mérite une certaine attention [2]. Selon le représentant anglais, un document préparé par les consuls européens de Jérusalem recommande de rouvrir la Maison de l’Orient. C’est là que l’Autorité Palestinienne avait installé naguère une espèce de bureau d’administration. En violation des accords d’Oslo, elle en avait fait une représentation diplomatique semi clandestine. On y donnait en toute illégalité des réceptions auxquelles les diplomates et les consuls européens se pressaient. On y menait aussi des négociations euro-palestiniennes. Les Israéliens fermaient les yeux. Jusqu’au mois d’Août 2001, où suite à la boucherie de la pizzeria Sbarro, la Maison de l’Orient fut prestement fermée par Ariel Sharon.

Selon Alan Ross, les préconisations des consuls vont plus loin que la réouverture de la Maison de l’Orient. Ils désirent, en plus, quadriller Jérusalem Est par 11 autres institutions de l’Autorité Palestinienne. Ce qui revient à créer un véritable pouvoir palestinien au cœur de Jérusalem. Rien moins. Et, par la voix du représentant britannique, les consuls européens se déchaînent contre Israël, accusé de vouloir annexer la ville, de construire un mur, etc. Mieux encore : les quartiers Juifs de Jérusalem, Pisgat Zeev, Ramot, la Guiva Hatsarfatit, Har Homa et Guilo sont présentés comme des « colonies » ! En un mot comme en mille, l’Union Européenne réaffirme qu’elle ne reconnaît pas la Jérusalem unifiée, ni son rattachement à Israël comme capitale de l’État. Elle parait déterminée à promouvoir une campagne spectaculaire pour empêcher l’État juif de consolider sa présence dans sa propre capitale.

Le rapport des consuls soumis au Conseil des ministres de l’Union Européenne a été ajourné grâce à l’intervention de Gianfranco Fini, le ministre des affaires étrangères italien, qui a plaidé pour que l’Europe n’interfère pas sur les processus électoraux palestiniens et israéliens en cours. Mais, dit Alan Ross, on ressortira le rapport dès que les élections seront passées.

Il y a une autre version de l’affaire. A la fin novembre, un rapport sur Jérusalem Est a été établi par le Foreign Office, peut-être parce que le Royaume Uni assurait alors la présidence de l’Union [3]. La presse israélienne a pu s’en procurer une mouture. C’est bien sur le même rapport que celui des consuls. Si ces derniers ont été consultés, la paternité et l’initiative en reviennent certainement aux autorités politiques européennes, car on ne laisse pas une affaire de cette importance au soin de simples consuls. Le texte du Foreign office coïncide d’ailleurs en tous points avec le discours d’Alan Ross. Il va même plus loin puisqu’il prévoit d’organiser des marches solennelles de protestation, diplomates européens et responsables Palestiniens mêlés, de Ramallah à Jérusalem. Ce qui évoque irrésistiblement la marche sur Rome de Mussolini.

Les Palestiniens enfoncent le clou

Voila pourquoi les responsables israéliens ont ressenti une grande indignation. Silvan Shalom a tout de suite répondu : « Jérusalem sera pour toujours la capitale unifiée d’Israël ». Son porte-parole, Mark Regev a regretté la position partisane de l’Europe, « une survivance du passé …Nous sommes préoccupés par la régression du comportement des Européens, qui regardaient le conflit de façon unilatérale, avec les yeux des Palestiniens ». Parlant sous couvert de l’anonymat, d’autres responsables israéliens ont vu dans cette initiative, la preuve des positions ‘’implacablement pro palestiniennes‘’ du Foreign Office. [4]

Encouragé par cet appui, Mahmoud Abbas enfonce le clou dès le début décembre. Lors de sa visite en Italie, il a fait un lien entre le succès des élections palestiniennes et la possibilité « de tenir des élections démocratiques à Jérusalem… [Sinon] Israël serait responsable du blocage du processus démocratique en Palestine » [5] Mieux, il a invité le pape à Jérusalem : « Mahmoud Abbas a invité le pape Benoît XVI en terre sainte. "Vous serez le bienvenu à Jérusalem et dans tous les lieux saints" » [6] L’inénarrable président palestinien invite Benoît XVI, non pas chez lui – il n’a aucune présence, ni aucune souveraineté à Jérusalem -, mais chez les autres ; un peu comme si Chirac invitait le Souverain Pontife à la Maison Blanche ou à Buckingham Palace. En fait, sous des dehors bonhommes, Mahmoud Abbas, galvanisé par la position européenne, conteste la légitimité du pouvoir israélien, le principe de réalité de l’État juif. Inviter le pape à Jérusalem, c’est faire comme s’il n’y avait pas d’autorité israélienne sur cette ville, ou comme si cette autorité ne valait rien.

L’interférence de l’Union Européenne dans le conflit en cours au Proche Orient l’aligne encore une fois sur le point de vue palestinien qui, depuis le mufti nazi Hadj Amine Al-Husseini, jusqu’à Arafat et Mahmoud Abbas, en passant pas les fous de Dieu du Hamas, nie toute relation historique entre les Juifs et Jérusalem.

La revendication infondée des Palestiniens

Très récemment, le 13 décembre, une dépêche de l’agence palestinienne IPC, sur le site gouvernemental officiel, accusait Israël de programmer des travaux sous la mosquée Al Aqsa et à sa périphérie, autour du « mur Al-Buraq ». Le mur Al Buraq, en fait le Kotel, est une référence à la mosquée lointaine (Al Aqsa) que le prophète aurait visitée lors d’un voyage nocturne sur sa mule nommée Al Buraq. Le hic, c’est que la mosquée lointaine n’est jamais localisée à Jérusalem dans le Coran, et que la mosquée Al Aqsa a été construite à Jérusalem par les conquérants arabes de la dynastie des Ommeyades en 715, près d’un siècle après la révélation de la sourate du « voyage nocturne ».

Les travaux entrepris autour du « Mur Al Buraq » sont destinés selon l’agence palestinienne, à « fabriquer un patrimoine inventé de toute pièce, pour leur [les Juifs] permettre de tromper les visiteurs étrangers … en leur faisant croire que Jérusalem est un lieu historique pour les Juifs » [7] et elle s’indigne : « ainsi, une déclaration du gouvernement israélien affirme que le mur Al Buraq, qui est faussement appelé par les Israéliens le ‘’Mur des Lamentations’’, serait une part intégrante du patrimoine historique et religieux juif ». Rendez-vous compte ! Comment peut-on oser dire que le « Mur des lamentations » est une partie intégrante du patrimoine juif ! Quelle invention extraordinaire ! A part les islamistes forcenés, il n’y pas beaucoup de monde aujourd’hui pour soutenir qu’il n’y a jamais eu de royaumes juifs en Judée et en Samarie, que Jérusalem ne fut pas la capitale de David, de Salomon, jusqu’à Hérode, et que deux temples juifs ne furent pas construits sur le site du Mont du Temple ? C’est clair : entre les Palestiniens et l’Histoire, il y a quelque chose qui s’appelle le négationnisme. Ils tentent de fonder des droits politiques sur une manipulation grossière de leurs propres textes sacrés ; c’est outrageant, et pour la vérité, et pour les textes sacrés.

Dans des travaux remarquables [8], Dore Gold et Daniel Pipes ont analysé le contenu politique de la revendication des musulmans sur Jérusalem. Dans les époques historiques où la domination arabe sur Jérusalem était contestée, ou pas encore établie, la ville se trouvait soudainement revêtue d’une valeur religieuse pour les musulmans. Mais dès que la question du pouvoir n’était plus posée, ils faisaient preuve de la plus parfaite indifférence pour la cité biblique. Dans la dernière période, celle de la domination jordanienne qui va de 1948 à 1967, nul ne songea à faire de Jérusalem une capitale arabe, aucun prince, aucun chef d’État arabe, ne s’y installa, ni ne daigna même lui rendre visite. Et pour souligner le manque total d’intérêt religieux de Jérusalem pour les musulmans, le sermon retransmis le vendredi en Cisjordanie par la radio jordanienne n’était pas celui d’Al Aqsa, mais il venait d’une petite mosquée d’Aman.

On sait par contre l’importance de Jérusalem pour le peuple Juif ; on sait que cette ville, jamais mentionnée par le Coran, est citée dans le Livre 669 fois, et Sion (c’est la même chose), 154 fois. On sait aussi que les Juifs ont prié durant des millénaires en direction de Jérusalem et prononcé inlassablement dans leurs prières la phrase rituelle « l’an prochain à Jérusalem ». Par delà la référence religieuse, Jérusalem joue un rôle puissant dans les représentations du peuple juif et se trouve véritablement au cœur de son identité.

C’est pour cela que l’Union Européenne devrait réfléchir à deux fois avant de se lancer dans une campagne anti israélienne de plus. Si elle veut peser sur les évènements, elle doit absolument sortir de ses a priori pro palestiniens, ou « implacablement pro palestiniens ». La question de Jérusalem est inscrite à l’ordre du jour de la dernière phase du processus ouvert par la Feuille de route. Les deux protagonistes, les Israéliens et les Palestiniens, négocieront, et la clé de succès, c’est que les puissances étrangères ne s’avisent pas de peser selon leurs penchants, sur l’un ou l’autre des bras de la balance. En attendant que les Palestiniens veuillent bien s’engager dans un processus de négociation, en attendant qu’ils désarment les milices et qu’ils érigent une structure de pouvoir unifiée, Israël consolide ses positions à Jérusalem. Il semble avoir défini son futur périmètre géographique, compte tenu des impératifs de sa sécurité, mais aussi de la préservation de son identité, de ses ressorts moraux et religieux. Quel État ferait autrement ? Plus les Palestiniens tergiverseront, plus ils ajourneront leur engagement véritable dans un règlement, moins leur position sera favorable. Ils semblent faire le pari contraire, comme d’habitude, et ils risquent de perdre beaucoup, comme d’habitude.

L’Union Européenne, en tout cas, n’a aucun intérêt à adopter l’attitude suiviste et inconditionnelle que la diplomatie française lui a inspirée. Sous la férule de Jacques Chirac, elle a déjà empoisonné le climat en faisant condamner Israël sur la question de la barrière de sécurité, unanimement, par les 25 pays de l’Europe unie, lors de l’Assemblée Générale de l’ONU de juillet 2004. Pour quel résultat ? Aucun, si ce n’est l’affichage de son impuissance. Elle serait avisée cette fois-ci, de s’abstenir de jeter de l’huile sur le feu.

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- Pas d’ingérence européenne dans la question de Jérusalem
- par Jean-Pierre Bensimon, 19 décembre 2005
-  Source : Objectif Info

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Bonne lecture et à très bientôt.

[1Une moitié d’Israéliens prêts à partager Jérusalem 17 décembre 2005

[2Aroutz Sheva dimanche 11 décembre 2005

[3Israel : EU report may hurt relations Tovah Lazaroff Jerusalem Post 27 novembre 2005

[4Foreign Office ’unrelentingly pro-Palestinian’ says Israel Chris McGreal The Guardian samedi 26 novembre 2005

[5Pour Mahmoud Abbas, Jérusalem sera un scrutin clé Reuters 3 décembre 2005, 17h02

[6Mahmoud Abbas invite Benoît XVI en terre sainte Associated Press 3 décembre 2005, 20h25

[7Israel Funds Construction Acts beneath Al Aqsa Mosque at the Cost of NIS 68 Million Site officiel palestinien GAZA, Palestine, 13 décembre 2005 http://www.ipc.gov.ps/ipc_new/engli...-

[8Dore Gold Jerusalem in International Diplomacy 2001 http://www.jcpa.org/jcprg10.htm - Daniel Pipes Les revendications des Musulmans sur Jérusalem Middle East Quarterly 2001, A qui appartient Jerusalem Los Angeles Times 21 juillet 2000, et Lessons from the Prophet Diplomacy Middle East Quarterly septembre 1999